Jules Delassus. Les Incubes et des Succubes, Paris, Société du Mercure de France, 1897, 1 vol. in-12, 62 p., 2 ffnch. [Références: Yve-Plessis. : 602.]
Nous n’avons rien trouvé comme renseignement biographiques ou bibliographique sur Jules Delassus. La B.n. F. ne possède qu’un exemplaire de cet auteur [8- NF- 26863] mais ne mentionne aucun renseignement supplémentaire. Peut-être pourrions nous le placer parmi les les auteurs, dits, « décadents » de la même époque. Ou peu-être tout simplement s’agit-il d’un pseudonyme emprunté à l’occasion d’un sujet par trop sulfureux. Toujours est-il que c’est une « somme » sur le sujet.
Les [p.] renvoient aux numéros de la pagination originale de l’article. – Nous avons gardé l’orthographe, la syntaxe et la grammaire de l’original. – Par souci de clarté et commodité nous avons renvoyé les notes originales de bas de page en fin d’article. – Pour les mêmes raisons nous avons renvoyé la rubrique « Ouvrages consultés » en fin d’ouvrage. – Les images ont été rajoutées par nos soins. – Nouvelle transcription de l’article original établie sur un exemplaire de collection personnelle sous © histoiredelafolie.fr
Jules Delassus
Les Incubes et les Succubes.
Procul recedent sornnia
Et noctium phantasmata
Hostemque nostrum comprime
Ne polluantur corpora
(complies)
[p. 9]
1. Les légendes et les faits.
Les docteurs en Mystique noire définirent Incubes les démons qui s’accouplaient aux femmes et Succubes les satanes qui ne dédaignaient pas de copuler avec les hommes.
Les curieux phénomènes de l’Incubat et du Succubat remontent aux temps très anciens, à l’origine du monde. Le serpent qui « se mêla avec Eve » c’était l’Incube Samaël. Le rabbin Elias raconte que pendant cent trente ans Adam fut visité par des diablesses qui accouchèrent d’esprits de larves et de succubes. Ces diablesses étaient des formes de Lilith l’épouse de Samaël. Dans la Genèse (Ch. 6. v. [p. 10] 4), il est dit que les fils de Dieu connurent des filles des hommes. De ce commerce naquirent des géants. D’après les commentaires des théologiens qui discutèrent longuement sur ce point, ces fils de Dieu n’étaient autres que des anges déchus qui jouaient le rôle d’Incubes. Au Deutéronome, ch. 4. il est dit encore que tous ceux qui s’étaient accouplés au diable Péhor moururent malheureusement ; et au Lévitique : « Vous n’irez plus sacrifier à vos satyres diables avec lesquels vous avez paillardé. » S’il faut en croire Isaïe, à Babylone il y avait des êtres velus qui cohabitaient avec les mortels. Ce sont les Faunes et les Satyres du paganisme. Suivant saint Augustin ils tourmentaient les femmes pour jouir d’elles, et bien souvent ils réussissaient dans leurs entreprises luxurieuses.
L’antiquité eut aussi les très séduisantes Sirènes qui perdaient les navigateurs, les Ephialtes et les Insultors dont l’étreinte étouffait. Un disciple d’Apollonius de Thyane, Ménippe voulut épouser à [p. 11] Corinthe une étrangère d’une grande beauté et très riche qu’il aimait. Le jour des noces, dans son palais magnifique, la fiancée resplendissait sous le costume nuptial. Le divin Apollonius s’approcha d’elle et la toucha de sa baguette magique. Alors on vit une chose horrible. La femme si belle se décomposa en une larve hideuse qui s’enfuit, le palais superbe s’était évanoui. Cette femme était une Empuse, c’est à dire un démon succube. Les Gaulois connurent aussi des Incubes qu’ils appelaient Duses ou Tauses.
C’est surtout au moyen âge que l’Incubat et le Succubat devinrent très fréquents. Avec sa religiosité maladive, sa sensualité étrange, qui se traduisirent par de très blanches vertus et d’infâmes débauches, le moyen âge était l’époque la plus favorable au développement de ce vice qui prit alors une forme plus malsaine que dans l’antiquité. L’Incube c’est l’esprit de luxure lui-même, le très libidineux Asmodée, infiniment expert dans l’art [p. 12] érotique, pratiquant en maîtres les plus sales raffinements de la volupté la plus perverse. C’est qu’il vient de l’enfer qui doit être une excellente école de salacité. Les penseurs, juristes, théologiens, aux XVe et XVIe siècles s’appesantirent avec complaisance sur cette grave question si attirante pour eux. Leurs œuvres regorgent de faits, les exemples se multiplient.
Les études de Sprenger, de Nider, de Barthélemy de Spina, d’Institor, de Molitor, peuvent se résumer ainsi : Les hommes s’écartant de Dieu laissent un libre cours à leurs désirs et à leurs passions. Ils deviennent tellement obscènes qu’ils en arrivent à désirer et à accomplir l’acte charnel même avec des bêtes. Bien plus, il en est qui avouaient en confession qu’ils le feraient avec Dieu s’ils le pouvaient. Ils ne redoutent pas l’assaut des fétides démons qui se transforment en belles apparences d’hommes et de femmes pour capter dans leurs lacs les âmes misérables. [p. 13]
Les démons ne se font pas Incubes seulement parce qu’ils sont paillards et pour la jouissance qu’ils se procurent de cette façon, mais surtout parce qu’ils attaquent ainsi les âmes et les corps par le péché qu’ils préfèrent, la fornication.
Pour devenir Incubes et Succubes, les diables s’enveloppent d’un corps aérien condensé qui prend les apparences de la matière. On ne peut ni les blesser, ni les tuer. Ce sont des vapeurs qui s’élèvent en forme de fantôme, et « leur âme est comme un matelot dans un navire ballotté par le vent ». Presque toujours ils sont invisibles à moins de conditions spéciales. On a vu dans les champs ou dans les bois des femmes étendues sur le dos, le ventre nu jusqu’au nombril, remuant lascivement les hanches et les cuisses. L’Incube restait invisible. Quelquefois, mais très rarement, à la fin de l’acte, une vapeur noire paraissait sur leur corps rappelant vaguement la forme d’un mâle. Des maris ont vu leurs femmes besogner avec des Incubes. [p. 14] Ils voulaient les tuer, mais le malin disparaissait. Il arrive aussi que le démon anime momentanément un cadavre et l’envoie s’offrir aux baisers des vivants.
