Laupts. Le fonctionnement cérébral pendant le rêve et pendant le sommeil hypnotique. (Annales médico- psychologiques), (Paris), nov.-déc. 1895, pp. 354-375.

Laupts. Le fonctionnement cérébral pendant le rêve et pendant le sommeil hypnotique. (Annales médico- psychologiques), (Paris), nov.-déc. 1895, pp. 354-375.

 

Laupts [pseudonye de Georges Saint-Paul] (1870-1937). Médecin militaire. Auteur dramatique, poète et essayiste sous les pseudonymes G. Espé de Metz et Dr Laupts. Quelques publication :
—  Perversion et perversions sexuelles.  Paris, G. Carré , 1896. 1 vol.
— (sous le pseudonyme de Laupts). L’homosexualité et les types homosexuels. Nouvelle édition de perversion et perversité sexuelles. Préface d’Emile Zola. Paris, Vigot Frères, 1910. 1 vol. in-8°.
— Essais sur le langage intérieur. Paris, A. Storck et G. Masson, 1892. 1 vol. Dans la « Bibliothèque de psychologie normale et pathologique ».
— Le langage intérieur et les paraphasies. La fonction andophasique. Paris, Félix Alcan, 1904. 1 vol. in-8°. Broché. Dans la « Bibliothèque de Philosophie Contemporaine ».
— Thèmes psychologiques. **. Introduction à l’étude de la Cérébrologie. Paris et Strasbourg, Vigot frères et les Editions Universitaires de Strasborg, 1928. 1 vol.
— (sous le pseudonyme de Espe de Metz). Thèmes psychologiques. ***. Utilisons les Assassins. Utilisons les condamnés. Un krach médical au prétoire. Le royaume du médecin. Communisme, expropriation et… justice. Paris, Vigot Frères, 1926. 1 vol.

L’image du portrait de l’auteur a été rajoutée par nos soins. – Nouvelle transcription de l’article original établie sur un exemplaire de collection personnelle sous © histoiredelafolie.fr

[p. 354]

LE
FONCTIONNEMENT CÉRÉBRAL
PENDANT LE RÊVE
ET PENDANT LE SOMMEIL HYPNOTIQUE

Par le Dr Laupts.

Les quelques réflexions que je veux présenter au public n’ont point la prétention de fournir à la science des conceptions inédites sur lesquelles il soit loisible d’édifier des théories nouvelles. Je veux simplement indiquer la ressemblance que je crois exister entre les modes de fonctionnement du cerveau au cours du rêve et au cours du sommeil hypnotique, et insister sur la valeur du rêve comme indicateur du mécanisme cérébral, sur la possibilité qu’il me semble devoir offrir d’en délimiter certaines fonctions.

Car, en somme, qu’est le rêve ? —le fonctionnement individuel, intempestif, peut-on dire, d’un ou de plusieurs centres, alors que les autres reposent. Or, du fonctionnement individuel d’un centre, résulte l’existence, l’individualisation de ce centre. Et le rêve a ceci d’avantageux qu’il occupe pour un temps, tout le champ de l’autopsychologie d’un individu, alors que, durant la. veille, de multiples influences émanant de tous les centres, sans cesse sollicités, simultanément réceptifs ou [p. 355] actifs, contribuent à obscurcir ce champ, à le rendre inintelligible.

Les inconvénients qu’il présente, reconnaissons-les tout de suite, ils sont ceux de tous les procédés d ‘introspection, avec, en plus, le flou et le vague, au réveil, la fugacité des impressions qu’il a déterminées,

Cependant, malgré ces défauts, il peut —noté tout de suite au sortir du sommeil, chez un observateur qui rêve souvent et dont les rêves ont un certain degré de netteté et de précision —donner lieu à un grand nombre de remarques dont l’intérêt deviendrait certainement considérable, si les conclusions pouvaient embrasser les résultats dus non pas à un seul, mais à toute une série de sujets.

