Magnétisme et somnambulisme. Par l’abbé Joly. 1848.

Nous savons peu de choses sur l’abbé Joly, sinon qu’il fut magnétiseur à Rouen (70 boulevard Beauvoisin) dans les années 1850. Nous avons choisi une publication, que nous n’avons trouvée nulle part répertoriée. comportant de remarquables remarque sur les états somnambuliques, qui deviendront l’hypnotisme. Cette plaquette manque à la B. n. F. et est inconnu à Albert L. Caillet, Manuel bibliographique des sciences psychiques ou occultes. Paris, 1912. Nous connaissons deux autres publications répertoriées que nous mettrons en ligne prochainement :
L’an 1849. Succès nouveau d’une grande importance, et inoui de nos jours, obtenu par le magnétisme vital. Paris, Chez tous les Libraires, s. d. [1849]. 1 vol. 16 p.
Lettre de l’abbé Joly, ancien curé de Selles et du Bec, à tous les malades, sur le magnétisme. Pont-Audemer, Chez l’auteur, s. d. [1854]. 1 vol. 13.2/21 [in-8°], 15 p.

Les chiffres entre crochets font références à la pagination originale.

 

 

RESULTATS

DE L’ABBE JOLY

Ancien Curé de Selles et de Bec

Sur

Le Magnétisme

Et le

Somnambulisme.

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15 Septembre 1848,

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Le magnétisme est aujourd’hui trop répandu pour qu’il puisse être oublié désormais.

Cependant il est encore trop dédaigné d’un grand nombre d’hommes, dans toutes les classes de la société, pour espérer que de longtemps, on en fasse généralement un objet d’étude et d’expériences sérieuses.

Mais quand les faits sont constants, il faut, en définitive, céder à l’évidence ; le passé répond, toujours de l’avenir.

Les plus grandes vérités, comme les plus précieuses découvertes, n’ont été adoptées et reconnues qu’après bien des luttes et des combats.

J’offre aux hommes de bonne volonté le résultat de mes dernières expériences.

[p. 2] Il y a deux manières bien distinctes de magnétiser, naturellement et spirituellement.

Magnétiser naturellement, c’est tout simplement suivre la voie des actions (les passes magnétiques).

Celui qui magnétise de cette manière ressemble à une bonne et tendre mère qui réchauffe dans son sein son enfant malade ; il se dévoue, il ne veut que secourir, il met sa vie à la disposition de l’organisation malade dont il veut calmer les douleurs,

Cette manière de magnétiser affaiblit, il est vrai, et fatigue considérablement celui qui magnétise, mais elle est à la portée de tout le monde (voir mes lettres précédentes), et je fais des vœux pour qu’il se trouve dans chaque famille un ami, un partisan de ce genre de magnétisme.

Les guérisons qu’il opère sont lentes, mais très-fréquentes.

Pères et mères, croyez à mes expériences, à la sincérité de mes sentiments, à la vérité de mes paroles, essayez par vous-mêmes dans votre intérieur ! est-il un plus noble, un plus louable dévoûment [sic] ? est-il un plus sublime moyen de charité ? est-il un plus sûr gage d’amitié ? C’est imiter, autant qu’on le peut, le prophète Elie, qui s’agite pour ranimer de sa propre vie le corps inanimé de l’enfant de la veuve de Sareptha.

J’ai guéri bon nombre de malades par le magnétisme naturel ; entre autres, plusieurs épileptiques ; plusieurs autres sont en voie parfaite de guérison, et seront hors de traitement à la Toussaint. Je puis, aujourd’hui, garantir la guérison de celte désolante maladie en quatre mois de traitement; on ne paie qu’après la guérison assurée.

J’ai guéri, par le même genre de magnétisme, madame Hardy, dite madame Marthe, affectée d’une maladie réputée généralement incurable, et confiée à mes soins par son mari désolé, et sans espérances : je l’ai relevée jusqu’à six fois par jour, étendue dans mon salon du Bac ; elle est devenue [p. 3] depuis, par le magnétisme spirituel, un des plus merveilleux phénomènes de clairvoyance des temps modernes …

Magnétiser spirituellement, c’est suivre, avec ou sans passes magnétiques, la voie des pensées ou la voie de la prière.

Celui qui magnétise spirituellement se propose le plus souvent de transporter la personne qu’il magnétise dans un nouveau mode d’existence.

De là, le magnétisme spirituel produit plus facilement le somnambulisme que le magnétisme nturel.

Pour obtenir des succès dans ce genre de magnétisme, il faut posséder une tête singulièrement organisée, et une volonté incapable de la moindre distraction (circonstance, comme on voit, excessivement rare, et qui ne peut convenir qu’à un très-petit nombre d’hommes privilégiés).

Il faut, en outre, que la foi du malade soit entière et complète ; autrement, tentative inutile. (Celle foi entière et complète n’est pas nécessaire dans le magnétisme naturel.)

Les guérisons que le magnétisme spirituel opère sont promptes, et semblent tenir du miracle.