Les incubes ont une prédilection marquée pour certains jours. Ils aiment surtout à se manifester les jours de fête : Noël, Pâques, la Pentecôte. Le péché est en effet plus grave en ces époques sacrées. L’apostasie et le sacrilège s’ajoutent au crime déjà très affreux de la démonialité. Et puis les jours de fêtes, passés dans l’oisiveté, favorisent la rêverie et la curiosité impures. Les jeunes gens succombent plus facilement à la tentation. Nider cite l’anecdote suivante : « Un jour de fête, une vierge pieuse fut invitée par une amie plus âgée à monter dans une chambre où se trouvaient enfermés de beaux jeunes gens. Elle accepta. La plus âgée passa la première dans l’escalier, recommandait à sa compagne de ne pas faire le signe de la croix. Elle le promit, mais le fit cependant à la dérobée. Il [p. 15] arriva que lorsqu’elles seraient entrées dans la chambre, la vierge ne vit personne. Les démons qui étaient là ne purent lui montrer leurs corps empruntés. La vieille, furieuse de ce qu’elle se fût signée, l’injuria. C’est extrait ajoute Nider, de la confession de cette vierge. »
Les Incubes s’attaquent à n’importe quelle femme, mais Guilhellmus prétend qu’ils distinguent particulièrement les femmes et les jeunes filles qui ont une belle chevelure ; probablement parce qu’elles tirent vanité de leurs cheveux, qu’elles passent trop de temps à les soigner et à les orner, et s’en servent pour enflammer les désirs des hommes. Dieu le permet afin de leur ôter l’envie de séduire les hommes par cette chevelure qui séduit même les démons… Aussi, de crainte des Incubes, il est prudent que les femmes soient voilées.
Pour chasser les esprits impurs, les armes les plus efficaces sont les bénédictions, les exorcismes, [p. 16] les sacrements, et surtout le Signe de la Croix et la Salutation angélique. Il est aussi des amulettes et des fumigations de cannes aromatiques, de poivre cubèbe, de racines d’aristoloche, de cardamome, de gingembre, de maïs, etc., qui ont le même pouvoir. Certaines herbes froides, nénuphar, hépatique, euphorbe, mandragore, jusquiame peuvent aussi délivrer des Incubes. L’emploi des pointes, de l’épée magique, la fuite et le changement de lieu sont également des remèdes.
Il est des gens qui se livrent volontairement aux Incubes et aux Succubes. Tel est le cas des adeptes de la sorcellerie. Bodin, de Lancre disent, en effet, que toutes les sorcières, tous les sorciers copulaient avec le diable. Une femme, Jeanne Hervillier, née à Verbery, près de Compiègne, confessa que sa mère la présenta à l’âge de douze ans au diable, qui avait la forme d’un grand homme noir, vêtu de noir, botté, éperonné, l’épée au côté. La mère lui dit : « Voici ma fille que je vous ai [p. 17] promise », et à sa fille : « Voici votre ami qui vous fera bien heureuse ». Le malin la fit renoncer à Dieu « et puis coucha avec elle charnellement, en la même sorte et manière que font les hommes avec les femmes, hormis que la semence était froide. Le plus souvent, les accouplements maudits avaient lieu après les danses et les festins du Sabbat. Les femmes qui y assistaient prenaient un singulier plaisir à raconter les scènes ignobles qui s’y déroulaient, et donnaient avec complaisance des détails sur la très immondes accointances sataniques, qui les laissait cependant toutes sanglantes, « aussi bien devant que, derrière, selon le lieu où il est allé heurter » : l’organe du démon était, paraît-il, énorme et couvert de squames dures comme le fer qui blessaient en se rebroussant. Johannès d’Aguerre dit que le diable en forme de bouc avait son membre au derrière et connaissait les femmes « en agitant et poussant avec iceluy contre leur devant ». Satan sodomite avait coutume de posséder les belles à [p. 18] la manière ordinaire et les laides tout au rebours. Ou bien encore, sans distinction esthétique, le démon incube besognait à la fois dans les deux vases, car sa mentule était fourchue. Il préférait aussi les femmes mariées aux vierges, parce que l’adultère était un péché plus grand.
Mais l’Incubat ne revêtait pas toujours des formes aussi repoussantes. Le diable était quelquefois facétieux. Si l’on en croit Boethius, un moine fut poursuivi par un Succube très beau qui l’embrassa lui faisant des invites obscènes. Inclinant son corps, la beauté d’enfer se mit dans la position des chevaux et des bêtes qui n’ont point d’âme. Déjà le moine s’efforçait d’accomplir l’acte charnel, le Succube poussa un ululement sinistre et, ombre ténue, phantasme léger, s’évapora entre les bras du malheureux galant qui culbuta tout honteux. Le plus souvent d’ailleurs, surtout en dehors du Sabbat, une volupté intense captivait les victimes. Et sur le bûcher, alors que la flamme venait [p. 19] lécher sa chair grésillante, la sorcière, au milieu de la souffrance horrible qui la tordait, se souvenait des caresses délicieuses de son très doux rêve, pensait à l’Incube chéri qui la faisait haleter sous ses baisers, qu’elle allait retrouver à tout jamais en enfer.
Il était des gens qui recevaient les Esprits du Mal à la suite d’un maléfice. Ces viols constituaient une vengeance raffinée qui devait remplir d’une joie étrange l’âme des sorciers. Un homme accomplissait l’acte vénérien avec un Succube, même en présence de sa femme, et on ne voyait rien de corporel couché avec lui. Il en ressentait une fatigue énorme ; lorsqu’on l’interrogeait, il répondait qu’il ne voyait rien, mais que son esprit était captivé à ce point que la résistance lui était impossible. On soupçonna une femme qu’il avait injuriée, d’être la cause du mal.
Il arrivait aussi que les démons, lassés de leurs amours infernales, s’enamouraient des mortels. Ils [p. 20] devenaient alors des amants passionnés et tendres. Boethius, dans son histoire d’Ecosse, rapporte qu’un jeune homme était tenté par un Succube d’une ravissante beauté. Il pénétrait chez lui à travers les portes et les murs et fit tout pour le posséder. Mais le jeune homme vertueux alla trouver son évêque et les remèdes spirituels le délivrèrent. Assez souvent, le démon prend la forme d’un être aimé pour atteindre plus facilement sa proie. Brognoli, cité par Goerres, vit en 1650 à Bergame un jeune homme auquel le démon était apparu un soir sous la forme d’une jeune fille qu’il aimait. Le fantôme lui raconta une petite histoire expliquant sa présence à cette heure, à cet endroit : sa mère l’avait maltraitée, elle s’était enfuie et se réfugiait près de lui. L’amoureux se doutait bien que ce n’était pas là son bien-aimée, mais un démon ; il succomba cependant à la tentation. Le Succube lui dit alors qui il était, une larve qui l’aimait. Les exorcismes eurent raison des enchantements de l’enfer, et le [p. 21] jeune homme fit pénitence de ses péchés. Brognoli raconte encore la curieuse histoire que voici telle qu’elle se trouve dans la Mystique de Goerres : « En 1643, je fus chargé par mes supérieurs d’aller exorciser une jeune fille de vingt ans qui était poursuivie par un Incube. Je me rendis chez elle avec son confesseur. A peine étions nous entrés que le démon, qui était précisément alors occupé avec elle, se retira. Elle m’avoua sans détour tout ce que l’esprit impur faisait avec elle. Je jugeai, d’après ce qu’elle me dit, que malgré ses dénégations, elle prêtait au démon un consentement indirect. En effet, elle était toujours avertie de ses approches par une surexcitation violente des organes sexuels ; et alors, au lieu d’avoir recours à la prière, elle courait à sa chambre et se mettait sur son lit. J’essayai d’éveiller en elle des sentiments de confiance envers Dieu ; mais je n’y pus réussir, et elle semblait plutôt craindre d’être délivrée. Je la quittai donc après avoir laissé à son confesseur et à ses [p. 22] parents quelques prescriptions touchant le jeûne et la mortification ».