Il faut cependant savoir que la valeur des observateurs est très variable, même en les supposant d’égale capacité intellectuelle, car les uns rêvent beaucoup et d’autres très peu ; les uns se souviennent de leurs rêves, les autres les oublient totalement ; beaucoup doivent les déformer. Sur deux cents personnes interrogées à ce sujet, cent quatre-vingts environ ont répondu qu’elles rêvaient plus on moins fréquemment, une vingtaine que cela ne leur était jamais arrivé : il faut se défier de cette déclaration ; il est probable qu’il y a chez ces dernières perte absolue du souvenir de ce phénomène.

Par contre, quelques sujets, généralement très nerveux, disent ne pouvoir dormir sans rêver. « Mon sommeil, écrit l’un d’eux, est une antre vie, presque aussi riche en sensations diverses que la véritable. » C’est à quelques personnes de cette catégorie que sont dues les différentes conclusions que je vais exposer, en passant rapidement sur quelques points très étudiés et très connus tels que :

La perte de la notion du temps au cours du rêve, la. rapidité énorme avec laquelle, à l’insu du dormeur, se [p. 356] succèdent les différentes impressions (j’ai noté un rêve assez long entre le premier et le dernier coup de 5 heures, battus par la sonnerie d’une cloche voisine) ;

La fugacité, la disparition, l’oubli des rêves : généralement on se souvient d’autant mieux que l’on est moins éloigné de l’instant du l’éveil. Si, à ce moment, le rêve parvient à être ressaisi et à être fixé dans la mémoire, on le retrouvera ultérieurement avec une certaine facilité. Il n’en est pas toujours ainsi, il arrive qu’au réveil, on sait que l’on a rêvé et l’on ne peut préciser l’objet du rêve ; plus on cherche, moins on trouve, et parfois spontanément, quelques heures après, ou même aux approches d’un nouveau sommeil, le souvenir perdu reparaît.

Ce sont là de très banales observations. Infiniment plus intéressantes et plus instructives paraissent les conclusions à tirer des différences de nature, qu’il semble logique d’admettre entre les diverses impressions qui traversent notre sommeil.

Les unes en effet sont, et sont exclusivement, des réveils d’images ; à d’autres s’adjoignent des réveils d’actes sentimentaux ou instinctifs ; il en est enfin qui constituent un état spécial n’apparaissant que dans des conditions données, avec des caractères particuliers que nous verrous tout à l’heure,

Décrivons d’abord et rapidement :

  1. Les rêves d’images;
  2. Les rêves d’images et de sentiments.
  3. Les rêves d’images.

Les images provoquées au cours du sommeil par le réveil individuel d’un centre appartiennent naturellement à autant de catégories différentes qu’il y a de centres différents. Or, il existe des centres : —de mémoire visuelle, —de mémoire auditive, — de mémoire motrice, — de mémoire visuelle verbale, — de mémoire auditive verbale,  —de mémoire motrice d’articulation, etc.

Mais il faut savoirque le rêve est rarement simple, je veux dire que la plupart du temps, un centre ne fonctionne point sans influencer son voisin et que les rêves mixtes d’images sont en majorité. Cependant on peut en trouver à l’état de pureté. Je vais rapidement passer en revue les différents types que l’on rencontre en donnant pour chacun d’eux un exemple choisi dans un grand nombre de rêves notés an réveil (au milieu de la nuit parfois) par un sujet qui ne dort presque jamais sans rêver.

Rêve visuel. —Assez rare à l’état pur, c’est-à-dire non mélangé d’images verbales on auditives. C’est souvent dans ce cas un rêve d’extase ; exemple : rêve fait quelques heures après ingestion de café très fort : Un soleil éblouissant, mais qui cependant est vu en face ; brusquement, une nuit épaisse, intense, couvrant toute une moitié du tableau ; petit à petit, elle envahit tout le champ du regard, mais en s’éclaircissant ; dans les ténèbres : des rochers, un endroit très sauvage, une voiture glissant sur des rails entre deux rangées de statues merveilleuses, dont la première a des yeux vivants et brillant d’un éclat incomparable et insoutenable… (ici le réveil)…

Rêve auditif. —Également peu fréquent à l’état de pureté : bruit de roues, de voitures, de cloches, de wagons en marche, réveil rapide.

