Joseph Frank. DE L’EXTASE. Extrait du « Traité de pathologie interne » (Bruxelles), 1842,  tome 2, Chapitre VIII, pp. 43.

Joseph Frank. DE L’EXTASE. Extrait du « Traité de pathologie interne » (Bruxelles), 1842,  tome 2. Chapitre VIII, pp. 43.

 

Joseph Frank (1771-1842). Médecin allemande, qui laissa dans sa langue d’origine un important travail : Praxeos medicæ universæ præcepta, Leipsick, 1821-43, 13 vol.. Ses traductions en français se résumant en 1 ou 2 volumes. Également sur notre site :
— DU RONCHIUS, de l’agitation, des crampes, de la chaleur et des frayeurs nocturnes. — Des songes effrayants. De l’incube (cauchemar). Extrait du « Traité de pathologie interne », (Bruxelles), tome II, 1842, pp. 23-28. [en ligne sur notre site]
— L’INCUBE (cauchemar). Extrait du « Traité de pathologie interne », (Bruxelles), tome II, 1842, pp. 26-28. [en ligne sur notre site]
— DE LA CATALEPSIE. Suivi d’un supplément contenant l’étonnante histoire d’une catalepsie composée. Extrait du « Traité de pathologie interne » (Bruxelles), 1842,  Tome 2. Chapitre XIV, pp. 43 – 55. [en ligne sur notre site]

Les [p.] renvoient aux numéros de la pagination originale de l’article. – Les images, ont été rajoutées par nos soins. – Nouvelle transcription de l’article original établie sur un exemplaire de collection privée sous © histoiredelafolie.fr

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CHAPITRE XIII. — DE L’EXTASE.

I.

DÉFINITION, BIBLIOGRAPHIE.

1. Définition. — Une contemplation profonde, pendant laquelle le malade ne change pas de place ; les sens sont dans l’inaction, sans qu’il y ait apparence de sommeil ; le geste, les paroles, ou les chants, indiquent comme des visions divines, une communication intime avec les anges ou les démons : voilà ce qui constitue l’extase (1).
2. Bibliographie. — L’extase a été décrite, mais pas toujours sans être confondue avec l’état magnétique et la catalepsie, par Cobold, Gerdesius, Panecius, Wedel, Eber, Zorn, Handtwig, Behrends, et d’autres.

II.

SYNPTÔMES, CAUSES.

1. Symptômes. — Le malade, au début du paroxysme, devient tout à coup contemplatif, absorbé dans des choses imaginaires ; sa physionomie, son attitude, indiquent le sujet qui s’est emparé de son esprit ; ses yeux sont ouverts et fixes, l’ouïe persiste, le tact a disparu ; il peut être assis, debout ; il parle avec emphase (2 ; il parait s’entretenir avec les anges (3) ; il se sert d’une langue étrangère (4) ; il chante. Tantôt tous ces accidents se représentent périodiquement, tantôt ils durent pendant un long espace de temps et se terminent, suivant les cas, par des convulsions, par la catalepsie, ou par le sommeil. [p. 43, colonne 2]

2. Causes. — Les causes de l’extase sont les mêmes qui produisent la catalepsie. Il faut néanmoins ranger surtout dans ce nombre une méditation prolongée sur un seul et même objet, et principalement sur l’affaire du salut. Il ne faut pas non plus passer sous silence, comme cause d’une extase particulière, les effets du gaz protoxide d’azote.

III.

DIAGSOSTIC, PRONOSTIC, TRAITEMENT.

1. Diagnostic. — L’extase diffère de l’état magnétique, avec lequel, d’ailleurs, elle a une grande affinité, en ce que, dans ce dernier cas, le malade présente très-souvent l’apparence du sommeil, qu’il se comporte comme un somnambule, qu’il change de place, qu’il est porté à prédire, et qu’il n’est pas toujours entièrement privé de l’usage des sens. La différence qui existe entre l’extase et la catalepsie sera indiquée plus bas. Nous pensons que les poètes Italiens, qui font des vers à l’instant même (les improvisateurs), sont aussi dans une condition qui tient de l’extase. Wepfer parle d’un homme qui tombait dans une sorte d’extase, lorsqu’il s’occupait de mathématiques on de poésie.

2. Pronostic. — L’extase est plutôt redoutable à cause des maladies qu’elle accompagne ordinairement. Dans les siècles barbares, quelquefois elle frayait la route qui conduisait au bucher.

3. Traitement. — Le traitement ne diffère point de celui de la catalepsie, que nous allons donner tout à l’heure.

Notes

(1) De έζίστημι, privation des sens, Hippocr. — En français, extase ; en allemand, Begeisterung ; en polonais, zachwycenie.

(2) Sauvages parle d’une jeune fille (vol. III, p. 422) qui restait assise ne répondant à aucune question, soit par signe, soit en paroles, prenait peu de nourriture, tenait ses bras étendus en croix, et proférait dans sa langue naturelle ces mots : Jean, Jean, je demande le paradis !

(3) La jeune tille dont j’ai parlé ailleurs (édit. 2, P. I, vol, III, sect, II, cap. XIV, § 36, n° 3 (8)), après avoir poussé un cri comme si enfin elle eût aperçu tout à coup un objet désiré, changeait sa physionomie, qui par elle-même était [p. 43, colonne 2] commune, en celle d’un ange ; puis tenant les yeux ouvert, fixes et tournés vers le ciel, vers lequel elle portait aussi les bras, assise sur son lit, elle s’écriait : O saint Louis ! ô le plus beau des jeunes gens, approchez et recevez-moi ! puit elle chantait des psaumes d’une voix argentine. Le paroxysme était ordinairement précédé et suivi d’aphonie.

(4) Borelli, cent. II, obs. 54. Voyez Krüger’s Versuch einer Experimental-Seelenlebre, Halle, 1756. Dans Anhang, p. 11. On raconte d’une femme de l’Aquitaine qu’elle parla espagnol dans un paroxysme d’extase, Dans les autres moments, elle croyait ignorer cette langue. Sans doute il lui était arrivé autrefois d’entendre plusieurs mots de cet idiome, et de les retenir à son insu.

The able doctor, or, America swallowing the bitter draught. (London), 1774.

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