Ce commerce monstrueux était-il fécond ? Presque tous les auteurs l’affirment : le démon, n’ayant ni chair ni os, n’avait pas de semence. Il recueillait le produit des pollutions vaincs ou bien, se faisant Succube, il dérobait à des hommes puissants le sperme. Devenu incube, il transportait ce sperme dans la matrice de la femme qu’il voulait engrosser. Les enfants procréés de cette manière étaient plus lourds que les autres, toujours maigres et pouvaient tarir trois nourrices sans engraisser. Quel était le père, le démon ou l’homme qui avait fourni la semence ? D’après les théologiens, c’était l’homme. Sinistrari d’Ameno, au XVIIe siècle, prétendait que les Incubes et les Succubes possédaient des organes sexuels et employaient leur propre semence. Suivant la légende, un grand nombre d’hommes célèbres sont nés de cette façon. Sans parler des Géants de la Genèse, on peut citer [p. 23] Romulus et Remus, Servius Tullius : la mère de ce dernier se vantait d’avoir vu apparaître dans la cendre du foyer un phallus qu’elle avait reçu, et elle était devenue enceinte. Alexandre le Grand, lui aussi, avait une origine surnaturelle, et beaucoup d’autres encore. Merlin l’Enchanteur était né d’un Incube et d’une moniale, fille de Charlemagne. Vers la même époque, plusieurs princes étaient assemblés dans un palais sur le Rhin, près de Cologne ; un esquif que traînait par une chaîne d’or un cygne apparut. Un beau guerrier inconnu descendit de la barque. Il resta dans le pays, se maria, eut des enfants, puis un jour le cygne revint le chercher et on ne le vit jamais plus. Le beau chevalier ne pouvait être qu’un esprit incube. Sous le règne du roi Roger, en Sicile, un jeune homme se baignait dans la mer, au clair de la lune. Il vit dans l’eau une femme qui se noyait ; il la sauva, en devint amoureux, l’épousa et eut un fils. Pris de doute, un jour, sur l’origine de cette créature, [p. 24] il lui demanda avec insistance qui elle était: « Tu me perds, lui dit-elle, en voulant m’obliger à répondre ». Elle disparut. Son fils, à quelque temps de là, se baignait dans la mer, elle apparut de nouveau et l’emporta. L’hérésiarque Luther eut aussi une naissance démoniaque. Le diable déguisé en marchand, vint à passer à Wittemberg. Il séduisit la fille de ses hôtes, puis retourna en enfer, la laissant grosse. D’où naquit Martin Luther.
Chez les peuples du Nord, en Islande et en Norvège, en Ecosse, on trouve des traditions analogues. Les Trolls et les Elfes s’unissent assez souvent aux fils et aux filles des hommes. Les Elfes habitent les éléments, les nuages, les rochers, les cavernes, les ruisseaux ou la mer. Leurs filles, à la peau bleue, sont cependant d’une merveilleuse beauté : « On citait jadis, dit Christian, des familles en Islande qui devaient leur origine à ces unions mystérieuses. »
Au XIXe siècle, les caractères de l’Incubat et du [p. 25] Succubat sont peu changé. Les cas semblent moins fréquents, ou plutôt sont moins connus. La science qui dédaigne l’occulte, ne voit dans les faits observés par les médecins que des maladies sexuelles dont elle ne recherche pas la cause. Presque seuls, les prêtres connaissent des exemples précis. Mais Ils se retranchent derrière le secret de la confession, et refusent de parler, craignant le scandale que pourraient produire des révélations de cet ordre. Voici deux exemples d’Incubat et de Succubat religieux. En 1816 et 1817, une jeune fille, Marie-Ange, parut avoir des rapports étranges avec l’invisible. Elle supportait les phénomènes extatiques et recevait d’innombrables baisers qu’elle attribuait à Jésus et à la Vierge. Ces baisers produisaient, chose très extraordinaire et légèrement grotesque, une liqueur et des bonbons délicieux que les témoins goûtèrent !
Dans le même genre, le chevalier de Caudenberg, vers 1855, à la suite de pratiques spirites, crut [p. 26] échanger des baisers avec la Vierge qu’il sentait « réellement » contre lui, baisers qui le remplissaient de volupté.
La renaissance bâtarde des antiques invocations, qu’était le Spiritisme, devait inévitablement favoriser l’Incubat et le Succubat. On faisait venir les morts, on leur parlait, on les touchait ; toujours docile, le trépassé répondait à l’appel. L’impossible rêve de posséder les disparus aimés devint réalisable. Le veuf pu étreindre son épouse perdue. La veuve se consola du fantôme de son mari ! Mais on alla plus loin. Pourquoi n’aurait-on pas évoqué les femmes célèbres, courtisanes ou reines, dont les corps splendides, redevenus poussière, hantent l’imagination des songeurs ? Certes la tentation était grande de jouir de Sémiramis, de Cléopâtre, de Laïs ou de Théodora, les très belles qu’adora le monde ancien. Plus d’un spirite y succomba. Des femmes sentimentales possédèrent leurs poètes ou leurs héros favoris. Malheureusement, [p. 27] le Diable, qui depuis quelque temps se tenait à l’écart, mais toujours aux aguets, en profita pour rentrer en scène, s’il faut en croire M. des Mousseaux, cité par M. S. de Guaita dans son très remarquable Temple de Satan (1). Dans un ouvrage « parfaitement orthodoxe », les Hauts phénomènes de la Magie, M. des Mousseaux rapporte des histoires de cédules signées avec du sang ; le Malin très correct, apparaît dans une réunion de jeunes filles, les séduit par son esprit, puis se livrent aux plus ignobles débauches, et à l’aube, s’évanouit « comme s’évanouirait une ombre ». Tout cela se passe le 17 juillet 1844. Onze ans de suite, le Diable revint visiter une des filles qu’il avait distinguée. M. des Mousseaux raconte aussi que dans certaines séances de spiritisme, des dames qui se trouvaient autour du médium ressentirent des attouchements obscènes « vers la partie inférieure du buste ». [p. 28]
Les fantaisistes histoires de M. des Mousseaux sont assez réjouissantes. Mais, tout récemment, l’Incubat avait pris un développement considérable et se manifesta plus gravement immoral, grâce à une secte bizarre : Le Carmel de l’hérésiarque Vintras, secte étudiée à fond par M. S. de Guaita dans le Temple de Satan, dont sont extraits les documents qui vont suivre. Eugène Vintras et son successeur l’abbé B… enseignaient que la rédemption des Etres devait s’effectuer par des actes d’amour, accomplis : « 1° Avec les esprits supérieurs et les élus de la terre pour se célestifier, acquérir soi-même les vertus et ascensionner individuellement. 2° Avec les profanes et les esprits inférieurs, élémentaires, animaux, à cette fin de célestifier ces pauvres natures déchues, etc. » Cette doctrine aboutissait donc, grâce à ces unions avec les êtres supérieurs et les esprits élémentaires, à l’Incubat, qui se trouvait érigé en pratique de Sainteté, ce qui dénotait beaucoup d’originalité et une certaine [p. 29] hardiesse chez les apôtres de cette nouvelle religion. Les lettres citées par M. de Guaita ne laissent aucun doute sur la nature de ces unions occultes. Dans l’une d’elles, d’un prêtre parlant d’une dame qui s’était laissée prendre au piège, on peut lire : « La malheureuse est obligée de recevoir et les caresses et les embrassements, non seulement des esprits de lumière, mais encore de ce qu’elle appelle les humanimaux monstres puants qui empestent sa chambre et son lit et qui s’unissent à elle pour s’élever à l’humanisation. Elle m’assurait qu’ils l’ont engrossée à plusieurs reprises et que, pendant neuf mois de cette gestation, elle a éprouvé tous les symptômes, et même les signes extérieurs de la grossesse. Le terme arrivé, elle accouche sans douleur et il s’échappe des vents de l’organe d’où sortent les enfants quand la délivrance s’opère pour la femme. » B… lui-même se « célestifie toutes les nuits au baiser des Anges de lumière Sahaël, Anandhaël et autres, et se fait [p. 30] assaillir à posteriori par le fantôme lubrique du circoncis Ezéchiel ». Et encore : « In ventrem ergo cubans, manu stupratur. Tunc foemini crebro Spiritus vocati apparent quorum formas modo simul, modo altemis vicibus sibi submissas sentit… » B… est mort en janvier 1893, se croyant envoûté. Sa secte a disparu.