Rêve visuel verbal.—Parfois extrêmement curieux, suit généralement les journées marquées par un grand effort cérébral de composition, ou encore de corrections d’épreuves ; tantôt les lettres sont vues manuscrites et tantôt imprimées ; exemple : « … vue d’une page de la préface d’une brochure écrite par le sujet à l’état de [p. 358] veille reconnaissable au format, aux caractères, à une tache ; il cherche à lire et lit avec peine les mots : et cependant, il faut que… (mots qui ne se trouvaient pas dans le texte réel), puis tout se brouille ». D’autres fois, des phrases entières apparaissent ou des épreuves avec des coquilles, souvent des titres en grosses lettres ; parfois des mots sans liens logiques, des phrases construites à peu près convenablement au point de vue grammatical, mais sans signification.

Rêve auditif verbal.—Sans éléments étrangers, il constitue parfois un. phénomène très désagréable, à caractères hallucinatoire. Ce sont des mots chuchotés à l’oreille pendant la nuit ; souvent le prénom du sujet appelé sur un ton inquiet et triste ; le dormeur se réveille alors subitement, doutant s’il a été réellement appelé.

Rêve d’articulation verbale. —Il n’est point rare d’entendre parler un sujet endormi ; mais la plupart du temps, les mots prononcés se rapportent aux autres images et en particulier aux images visuelles qui le hantent ; enfin, le sujet peut « parler mentalement » ; dans ce cas, c’est qu’il fait la conversation avec une personne qu’il voit en rêve,

Les rêves mixtessont de beaucoup les plus fréquents ; toutes les images se suivent et s’enchevêtrent (1) [p. 359] comme clans la vie normale ; cela se conçoit facilement ; la vibration d’un élément amène celle d’éléments d’un autre ordre, appartenant à un autre centre, avec lesquels il se trouve en correspondance continuelle pendant la journée. En voici un qui comporte tous les genres d’images. « Je prends le train ; gare, wagons, bruit de locomotive, coups de sifflet, etc. ; puis soudain me voilà à Lyon, dans une petite rue sale et tortueuse, inconnue ; je suis avec H…. qui prend ce chemin pour ne pas rencontrer, dit-il, des gens élégants sur les boulevards, car nous sommes mal vêtus ; mais tout à coup, me voici dans un trou, j’ai mal aux yeux ; ils coulent abondamment, j’ai une conjonctivite intense ; puis je suis chez moi dans un fauteuil. M…, apparaît disant : « Vous venez de dormir, et vous nous en avez conté de bien bonnes » ; j’entends les pas d’une foule de gens approcher. « Que me veulent-ils ? » Ces mots sont prononcés tout haut et je m’éveille (2).

Pablo Picasso.

Rêves moteurs. —On rêve que l’on marche, que l’on saute, que l’on danse, que l’on monte à cheval. Presque toujours le rêve se termine par un soubresaut : quelquefois le mouvement rêvé est commencé, et il en résulte, si le membre est dans une position qui ne permette point de le faire, un faux mouvement, parfois une contraction douloureuse des muscles (fréquente surtout au niveau du mollet).

Tous les rêves que je viens d’énumérer sont des rêves auxquels le dormeur assiste généralement avec la plus parfaite indifférence, on avec un sentiment très léger de plaisir on d’ennui ; il n’y a dans tout cela qu’un [p. 360] simple réveil, que de simples associations d’images et de mots (3).

Soit que le repos leur pèse et qu’ils soient à nouveau prêts à fonctionner, soit, au contraire, que le surmenage, la fatigue, d’autres facteurs encore aient amené, par un mécanisme inconnu (congestion par exemple), un excès de fonctionnement, qu’ils occasionnent des vibrations supplémentaires, les centres de la mémoire seuls fonctionnent d’une façon très momentanée d’ailleurs et qui ne semble nullement porter préjudice au dormeur, ni le fatiguer. Tout autres sont les rêves de la deuxième catégorie.