Cependant elles ne sont point miraculeuses : elles appartiennent à la puissance de l’homme, à cette puissance inhérente à la nature humaine, dès la création, et dont on ignore encore les limites. Les vrais miracles ont leurs caractères distinctifs ; il est facile de distinguer l’œuvre de Dieu d’avec l’œuvre de l’homme. L’œuvre de l’homme est toujours incomplète, et présente toujours quelque imperfection.

Je crois qu’un prince allemand, célèbre par quelques cures, surprenantes, guérit par ce genre de magnétisme ; en effet, en Allemagne, tous les amateurs du merveilleux sont partisans du magnétisme spirituel.

J’ai fait moi-même plusieurs fois, et avec un égal succès, sur plusieurs malades, l’expérience de ce genre de magnétisme

[p. 4] J’ai souvent souligné et je soulage souvent certaines douleurs accidentelles par la simple application ou imposition de la main.

Deux fois j’ai fait tomber la flamme très-élevée de deux incendies, comme on éteint de son pouce la flamme d’une bougie.

Et cependant je n’ai encore commencé aucun de mes travaux projetés. Madame Marthe absorbait tout mon temps et toutes mes pensées ; j’avais besoin d’une boussole sûre avant de me jeter sur un nouvel océan, avant d’aborder un monde Inconnu.

Mais en tout cela il n’y a rien de miraculeux ; ce ne sont point des œuvres de Dieu proprement dites, mais des œuvres de l’homme, faites avec cette force de volonté qui triomphe des plus grands obstacles.

Possunt qui posse videntur.

La prévention et l’envie diront peut-être que c’est par la puissance du démon, comme les pharisiens à Jésus-Christ, l’Homme-Dieu, notre divin sauveur ; mais pourquoi pas aussi-bien et mieux par la puissance des anges, ces intelligences bienfaisantes, ces êtres amis et compagnons de l’homme ? Répondez à cette question, hommes hypocrites et méchants ! C’est votre langue qui est diabolique, c’est votre envie qui est l’œuvre du démon.

L’homme, en sortant des mains de Dieu, était parfait ; la vérité s’offrait à lui d’elle-même ; il était puissant en tout, sans travail comme sans fatigue, image vivante de Dieu sur la terre. Depuis sa révolte contre son créateur, il à la même puissance, mais l’exercice en est laborieux et pénible ; ses prérogatives, ses facultés ont été obscurcies par son péché et en punition de son péché, mais elles n’ont point été détruite, anéanties. Le soleil est-il anéanti par le nuage qui le couvre ? Or, de même que le vent dissipe le nuage qui voile 1a beauté du soleil, obscurcit la vivacité de sa lumière et [p. 5] affaiblit la puissance de action, ainsi l’homme, par l’étude, par le travail (tu mangeras ton pain à la sueur de ton front), parvient peu à peu à soulever le voile, à dissiper une partie du nuage de son intelligence, et à la lumière de son esprit redevenue plus vive, plus puissante et plus féconde en merveilles.

Le magnétisme spirituel peut encore devenir la base de toutes les révélations, de toues les inspirations et de toutes les communications avec les esprits. Quelques saints, quelques personnages célèbres on eu de fréquentes apparitions ; le magnétisme peut en devenir quelquefois l’occasion.

En effet, il peut arriver qu’en magnétisant avec une nouvelle énergie de volonté une somnambule, pendant qu’elle est en somnambulisme, on l’endorme de nouveau, c’est-à-dire qu’on la fasse passer à un second somnambulisme ; bien plus, il peut encore arriver qu’en continuant l’action, on l’endorme une troisième fois, c’est-à-dire qu’elle passe à un troisième somnambulisme. comme un homme qui passe d’un sommeil léger à un sommeil plus profond, puis à un sommeil encore plus profond.

Trois états différents.

Le premier (le somnambulisme simple) est le moins rare. La lucidité y est faible, incertaine, douteuse. Le second état est plus rare que le premier ; il a des extases, et la lucidité y est plus lumineuse, moins vacillante et plus sûre ; le troisième état est excessivement rare, et, pour y arriver, on court de grands dangers, état aussi merveilleux que ces astres lumineux qui ne paraissent que par intervalle ; état suprême où les facultés intellectuelles de la somnambule sont portées à leur plus haut point d’élévation possible. Sa lucidité y devient excessive ; elle est comme dans des flots de lumière ; son âme est, en quelque sorte, dégagée du corps, qui n’est plus pour elle qu’un étranger ; elle est plus rapprochée des êtres spirituels qu’elle voit, qu’elle entend et entretient.