Mais il existerait actuellement, suivant l’opinion du clergé, de très nombreuses associations sataniques. Dans leurs réunions, bourgeoises réductions du Sabbat, Satan apparaît « visible et tangible ». Il est donc assez vraisemblable que les sataniques ont avec lui des rapports sexuels. Le Diable ne doit pas négliger de s’attacher par la toute puissante chaîne de la salacité ceux qui lui sont déjà dévoués. Donc toutes ou presque toutes les personnes qui satanisent avec un entier consentement et en pleine connaissance de cause sont coupables d’Incubat ou de Succubat.
Les médecins observent assez fréquemment les [p. 31] phénomènes de l’Incubat chez des hystériques qui se plaignent d’être violées la nuit par des êtres fantastiques ou par des personnes qu’elles connaissent, et qui, souvent frigides dans les rapports sexuels normaux, éprouvent les plus vives jouissances dans leur hallucinations. Des individus atteints d’une hyperesthésie sexuelle très avancée se livrent à des pratiques qui, sous le nom de « coït idéal », ont de grands rapports avec l’Incubat. D’après les docteurs Von Krafft-Ebing, Hammond, Moll, ces individus, se trouvant en présence d’une femme qui leur semble désirable, « se mettent psychiquement en relation sexuelle et arrivent à l’orgasme et à l’éjaculation ».
On peut donc distinguer dans les phénomènes de l’Incubat et du Succubat deux grandes classes.
L’Incubat involontaire, celui des maléficiés et des malades.
L’Incubat volontaire, des sorciers, des spirites et de certains individus se livrant à des pratiques spéciales. [p. 32]
- II. Les doctrines.
L’Incubat et le Succubat consistent essentiellement en hallucinations d’ordre sexuel avec ou sans apparition agissante.
L’antiquité païenne attribua ces phénomènes à l’intervention d’êtres surnaturels : des personnages occupant un rang plus ou moins élevé dans la hiérarchie mythologique s’amourachaient des hommes ou des femmes. Ayant des passions très chamelles, ils s’efforçaient, pour les satisfaire, d’arriver à la possession brutale. Les juifs expliquaient ces manifestations par l’influence néfaste de Lilith, la couleuvre tortueuse du Talmud, la femelle [p. 33] symbolique qui dissout et tue, dont la hantise remplit les Livres Saints. Le moyen âge y vit simplement l’œuvre immonde du Très Bas.
Jusqu’au XVIIe siècle, ce fut la théorie généralement adoptée. A cette époque, le R. P. Louis Marie Sinistrari d’Ameno, de l’ordre des Mineurs Réformés de l’étroite observance de saint François, fit un ouvrage sur la démonialité (2), ouvrage dont les conclusions sont assez originales. Par une argumentation serrée et spécieuse, s’appuyant sur la lettre des textes sacrés, il démontre que les Incubes et les Succubes sont des êtres spéciaux supérieurs à l’homme, d’une essence plus Spirituelle que lui, intermédiaires entre l’homme et les Anges. Ces êtres sont doués de vertus prolifiques et leur penchant pour les humains correspond à la bestialité chez ces derniers. Sinistrari admet qu’ils ont été rachetés par Jésus-Christ et sont chrétiens. Cette doctrine étrange ne fut pas condamnée par l’Eglise, bien que [p. 34] peu conforme aux grands principes de la Théologie mystique, qui ont été magistralement exposés par Goerres dans « la Mystique divine, naturelle et diabolique » (3) : La vie organique est une génération continuelle, il en est de même de la vie spirituelle. A côté de l’Eglise, union mystérieuse du Christ et de l’homme. L’Anti-Eglise engendre le mal comme l’Eglise de Dieu engendre le bien. « Dans cette génération satanique, nous retrouvons, en un certain sens, les rapports sexuels de la génération matérielle, et le démon, faisant fonction tantôt de l’élément actif, tantôt de l’élément passif, propage, ainsi l’empire du mal et du péché dont il est le roi ». Suivant Goerres, le phénomène se présenterait de deux façons différentes, tantôt ce sont les angoisses de l’étouffement, de la paralysie, tantôt, au contraire, c’est une surexcitation violente des [p. 35] organes sexuels avec la sensation du dégagement du système musculaire, quelque chose comme le vertige de la vitesse. Martin d’Arles raconte, dans son livre des superstitions, qu’une dame très pieuse se voyait souvent, en songe, chevauchant à travers la campagne avec un homme qui abusait d’elle, ce qui lui causait une très grande volupté. Une sorte de pressentiment somnambulique trahit l’approche des puissances infernales. Le clergé actuel conserve encore les mêmes théories. Les rapports luxurieux avec le Diable sont possibles et il y en a fréquemment, surtout dans les sectes sataniques dont les fidèles, soit dans leurs réunions, soit en particulier, s’adonnent à l’Incubat ou au Succubat. Mais les théologiens modernes prétendent que l’apparition agissante n’a pas de réalité objective. Elle est purement subjective ; l’excitation sexuelle vient des centres nerveux non de la périphérie. On ne peut photographier l’Incube. Sprenger disait déjà que le contact du démon était spirituel, non corporel. [p. 36]
Dès le moyen âge et la Renaissance, des savants avaient mis en doute la réalité objective de ces phénomènes. Wier affirma que souvent l’Incubat était une excuse qui cachait des vices honteux. Les amoureux jouaient le rôle agréable d’Incubes. Des prêtres rusés et pratiques agissaient pour leur dieu ainsi que le montre un scandale arrivé à Rome sous Tibère. Une Romaine du nom de Pauline, très chaste et très belle, avait pour époux Saturninius. Un jeune chevalier, Mundus, ne pouvant la séduire, acheta les prêtres du temple d’Isis où elle se rendait fréquemment. Les prêtres lui annoncèrent qu’Anubis l’avait distinguée, qu’il voulait s’unir à elle. Toute heureuse, Pauline prévint son mari qui, très honoré de ce divin cocuage, laissa sa femme s’abandonner une nuit dans le temple où le malin Mundus la posséda. Mundus, peu discret, se vanta de son aventure, Tibère l’exila, les prêtres furent crucifiés, la statue d’Isis jetée dans le Tibre. D’autre part, attribuer une origine surnaturelle à une [p. 37] grossesse flattait l’orgueil de la femme, qui trouvait encore un procédé facile pour cacher une faute.