II. — RÊVES D’IMAGES ET DE SENTIMENTS.

La plupart des psychologues s’accordent à. placer dans la partie antérieure du cerveau les centres producteurs des phénomènes intellectuels les plus délicats ; an contraire, les régions postérieures, en relations voisines avec les viscères, seraient les centres présidant à ceux des réflexes, qui, se traduisent dans la vie par les actes de sentiment ou d’instinct ; en un mot, il y aurait le cerveau intelligent (cerveau antérieur) et le cerveau réflexe (cerveau postérieur).

Cette donnée, qui est acceptée par la plupart des auteurs, parait tout à fait juste ; elle nous explique la genèse des rêves dans lesquels le dormeur tout entier est secoué, parfois éveillé, par des vibrations dues au réveil, au fonctionnement des centres situés entre les zones frontales d’une part, la périphérie de l’autre. De là, des différences dans l’origine, dans les causes de ces rêves. Ainsi nous constatons : [p. 361]

1° Des rêves apparaissant à la suite de la propagation d’excitations venues de l’organisme ; rêves occipitaux à posteriori, dus au cri de quelque organe blessé ou gêné. (Exemple, ceux des rêves érotiques qu’occasionne un état spécial, réplétion ou déplétion exagérée des vésicules séminales.) Notons que l’excitation ne s’arrête pas dans le cerveau postérieur ; la plupart du temps elle s’étend jusqu’au cerveau antérieur et va provoquer par les chemins tracés pendant la veille, les images visuelles on auditives appropriées (4).

2° Des rêves non plus à posteriori, mais à priori, venant, non plus de vibrations de l’organisme, mais des centres antérieurs (de la mémoire visuelle ou auditive). Au cours d’un rêve, une image évoque toute une autre série d’imagea ; il en résulte une route en zigzag suivant vraisemblablement les tracés les plus faciles, les plus habituels à l’organisme, sans correction possible par le raisonnement. Prenons le même exemple que précédemment. Vienne une image érotique à être éveillée au cours d’un rêve d’images, cette image étant en relation constante à l’état de veille avec le centre instinctif correspondant, ce dernier courra le risque d’être réveillé à son tour, et si son sommeil n’est point profond, mais son excitabilité considérable en ce moment, il y aura des chances pour que les vibrations se traduisent aux nerfs périphériques eux-mêmes/

En un mot, de ces sortes de rêves, les uns proviennent d’uneexcitation périphérique, malaise, chatouillement, piqûre, etc., et ils peuvent amener consécutivement une excitation du cerveau antérieur(image visuelle ou verbale) ; les autres au contraire proviennent d’une excitation du cerveau antérieur (image) et sont, [p. 362] susceptibles d’occasionner ensuite une réaction périphérique (acte, geste, etc.) ; dans les deux cas le cerveau instinctif, que sa position rend intermédiaire entre le cerveau antérieur et l’organisme, est excité. Ajoutons-y une troisième catégorie probable, celle des rêves directement provoqués dans les centres instinctifs eux-mêmes, par une cause mécanique, physique ou pathologique.

Il n’y a point que les rêves érotiques dont l’apparition reconnaisse semblables causes. Tous les sentiments sont susceptibles de faire leur apparition dans le domaine, dans le champ intellectuel du dormeur. Le plus fréquemment observé est le sentiment de la peur. Tantôt (premier mécanisme) provoqué par une digestion pénible, la pesanteur du foie sur les autres viscères d’un sujet dormant sur le côté gauche, il est parfois (deuxième cas) déclenchéen quelque sorte par une image visuelle banale, sans malaise physique concomitant. J’en ai bien des exemples. En voici un : Je me promène à la lisière d’un bois, avec mon chien ; le soleil baisse lentement, soudain, un renard sort du bois ; au lieu de fuir, il vient à la rencontre du chien et se met à causer avec lui, en ce moment terreur épouvantable (occasionnée par la surprise de voir causer un animal) (5) et réveil en sursaut.