[p. 6] Ce phénomène, dont les gradations sont si pleines de périls, est causé, sans doute, par l’abondance de la vie spiritualisée, qui produit de nouvelles gradations dans l’affectibilité de la somnambule : la puissance de l’action s’accroît à mesure que la vie spiritualisée s’élève…

Il n’est pas possible, je crois, d’aller plus loin : au-delà, ce serait peut-être la mort subite de la somnambule, comme chez tout autre individu une action surexcitée de l’esprit pourrait occasionner une apoplexie,

Madame Hardy, dite madame Marthe, extatique à trois extases par jour, avec ou sans passes magnétiques, et parvenue insensiblement, et avec les plus délicates précautions de ma part, à ce suprême degré d’élévation depuis son dernier accouchement, peut, pendant l’espace de temps que dure son exaltation, répondre avec exactitude, après quelques minutes d’attention en elle-même, à toutes les questions possibles, donner les renseignements les plus certains sur toutes les choses passées ou actuellement existantes, et même sur toutes les choses futures, aussi loin que peuvent aller les prévisions humaines, car les prévisions somnambuliques ne sont pas toujours des inspirations, mais plutôt d’ingénieuses et heureuses combinaisons ; donner les indications les plus vraies et les plus surprenantes sur toutes les choses les plus cachées et les plus secrètes, sur les objets les plus éloignés comme les plus proches, sur les succès ou insuccès de toute entreprise…, sur toutes les maladies, leurs divers accidents, leur siège…, sur tous les remèdes et leurs conséquences…, sur les sources à découvrir…, sur les métaux ou trésors en- fouis ou cachés… Il n’est rien sur quoi on ne puisse mettre sa pénétration à l’épreuve.

Mais, chose aussi remarquable et aussi surprenante, pour rentrer dans la vie commune, il faut que cette nouvelle clairvoyante passe et revienne par les mêmes gradations descendantes ; ramenée du troisième état au second, elle ignore au [p. 7] second état ce qui s’est passé au troisième ; ramenée du deuxième état au premier, c’est-à-dire au somnambulisme simple, elle n’a aucune connaissance de ce qu’elle a dit ou fait dans les deux états supérieurs ; enfin, ramenée à l’état de veille, rappelée, si je puis m’exprimer ainsi, à la vie, elle ne conserve aucune trace, aucun souvenir, aucune réminiscence des trois états où elle a passé et repassé successivement. On dirait d’un esprit redescendu des régions éthérées sur la terre,

Madame Marthe, dans ses extases, s’entretient souvent avec son ange gardien, quelquefois avec Jésus-Christ, mais le plus souvent avec la sainte Vierge, pour laquelle elle a toujours eu, dès son enfance, une piété affectueuse.

A certains jours, sa prière à Marie devient si vive, sa parole si animée, qu’elle semble ne plus prier, mais commander.

Pourquoi donc tant d’hommes religieux se font-ils du magnétisme un sujet d’épouvante ? N’y a-t-il pas là, au contraire, un sujet bien digne de méditation et de reconnaissance de la part de l’homme envers son créateur, qui, pour mieux lui faire comprendre sa grandeur, sa dignité, sa puissance et ses sublimes espérances, permet que la nature elle-même, toujours d’accord avec la religion, lui dévoile, par intervalle, quelques-uns de ces grands mystères, quelques-uns de ces secrets admirables dont il lui réserve l’intuition parfaite pour les jours sans éclipse et sans nuages ?

L’Abbé JOLY.

P. S. Lorsque madame Marthe n’était arrivée qu’au premier et au second état somnambulique, elle éprouvait, dans toutes les consultations des malades, toutes leurs douleurs et tous les divers accidents de leurs maladies. Elle avait besoin de toucher le malade, ou au moins un objet quelconque du malade. Chaque consultation de malade était pour elle une sorte de martyre, et pour moi un déchirement de cœur. Arrivée [p. 8] aujourd’hui au suprême degré d’élévation, elle n’éprouve plus aucune douleur dans aucune consultation, elle n’a plus besoin de toucher le malade ni aucun intermédiaire ; il suffit dans toutes consultations de lui indiquer les noms et prénoms pour laquelle on veut la consulter ; ceci posé rien n’échappe à sa clairvoyance.

La nouvelle clairvoyante ne répond qu’aux questions graves, sérieuses, importantes et utiles ; cet état est trop élevé, trop sublime, pour s’arrêter à des futilités.

Nota. — Pendant ses extases, madame Marthe est entièrement isolée, toute communication extérieure est interrompue ; l’insensibilité devient telle, qu’on pourrait tirer le canon à ses oreilles sans lui faire éprouver la moindre sensation, enfoncer des clous dans les chairs, faire l’amputation d’un membre sans lui causer la moindre douleur ; mais, chose encore plus étonnante, toute communication interrompue avec moi-même se rétablit aussitôt avec moi, et avec moi seulement, si je touche la médaille de la sainte Vierge qu’elle porte au côté. Ce fait, inouï peut-être jusqu’à ce jour, mérite l’attention de la haute science. 

LIEUX DES SÉANCES.

A Rouen

Tous les jours exceptés les Dimanches et Lundis.

A Pont-Audemer

Route de Lisieux, 9, tous les Dimanches et Lundis.

Rouen. Imp. de A. Surville, rue des Bons-Enfants, 46-48.

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