Cardan, Godelmann, Porta prétendirent que le commerce diabolique était une illusion. Des inquisiteurs eux-mêmes, qui admettaient l’œuvre démoniaque avec toutes ses conséquences, reconnaissaient que souvent ce n’était en effet que pure imagination : « A la vérité, dit Nider, il y a des gens, surtout des femmes, qui croient à tort être la proie des Incubes. Les femmes imaginent facilement des choses extraordinaires, car leur esprit est plus impressionnable que celui des hommes ». Paul Eginète, médecin cité par Goerres dit que l’Incube n’est qu’un cauchemar : « L’Ephialte tire son nom, selon quelques-uns, d’un homme qui s’appelait ainsi, ou bien encore de ce que ceux qu’il attaque se croient dominés par un esprit. Thémison néanmoins, au 12e livre de ses épîtres, l’appelle Pnigalion, parce qu’il étouffe la voix et l’estomac. Cette maladie [p. 38] vient de trop boire et d’une digestion trop lente. Le malade a peine à respirer : ses sens sont hébétés et paralysés ; il se sent étouffé dans le sommeil et est surpris par un malaise subit. La voix est liée, et il ne peut que balbutier quelques mots inarticulés. Il lui semble, à son grand étonnement, qu’un homme ou une femme lui ferme la bouche pour l’empêcher de crier. Il agite ses bras et ses jambes dans son lit pour les chasser, mais en vain. Il croit même les entendre parler et le porter au crime ; bien plus, il les voit monter sur son lit et essayer de lui faire violence ». Paul Eginète ajoute que l’on doit attaquer le mal de bonne heure, parce qu’il peut conduire à l’apoplexie ou à l’épilepsie.
La science officielle est aujourd’hui de l’avis de Paul Eginète. Pour elle, il n’y a pas d’intervention étrangère. Les cas fréquents d’hallucination érotiques observés par les médecins sont le résultat de troubles nerveux. Ce sont de simples variétés [p. 39] de l’érotomanie, du satyriasis et de la nymphomanie. La grande névrose explique tout. Les centres nerveux génésiques peuvent entrer en fonction sous l’influence d’excitations internes dues à des causes diverses, le plus souvent morbides. Les hallucinations sexuelles se produisent généralement lorsque le sujet est couché sur le dos. Cette position, par suite de la pression des viscères sur les vaisseaux du bassin, favorise l’orgasme vénérien. Chez beaucoup d’individus hystériques, on observe une hyperesthésie sexuelle très grande, qui se traduit par des illusions du coït. Le récit des malades est sensiblement analogue à celui que faisaient les sorcières du stupre démoniaque. La grossesse hystérique présente tous les symptômes de la grossesse véritable, et cependant elle est absolument vaine. Les maladies des organes génito-urinaires, par suite de l’excitation qui en résulte, peuvent elles aussi, provoquer des illusions de l’Incubat. A la ménopause, c’est à dire à l’âge où les règles cessent chez [p. 40] les femmes, et chez certains maniaques, on trouve des hallucinations du même genre. Des femmes se figurent avoir des relations sexuelles avec le Saint-Esprit ; leurs hanches ondulent, simulant les mouvements du coït.
Presque toujours les victimes des Incubes et des Succubes sont des personnes pieuses appartenant au monde religieux. L’extase religieuse présente, en effet, de très grands rapports avec les jouissances physiques de l’amour. A l’époque de la puberté, au moment de l’éveil sexuel, très souvent se produisent des extases religieuses accompagnées de délires érotico-mystiques. Les vies des Saints sont pleines de sensations de luxure. Sainte Catherine de Gênes souffrait d’une telle chaleur intérieure que pour l’apaiser elle se couchait par terre et criait : « Amour, amour, je n’en peux plus » (4). On peut encore citer comme très caractéristique [p. 41] cette prière, trouvée dans un très ancien missel ; « Oh ! Puissé-je t’avoir trouvé, très charmant Emmanuel, puissé-je t’avoir dans mon lit ! Combien mon âme et mon corps s’en réjouiraient ! Viens, entre chez moi, mon cœur sera ta chambre ! (5) » Maria Magdalena de Pazzi, Elisabeth de Genton, qui se flagellaient, déliraient d’amour, étaient obsédées de visions voluptueuses qui mettaient leur chasteté à rude épreuve. (6) Et les savants attribuent tous ces troubles à une simple déséquilibration des centres nerveux.
Cette explication est évidemment exacte dans certains cas. Il est possible que des troubles fonctionnels, des névroses, accompagnés d’hyperesthésie sexuelle, produisent des hallucinations du coït. Très probablement les sorcières qui allaient au sabbat, les moniales qui dans leur cellule recevaient l’Incube étaient des hystériques. Mais leur [p. 42] hystérie n’était-elle pas artificielle ? Ces hallucinations ne peuvent-elles pas avoir d’autres causes ? Et tout d’abord l’hypnose. Un individu peut, par autosuggestion, se donner une illusion quelconque. On peut aussi persuader à un sujet qu’il aura, à un moment déterminé, la sensation de posséder telle personne. Ici déjà la larve cérébrale créée par la suggestion a une véritable existence individuelle. C’est l’Incubat authentique. Bien plus, on peut donner la suggestion à distance, et des hallucinations sont provoquées de cette façon alors que le sujet est endormi. Par hypnose, on est allé plus loin encore. M. de Rochas a réussi, dans les états profonds, à extérioriser la sensibilité. Il est, en somme, arrivé à former une sorte de fantôme dont toutes les impressions se répercutent sur l’être hypnotisé. Crookes a pu photographier le spectre Katie King. Et actuellement une femme, Eusapia Paladino, produit des formes fluidiques ayant figure humaine, dont on obtient des moulages. Il [p. 43] est difficile de douter de ces faits, observés par des hommes d’un talent scientifique immense, et dans des conditions rendant toute supercherie impossible. Pour expliquer ces phénomènes, il faut bien admettre l’existence du plan astral, dont les savants de bonne foi, au courant des découvertes de la science, ne peuvent plus nier l’existence, affirmée depuis des milliers d’années par tous les collèges initiatiques, par tous les adeptes. L’hallucination est la perception de phénomènes en astral, perception aussi exacte, aussi vraie que la perception directe des phénomènes du plan physique.
Ainsi donc il existe réellement des coagulations fluidiques qui restent en communication constante avec l’individu d’où provient la substance astrale qui les compose, et le corps physique de cet individu ressent d’une façon synchrone toutes les impressions de son double astral. Il n’est donc pas impossible qu’un fantôme de ce genre puisse posséder un homme ou ne femme s’abandonnant [p. 44} ou mis dans l’impossibilité de résister soit par le sommeil naturel, soit par le sommeil cataleptique qui se produit spontanément dans certaines affections nerveuses et dans l’extase. Toutes les sensations seraient ressenties par la personne qui se serait extériorisée et qui jouirait ainsi, réellement et à distance, de l’être convoité. C’est par un phénomène analogue que la sorcière qui avait bu le philtre, ou qui s’était oint les aines et les cuisses de l’onguent magique produisant la séparation du corps physique et du corps astral, se sentait transportée au sabbat et y assistait, alors qu’elle paraissait n’être pas sortie.