Autre exemple : Une ville antique, merveilleuse, vue le soir. —Places, larges voies, statues, etc., mais peu de monde dans les rues ; tout à coup cette réflexion : « Cette ville est Pompéi » ; puis cette autre : « Elle va être engloutie. » Ici terreur affreuse et réveil en sursaut,

J’ai noté parfois un changement complet, une perversion absolue des sentiments normaux des sujets, [p. 363] perversion que je puis expliquer dans l’exemple ci-dessous mentionné par le rappel de souvenirs très anciens se rapportant à une période très différente de la vie, à l’enfance, et conservés dans certains centres à l’insu du cerveau intelligent. Je suis médecin et, comme tel j’ai assisté à bien des opérations, j’en ai fait moi-même, j’ai vu des accidents graves et j’ai toujours conservé le sang-froid nécessaire, je n’ai jamais non plus cherché à me dérober aux charges et aux. responsabilités de mon état ; j’ai cependant rêvé ceci : Un passant à la jambe écrasée par une voiture, le sang coule en abondance, il existe une grande plaie, j’éprouve une peur très vive et je m’enfuis… (Ici le réveil.)

L’orgueil, la jalousie, l’avarice, la haine, la colère, le besoin, le désir de détruire, de tuer ; la charité, la pitié, peuvent être observés pendant le rêve. Il arrive parfois que le rêveur n’a point du tout le même caractère qu’à l’état de veille. Il semble, pour comprendre ce fait, nécessaire d’admettre que si la plupart des rêves se manifestent selon les voies ordinaires du cerveau éveillé, si l’abus d’un centre amène un fonctionnement exagéré et intempestif de ce centre (ainsi le caissier qui, ayant calculé toute la journée, fait encore des additions en rêve), il existe aussi des rêves de compensation, c’ est-à-dire occasionnés par le fonctionnement des centres négligés pendant la veille. Un exemple est fourni par ce fait : les gens qui, en veillant, ont leurs pensées accompagnées d’images visuelles, pauvres, obscures, à contours vagues et indécis, ont souvent en rêve de merveilleuses visions, nettes, précises, superbement, colorées. Rien d’étonnant donc à trouver, par compensation, en rêve, chez un pacifique, des idées de destruction ; chez un brave, un sentiment de peur ; chez un chaste, des visions hideuses et dépravées, (ce dernier phénomène est souvent en relation avec un état physiologique et a été noté, je crois, [p. 364] chez beaucoup de religieux jeunes, soumis à la continence).

Notons aussi que le fonctionnement d’un centre inhibé sons des influences émanant d’autres centres pendant la veille peut, au cours du sommeil, ne plus rencontrer d’obstacles et d’entraves. Tel a peur en rêvant, il aurait peur aussi en veillant, si la volonté, la nécessité d’agir, la crainte de l’opinion, n’arrivaient le plus souvent à dominer ce sentiment.

III. —RÊVES GÉNÉRALISÉS, ETAT INTERMÉDIAIRE.

Quand on rêve que l’on rêve, on est bien près de s’éveiller. Cette vérité, dite il y a longtemps, est de tout point exacte. Mais, dira-t-on, peut-on rêver que l’on rêve ? A cela, je répondrai oui, de la façon la plus formelle. Seulement, en pareil cas, l’excitation, le fonctionnement cérébral n’est généralement plus limité à un ou deux centres, il comprend la quasi-totalité des zones fonctionnant pendant la veil1e.

Jusqu’ici, nous nous sommes occupé, en effet : 1° de rêves d’images non accompagnés de réveils d’actes instinctifs ou de sentiments, rêves de certaines parties antérieures du cerveau, de centres d’importance considérable, mais d’ordre accessoire (centres d’emmagasinement des images) ; 2° de rêves par excitation des centres de réaction instinctive, excitation se produisant soit par propagation du fonctionnement des régions antérieures, c’est-à-dire occasionnée par des rêves visuels, soit à la suite de troubles physiques de l’organisme, provoquant d’abord le réveil du cerveau occipital et s’étendant ensuite le plus souvent à certaines parties du cerveau antérieur, soit enfin par excitation mécanique de la région instinctive même, par un mouvement normal ou non, né en elle. [p. 365]

Indépendamment de ces deux cas, il existe des rêves se rapprochant davantage de la première catégorie, puisqu’ils comprennent des images verbales ou non, plutôt que des réactions franchement instinctives, mais comportant en plus qu’eux des actes intellectuels, infiniment plus complexes que le simple défilé d’images visuelles ou auditives. C’est un état voisin de l’état de veille, qui ne laisse, lui, que peu de place aux manifestations exclusivement instinctives, généralement modifiées ou refrénées.