D’autre part, un individu en hypnose peut projeter son fluide astral sur l’objet convoité, quel que soit l’espace qui l’en sépare. Le fluide astral s’imprègne en quelque sorte de la forme de l’être désiré ; une larve façonnée à son image revient Incube ou Succube vers celui qui l’a évoquée.
Mais il est des faits plus étranges encore. Les [p. 45] savants qui poussèrent loin les expériences d’extériorisation du corps astral se heurtèrent à de véritables individualités n’ayant aucun rapport avec la personne servant de sujet. Il semblait que des entités intelligentes, venues on ne sait d’où, s’étaient emparées du fluide astral du médium, et l’employaient pour agir et se manifester. En face de l’expérimentateur se trouvait un être inconnu, doué de volonté et d’intelligence vagues peut-être, mais s’affirmant assez cependant pour qu’il fût difficile de ne pas voir une intervention étrangère, que les spirites attribuent aux âmes des défunts. Ainsi paraissent se vérifier les antiques théories des cabalistes, qui peuplaient l’espace d’êtres spéciaux, coagulations fluidiques semi-intelligentes, qui peuvent donner une grande réalité objective aux Incubes et aux Succubes.
Les théologiens qui s’occupèrent de ces questions troublantes s’accordent pour reconnaître que les Incubes et les Succubes choisissent pour [p. 46] se manifester certaines époques déterminées par les correspondances astrologiques, époques auxquelles les désirs voluptueux acquièrent une plus grande intensité. Il est des nuits sereines où l’on sent palpiter et vivre la nature, où l’on entre en communion plus intime avec elle. La pensée s’engourdit et cependant une béatitude profonde envahit l’être tout entier. La vie universelle devient très perceptible. Des souffles tièdes caressent et excitent l’épiderme comme des frôlements de formes invisibles. On se prend à aimer, sans savoir au juste ce que l’on aime. On aime le vent parfumé, les plantes qui bruissent, la terre qui respire, l’eau qui chante. Tout s’anime, le minéral lui aussi, et une sympathie puissante semble entraîner les règnes les uns vers les autres.
La vie astrale est plus violente, les fluides vivants qui circulent à travers l’immensité sont chargés d’instincts génitaux. Des appétits naissent, confus d’abord, qui vont se précisant ensuite. [p. 47] C’est la mystérieuse attirance sexuelle, forte et pourtant vague, indécise. Une somnolence pleine de rêveries douces, un demi-sommeil où l’on sent les approches de la volupté s’emparer des êtres. On dirait que la nature entière va goûter les joies nuptiales dans un baiser monstrueux. Les Incubes et les Succubes ne sont pas loin, ils vont paraître.
Mais ce ne sont encore que des embryons, des idées sans corps. Les forces astrales dominées par des volitions génésiques, cherchent les éléments qui leur permettent de se matérialiser, de se rapprocher du plan physique dans lequel elles trouvent les centres où elles peuvent satisfaire leurs aspirations luxurieuses. Eliphas Lévi, d’après Paracelse, dit : « que le sang régulier des femmes engendre des fantômes dans l’air, et que les couvents, à ce point de vue seraient les séminaires des cauchemars. » En effet, le sang menstruel, de même que le sperme et tous les liquides sécrétés par les organes générateurs, abonde en forces vitales non [p. 48] employées qui s’extériorisent et cherchent à se fixer, à s’utiliser. Ce sont de véritables larves dont les forces astrales s’emparent, s’enveloppent comme d’un corps dont elles sont l’esprit. Ce qui produit des entités étranges, semi-matérielles, semi-fluidiques, qui n’ont d’autre but que la satisfaction des désirs sexuels épars dans toute la nature.
Les Incubes et les Succubes sont formés, les voici. Et suivant la région, le corps astral de certain élément, terre ou feu, air ou eau, domine en ces êtres bizarres et modifie analogiquement leur tempérament. Ils sont alors mélancoliques ou sanguins, bilieux ou flegmatiques. Ce sont les Gnomes, les salamandres, les Sylphes et les Ondines de la légende. Et selon leur tempérament, ils entrent plus facilement en relation avec les hommes ou les femmes qui ont des caractères correspondants.
Maintenant qu’ils se sont individualisés, ils tourbillonnent autour des corps qui reposent, [p. 49] cherchant à s’unir à eux. Presque toujours, parmi ceux qui ont fourni les larves, il en est dans les conditions requises pour subir l’emprise érotique des fantômes : organismes maladifs, énervés par un célibat prolongé ou par toute autre cause. Chez eux, la résistance morale est presque nulle, la volonté atrophiée. Ils sont en quelque sorte le réceptacle de toutes les impressions de l’extérieur. C’est pourquoi l’Incubat s’observe surtout dans les cloîtres.
L’existence claustrale y prédispose particulièrement. La chasteté, l’abandon physique affaiblissent le corps, la volonté se déprime, la vie devient automatique. L’oisiveté des longues méditations rend les sens plus excitables. Le Succube qui tourmenterait en vain l’ouvrier abruti par une journée de travail, n’a qu’à frôler le moine qui sommeille dans sa cellule pour le troubler profondément, pour mettre en émoi ses passions comprimées.
Ces phénomènes, étant d’ordre astral, avec [p. 50] violente répercussion sur le corps physique, avant d’agir sur les parties génitales, affectent d’abord les organes qui sont le plus en rapport avec le corps astral, les poumons et les viscères de la poitrine. Une angoisse immense étreint l’être qui sent l’approche de l’Incube ou du Succube. La gorge se serre ; un commencement de suffocation se produit, en même temps, toutes les muqueuses sont caressées par des titillements voluptueux. Il semble qu’un amant extraordinairement expert vous enveloppe, vous pénètre, se fond en vous.
La jouissance alors est insensée, la dépense nerveuse terrible. L’imagination s’exalte, la clairvoyance somnambulique arrive. Vous voyez distinctement l’être fantastique et glauque qui vous travaille, qui vous fait grincer les dents dans les spasmes. Puis soudain il s’évanouit. Mais lorsqu’on a supporté une fois cette accointance, l’esprit reste fortement affecté. Les mêmes faits se renouvellent souvent. L’Incube prend pour sa [p. 51] maîtresse une existence de plus en plus vraie. Il se nourrit d’elle et c’est une obsession de tous les instants. La fatigue très grande, la surexcitation nerveuse constante entretiennent l’état somnambulique qui fait que l’on perçoit réellement l’Incube ou la Succube. Les troubles physiologiques ou psychologiques les plus graves peuvent se produire alors : satyriasis, nymphomanie, ou folie. C’est la victoire de Lilith et de Nahemah, les reines des stryges, que les imprudents qui ont voulu rester chastes, qui ont voulu mépriser les vérités éternelles du lingam.
Les théologiens attribuaient ces désordres aux légions infernales conduites par le très lascif Asmodée. Les cabalistes n’y voyaient que l’œuvre des esprits élémentaires. Théologiens avec leurs diables, cabalistes avec leurs élémentals étaient d’accord en principe. En effet, Eliphas Lévi définit ainsi le Diable : « Le Diable, en magie noire, c’est le grand agent magique employé pour le mal par [p. 52] une volonté perverse. L’ancien serpent de la légende n’est autre que l’agent universel, c’est le feu éternel de la vie terrestre, c’est l’âme de la terre et le foyer vivant de l’enfer. » Le Diable c’est donc le grand courant de vie cosmique, la lumière astrale que l’esprit et l’imagination, affectés par elle, habillent suivant leurs dispositions et les influences auxquels ils sont soumis de formes et d’apparences diverses, tantôt bizarres et sinistres, démons, Satan horrifique, tantôt harmonieuses et agréables, gracieux sylphes couleur azur ou très séduisantes ondines, la belle Nicksa au corps d’émeraude très pâle, aux yeux glauques comme la fleur du lin.
Ce sont ces formes qui viennent, Incubes ou Succubes, tourmenter nos rêves, cauchemar atroce ou volupté divine. [p. 53]
III. Comment on arrive à l’Incubat et au
Succubat.
Sous la lumière irisée d’un large vitrail, dans une salle haute aux murs habillés de riches tapisseries, irradiant du miroir magique, une démone se dresse affolante et superbe dans sa nudité pâle. Le sorcier assis dans un vaste fauteuil, devant le grimoire grand ouvert, contemple avec ravissement ce corps voluptueux qui vient s’offrir à son étreinte. Pêle-mêle sur les sièges, sur les tables s’amoncellent des objets tristes, cornues, mortiers, livres maudits. A terre, un chat noir joue avec une tête de mort. Sur une corniche, un hibou songe immobile. Dans les encoignures sombres, des formes démoniaques [p. 54] s’ébauchent. Ainsi une estampe de Félicien Rops, « l’incantation », montre la réalisation des rêves troubles du penseur solitaire, qui, dégoûté des bas détails et des hontes des amours humaines, désire autre chose. Il voudrait une docile amante, aux yeux étranges, aux seins durs, aux hanches larges et mobiles, à la croupe luxurieuse, cependant libérée de toutes les servitudes chamelles, un être enfin qui aurait la spiritualité d’un ange, la science d’un démon, et l’habileté érotique d’une courtisane ancienne.
C’est ainsi que l’on fut amené à chercher les moyens d’arriver à l’Incubat et au Succubat. Etude très hallucinante, soigneusement écartée dans tous les traités démonologiques. Les savants qui s’en occupèrent cachèrent jalousement les résultats de leurs recherches. Il serait cependant très intéressant d’examiner scientifiquement la possibilité de produire des phénomènes de ce genre.
On trouve dans les grimoires des recettes [p. 55] ridicules pour avoir en songe l’illusion de posséder une femme aimée. En voici un exemple, à titre de curiosité : « Prenez deux onces de scammonée et de camomille romaine calcinée, trois onces d’arêtes de morue et d’écailles de tortue, aussi calcinées. Mêlez-le tout avec cinq onces de graine de castor mâle, et ajoutez-y deux onces d’huile de fleurs de scammonée bleue, cueillies le matin dans les premiers jours du printemps; faites bouillir cette composition avec une once de miel et six dragmes de rosée recueillis sur des fleurs de pavot. Vous pouvez ajouter à cet onguent une sixième partie d’opium, et après l’avoir versé dans une bouteille de verre qu’il faudra sceller hermétiquement, vous le laisserez exposé au soleil pendant soixante-douze jours. Au bout de ce temps, vous serrerez la bouteille dans un caveau frais et vous l’y laisserez tout l’hiver, enterrée dans du sable très fin. Au printemps suivant, vous casserez la bouteille pour en retirer l’onguent, que vous [p. 56] transvaserez dans un pot de grès neuf et qui n’ait jamais servi. L’usage de cette composition consiste en frictions faites, avant le sommeil, sur le creux de l’estomac, sur le nombril et sur la nuque du cou (7) ». Pour se délivrer de ces rêves érotiques qui affaiblissent le tempérament, il faut s’appliquer sur l’estomac une lame de plomb taillée en forme de croix (8).
Cette cuisine longue et compliquée doit avoir une efficacité assez douteuse. Mais pour un individu atteint d’une hyperesthésie sexuelle, il est des procédés qui permettent d’obtenir facilement l’hallucination lubrique qui constitue le plus fréquemment l’Incubat. Par l’emploi combiné d’excitants, d’aphrodisiaques et de l’autosuggestion ou de la suggestion ordinaire, on peut arriver à l’illusion complète de la possession de la personne convoitée, qu’elle soit morte ou vivante. [p. 57]
La suggestion peut suffire à créer la larve Incube ou Succube. Mais l’extériorisation du corps astral joue un très grand rôle dans la naissance de la forme lascive. Peu de personnes sont douées naturellement de la faculté de s’extérioriser. Cette faculté peut être acquise artificiellement par un entraînement spécial. Des substances ayant un effet psychique très violent, opium, haschish, cocaïne peuvent y aider beaucoup. Il faut évidemment une certaine habitude pour doser les pharmaques suivant le tempérament. L’onguent des sorcières avait un effet analogue ; il était composé de gras de cadavre, d’extraits de stramoine, de belladone, de jusquiame et de la mandragore arrachée sous un gibet ou dans un cimetière par la dent d’un chien (9). Rarement l’extériorisation est assez parfaite pour permettre au fantôme astral d’aller violer l’être dont on veut jouir. Le plus souvent, on arrive à une hallucination plus ou moins forte, dont il [p. 58] faut diriger l’action dans le sens érotique par des aphrodisiaques qui produisent l’hyperesthésie et l’excitation sexuelles nécessaires pour arriver à l’orgasme vénérien. On peut donner à l’Incube une ressemblance quelconque, si l’on a une idée préconçue précise. La photographie de l’être désiré, un objet lui ayant appartenu et imprégné de lui, les parfums qu’il emploie peuvent aider puissamment à l’individualisation du fantôme.
Le docteur J. Regnault, dans son érudit traité sur la sorcellerie, indique la méthode suivante employée par certains magiciens : « Ils essaient de se mettre en relation avec l’être aimé au moyen d’un objet qui lui ait appartenu, au moyen d’un morceau de vêtement qu’il ait beaucoup porté, ou encore au moyen d’une lettre, d’une mèche de cheveux ou d’une photographie. Ils opèrent habituellement à une heure telle qu’ils soient à peu près certains que la personne qu’ils veulent violer est chez elle couchée. Ils ferment les yeux, ils se [p. 59] voient en imagination parcourant la route qui conduit chez la personne qu’ils désirent, ils se voient hors d’eux-mêmes, « extériorisés », pénétrer chez cette personne, ils « poussent » vers elle leur propre fantôme qu’ils croient voir hors d’eux-mêmes. Ils perdent souvent toute notion du temps et semblent tomber en hypnose. Puis tout d’un coup, ils reçoivent la récompense de leurs lubriques efforts : l’orgasme vénérien fait vibrer tout leur être. Ils reprennent presque aussitôt connaissance, ne gardant qu’un vague souvenir de ce qui s’est passé. » Dans ce procédé, le résultat est obtenu par l’auto-suggestion appuyée par le magnétisme d’objets en rapport avec l’être aimé, cheveux, photographie. Peut-être aussi, à la longue et dans certains cas rares, le corps astral du magicien s’extériorise-t-il.