Voici comment les choses se passent dans le cas observé —je ne cherche point à savoir d’ailleurs s’il s’agit d’une anomalie, tout au moins d’un phénomène rare, ne pouvant se rencontrer que chez des prédisposés, des nerveux,. Ce sont des rêves du deuxième sommeilou du sommeil supplémentaire. Je m’explique.

Lorsque le sommeil se fait d’une traite, qu’il est la réparation attendue d’une fatigue habituelle, il peut être traversé par ceux des rêves que nous avons précédemment décrits. Pour éviter toute confusion, notons que ces rêves déjà décrits comportent parfois certaines opérations intellectuelles relativement compliquées, et qui ne sont que la répétition de ceux que le sujet fait couramment dans la journée. Ainsi, on pourra noter « la faculté d’attention, d’observation, certaines déductions ou inductions toutes faites » (surtout chez les moteurs) (6), etc. Il ne s’agit là que des rêves normaux survenant au cours d’un sommeil normal.

Au contraire, chez certains sujets, nerveux, peu dormeurs, surexcités par le café, l’alcool, etc., en même [p. 366] temps qu’abattus par la fatigue, le sommeil prend parfois tout de suite, et dure, en une seule fois, quatre, cinq, sept ou huit heures. Au bout de ce temps, le dormeur se réveille, et s’il ne se lève point et cherche à se l’endormir, il peut y parvenir, mais partiellement, c’est-à-dire d’un sommeil coupé de réveils brusques et constants ; les périodes d’assoupissement sont parcourues par une foule de rêves d’une intensité considérable, à forme hallucinatoire, et comprenant une série de raisonnements, d’actes intellectuels déjà très compliqués,

C’est une fermentation, une ébullition, une insurrection, pourrait-on dire, de tous les centres aptes à fonctionner, et tendant au réveil, voulant agir, et ne le pouvant pas. Là, se trouve l’extrême limite du rêve. Là, est le moment où l’on rêve que l’on rêve, où l’on comprend que les images que l’on voit sont un simple rêve, qu’elles n’ont point un caractère réel, et il arrive de penser « je rêve, je voudrais être éveillé » ou, lorsque quelque image effraye on étonne, « c’est un rêve, inutile d’y attacher d’importance ».

Les principaux caractères de ce sommeil et de cette sorte de rêves sont :

1° L’accompagnement presque constant d’une sensation de malaise physique se traduisant par le désir d’agir, de remuer, et une hyperesthésie de la chaleur. Le dormeur se retourne dans son lit, se découvre, ne se trouve bien nulle part, parfois éprouve des démangeaisons ; le corps, comme le cerveau, las de reposer, demande à agir;

2° La fréquence des réveils et la possibilité rapide de dormir à nouveau ou, pour mieux dire, de rêver à nouveau. Il suffit, lors des périodes de réveil, de penser à un objet et de fermer les yeux, pour s’endormir tout de suite en rêvant à l’objet en question, et pour en percevoir des images extrêmement vives ; [p. 367]

3° Le caractère hallucinatoire des images (7), et malgré cela, de temps à autre, grâce à des réveils fréquents, la compréhension qu’il s’agit de choses qui n’existent point en réalité ;

4° Souvent un besoin violent d’ouvrir les yeux pour s’assurer de l’irréalité des images, une impossibilité complète d’y arriver, malgré des efforts extraordinaires:

J’ai noté, au cours d’un de ces rêves, cette réflexion : « Il faudrait que je pusse ouvrir les paupières avec les mains », après des efforts violents pour le faire, le réveil est survenu au moment où les mains se portaient aux yeux ;

5° Généralement une impossibilité d’éloigner, de ne pas voir les images qui se présentent, que l’on sait, que l’on sent fausses et dont on voudrait se débarrasser ;

6° Un réveil pénible avec fatigue et lourdeur de tête consécutives ;.