En ces derniers temps, quelques littérateurs décrivirent des scènes d’Incubat et de Succubat volontaires de différentes catégories. Dans la Victoire du mari, de M. Joséphin Péladan, un vieil occultiste, [p. 60] Sextenthal, aime une jeune femme, Izel. Il s’extériorise et sa forme fluidique va violer sa bien-aimée. Madame Chantelouve, la perverse héroïne de Là-bas, de M. J.-K. Huysmans, possède en songe les personnes dont elle a envie. Le même auteur montre, dans En route, Durtal pollué par les larves durant sa première nuit de cloître. La deux fois morte, de M. J. Lermina est l’histoire d’un homme doué de grandes facultés psychiques, qui adore sa femme morte. Toutes les nuits il se met dans un état d’hypnose profond ; de sa poitrine s’échappe un filet de vapeur légère qui, grâce à des effluves d’éther, se matérialise au point de former un fantôme identique à la disparue et dont on sent le cœur battre.
Il est encore un moyen d’arriver à l’Incubat, moyen difficile et dangereux : les adeptes qui savent manier les forces astrales peuvent risquer l’évocation rituelle des Esprits élémentaires. Peut-être trouveront-ils parmi les forces qui apparaîtront [p. 61] dociles, animées par les incantations, l’être rêvé, amant ou amante, avec lequel ils pourront goûter à la volupté des spasmes étranges. Ils devront méditer la sentence d’Eliphas Lévi, qui dit que quiconque aime une femme élémentaire, sylphide ou gnomide, meurt ou s’immortalise avec elle.
Il ne faut pas oublier que des essais de ce genre sont extrêmement périlleux. L’imprudent s’expose à de terribles maladies sexuelles, le priapisme, le satyriasis ou la nymphomanie ; mais l’intelligence surtout risque fort de sombrer sous les assauts érotiques des larves. La folie est là qui guette ceux qui s’aventurent dans le royaume enchanté du rêve et de l’illusion. Il en est des Incubes et des Succubes comme des Sirènes dont parle Jacques Pontamy dans ses Gaudries et Pasquaïes du pays Namurois : « Ne les peuvent ouyr et vésir sans dangier , et faire avec elles beaux devis que les gens très doctes et bons physicians, aussi les ménestrels et les tailleurs de belles imaiges, et ceux qui [p. 62] ont rapport avec Génies fadesques et herméteux. Ne les peuvent en rien comprendre les soudards, tabellions, chats fourrés et aultres de même séquelle. Ne plus ceux qui ne sont pas grands clercs en leurs mestiers, et n’ont point belles cervelles en leurs chiefs. »
NOTES
(1) Tous les documents qui vont suivre sur l’ouvrage de M. des Mousseaux et sur le Carmel de Vintras sont extraits du Temple de Satan, le plus beau travail qui existe sur la Magie Noire.
(2) De la Démonialité — et les animaux Incubes et Succubes, etc. par L. Marie Sinistrari d’Ameno, manuscrit découvert, traduit et édité par M. Isidore Lisieux.
(3) La Mystique divine, naturelle et diabolique, par Goerres, traduction de Ch. Sainte-Foi, Paris Poussielgue, 1862, 5 vol. in-8 ; Tome III, ch. XVI. ; Tome V, ch. XXXII.
(4) Dr Von Krafft-Ebing, psychopathia sexualis, trad. Laurent et Csapo page 9, note 1.
(5) Dr Von Krafft-Ebing, op. cit., page 9, note 1.
(6) Dr Von Krafft-Ebing, op. cit., page 42.
(7) Christian. Histoire de la Magie.
(8) Christian Op. cit.
TABLES
I — Les Légendes et les Faits
II — les Doctrines
III. — Comment on arrive à l’Incubât et au Succubat
OUVRAGES CONSULTES
Bible : Genèse ; Deutéronome ; Lévitique.
Barthélémy de Spina : De strigibus, in 8 Francfort, 1582
Bodin : De la démonomanie des sorciers, in 4, Paris, 1581
Bois Jules : Le satanisme et la magie, in 8, Paris 1895
Christian : Histoire de la magie, Paris
Delrio : Disquisitiones magicae, in 4, Lovanii ex off. Rivi, 1599
Godelman Jean-Georg : Tractatus de magis venificiis et lamiis, in 4, Francfort, 1601
Goerres : La mystique divine naturelle et diabolique, traduction Ch. sainte-foy, Paris, Poussielgue, 1862
Guaita Stanislas de : Le temple de Satan, in 8, Paris 1891
J-K Huysmans : Là-bas, Paris 1890 ; En route, Paris, 1895
Institor Henricus : Malleus maleficarum, in 8, francfort, 1582
Krafft-Ebing Dr Von : Psychopatia sexualis, traduction Emile Laurent et Sigismond Csapo, Paris, 1895
Lancre de : Tableau de l’inconstance des démons, in 4, Paris, Buon, 1612
Lermina Jules : La deux fois morte, Paris 1895
Levi Eliphas : Dogme et rituel de la haute magie.
Malleolus Felix : Tractatus de credulitate doemonibus adbibenda, Francfort 1582
Migne abbe : Dictionnaire des sciences occultes.
Molitor Ulricus : De lamiis et pythonicis mulieribus, Francfort, 1582
Nider : Liber formicarius, francfort, 1582
Peladan : La victoire du mari
Regnault (Dr J.) : La sorcellerie, Paris, 1897
Sinistrari d’Ameno L. M. : De la démonialité, Paris, Lizeux, 1876
Sprenger : Malleus maleficarum, francfort, 1582
Wier Jean : De praestigis daemonum et incantationibus, in 4, Bâle, 1577
Je suis surpris de voir une de mes images récupérée je ne sais où et sans même en avoir demandé l’autorisation pour illustrer votre article (histoire de la folie). Comme je suis également surpris de me voir d’après vous être né en 1955 (je suis actuellement âgé de 45 ans). 🙂
Pour vérifier mes dire, je vous invite à visiter mon site (www.pierre-cambon.fr) : vous y auriez trouvé mon mail, mes coordonnées !
En attendant votre réponse,
Bien à vous
pierre cambon
Bonjour Monsieur Cambon. je vous remercie pour vos remarques. J’ai trouvé votre splendide image sur Internet, sans mention d’indication de Copyright. C’est pourquoi j’ai utilisé votre image dans deux des articles en ligne sur mon site. Bien sûr je me plierais à vos exigences, dans la mesure du possible, afin de maintenir cette image. Mon ami René Gerbeau, que vous connaissez, je crois, pro vous testez de ma bonne foi. Dans l’attente, je vous assure de mes plus cordiales salutations. Michel Collée.
Bonjour suite. Mon fournisseur de site, ProfilWeb, vient de me joindre au téléphone suite à votre. Au regard de cette situation je supprime vos images et vous prie de m’en excuser. Cordialement. Michel Collée.
Merci beaucoup