7° Enfin souvent, le souvenir que le temps presse, qu’il est l’heure de se lever. Dans ce cas, le rêve prend la forme appropriée à cette pensée. On rêve que l’on regarde l’heure, que l’on s’habille. Si l’on se l’éveille et qu’il n’est point encore l’heure fixée, puis que l’on se rendorme, le rêve ne tarde pas à se représenter. Cependant, généralement, cette notion de l’heure ne se présente qu’aux confins de l’heure réellement fixée pendant la veille, comme s’il y avait eu emmagasinement de cette notion et numération exacte et inconsciente des heures. [p. 368]

I.

IV. — HYPOTHÈSES. LE CENTRE SUPÉRIEUR.

Il n’est point défendu de faire des hypothèses, Dans la plus incertaine peut résider une part de vérité, nécessaire à l’édification de théories plus proches de la réalité. Que l’on me permette donc d’exposer comment j’imagine les choses se passer.

On appelle état de veille l’état normal de fonctionnement psychogénique des centres cérébraux ; sommeil, l’état normal de cessation de ce fonctionnement.

Ce sommeil peut être incomplet et le rêve nous semble déjà une preuve en faveur de la théorie des localisations, tendant à voir dans le cerveau une agglomération d’organes, plus on moins unis, vibrant avec une plus ou moins complète synergie.

Mais le rêve, nous l’avons vu, peut être constitué par des manifestations de l’activité d’un, de deux, de plusieurs centres cérébraux, et nous avons analysé des états qui comportent non plus des vibrations de telle zone indispensable, mais à rôle secondaire, telle que les zones d’emmagasinement des sensations visuelles, auditives, verbales, etc., mais qui sont des actes d’intelligence émanant de centres beaucoup plus importants au point de vue psychique, puisqu’ils sont constitués et par des raisonnements d’ordre plus ou moins compliqués, et par des phénomènes d’observation, voire même d’auto­observation.

A vrai dire, il ne s’agit jamais que de la réapparition d’actes, de courants élaborés à l’état de veille ; ces actes, ces courants suivent en zjgzag la voie d’effort moindre, c’est-à-dire d’excitabilité plus grande des parties avec lesquelles les cellules vibrant se trouvent en rapport,

Mais, entre la veille et le rêve, si généralisé que soit [p. 369] ce dernier, il y a toujours une différence, ou plutôt des différences,

Le manque de coordination logiquedes divers éléments du rêve. Il y a coordination mécanique, physique, si l’on peut s’exprimer ainsi, c’est-à-dire que l’excitation de telle cellule se transmet à telle autre, en vertu des relations de voisinage ou de communication facile avec cette dernière ; mais il n’y a pas coordination logique on imposée, puisqu’une image amène l’apparition d’une autre, pouvant lui ressembler, il est vrai, par certains caractères, mais non celle à laquelle elle devrait rigoureusement aboutir à l’état normal de veille.

Les fragments de raisonnement logique qui parsèment et traversent le rêve, ne sont que la reproduction d’identiques fragments d’argumentation faite à l’état de veille, mais qui, dans le premier cas, aboutissent par superposition à des absurdités, tandis que, dans le second, ils. sont les parties d’un tout harmonieux et raisonnable.

La passivité absolue dans l’apport des matériaux. En effet, au cours du rêve, les images, les raisonnements défilent d’une façon absolument automatique et modifiable par le dormeur.

Manque de coordination logiqueentre les éléments du rêve, passivité dans leur rapport, telles sont les deux grandes caractéristiques de cet état, tels sont les signes distinctifs qui différencient le champ psychologique du dormeur de celui de l’homme éveillé.

Or, il est possible et même logique d’admettre que ces différences correspondent à des différences de fonctionnement, et que, chez l’homme éveillé, il y a dans le cerveau quelque chose qui fonctionne en plus de ce qui fonctionne dans le cerveau du dormeur.

Ce quelque chose sera donc le ou les centres de coordination intellectuelle supérieure, de fixation des [p. 370] matériaux fournis par les autres régions cérébrales. Comparons les groupes cérébraux à des départements, à des villes d’importance diverse, mais d’un même pays ; il en est —ce centre ou ce groupe de centres d’idéation supérieure —la capitale, à laquelle aboutissent tous les renseignements, de laquelle émanent tous les ordres, toutes les mesures d’intérêt général.

Il est pour les éléments fournis par les autres centres l’applicateur de l’ordre naturel qu’impose à lui l’ordre naturel des phénomènes extérieurs. Il est, si l’on préfère, la machine, la plaque sensible à laquelle les données de l’extérieur aboutissant avec une certaine incidence, sont par lui renvoyées avec une réfraction dont l’indice constitue la caractéristique psychique même de l’espèce humaine ; les unes fixées et élaborées, les autres écartées et repoussées.

De là le repos profond qui lui est nécessaire.

Au contraire les autres, dont le fonctionnement est moins constant, se réveillent aisément au cours de son sommeil.

Ce centre de coordination, de fixation, pourrait s’appeler centre intellectuel supérieur, par abréviation centre supérieur C. S. Il est le noyau, le suprême échelon du cerveau antérieur disposant d’une façon immédiate des autres centres antérieurs, centres indispensables, mais subalternes, appartenant à deux catégories différentes:

1° Des centres réceptifset d’emmagasinement de sensations (mémoire visuelle, auditive, verbale visuelle on auditive) ;

2° Des centres de réactions et d’emmagasinement, de mémoire de réactions (mémoire motrice, mémoire motrice, verbale ou graphique),

Ces centres en relation avec le centre supérieur, le C. S., sont également en relation entre eux ; de là, des opérations intellectuelles d’ordre secondaire, faites et [p. 371] exécutées à son insu ; de là des rêves intellectuels relativement compliqués.

Le centre supérieur se trouve naturellement en relation avec le cerveau occipital, avec la moelle, et par son entremise avec tout l’organisme. Il agit sur la zone motrice du cerveau dont il partage le commandement avec le cerveau occipital, tous deux se renforçant ou se contrariant : la victoire (acte) appartient à celui dont l’influence est prépondérante.

Le fonctionnement du centre supérieur étant synonyme d’état de veille, toute cause abolissant son sommeil, occasionne le réveil, de quelque territoire qu’elle émane ; c’est ce qui arrive lorsque, au cours des rêves, quelle que soit la nature de ces rêves, c’est-à-dire quel que soit le territoire (antérieur on postérieur) au fonctionnement desquels ils soient dus, l’activité des cellules qui les occasionnent amène, par propagation, celle du centre supérieur. Les rêves des cellules présidant aux actes instinctifs (la peur en particulier) par la violente secousse qu’elles infligent à tout le cerveau, par suite à tout l’organisme, déterminent très souvent ce résultat,

Nous arrivons donc à définir : sommeil complet, le repos du cerveau tout entier ; état de veille, l’état de fonctionnement du centre supérieur ; sommeil partiel, l’état de repos du centre supérieur avec fonctionnement de groupes plus ou moins étendus de cellules appartenant à d’autres centres.

Est-ce aller trop loin maintenant que d’assimiler à ce sommeil partiel de l’état normal, sommeil partiel comportant au minimum le repos du centre supérieur, le sommeil dit hypnotique ? Voyons d’abord en quoi ils diffèrent.

Dans le sommeil hypnotique, une coordination plus grande, parfaite parfois, entre tous les phénomènes, [p. 372] entre tons les actes ; mais cette coordination supérieure à celle du rêve, nous pouvons l’attribuer à ce fait que chez l’hypnotisé : tous les centres (sauf le centre supérieur) sont éveillés, et fonctionnent dans leur plénitude, sinon même au delà, car l’inhibition du centre supérieur ne se fait plus sentir, d’où l’intensité du fonctionnement de centres plus libres, livrés à eux-mêmes, alors que chez le dormeur, il n’y a qu’un certain nombre de centres éveillés et n’ayant chacun qu’un fonctionnement partiel, bien des cellules restant on endormies on à moitié endormies,

La facilité du réveil dans le sommeil ordinaire, sa difficulté par un moyen banal à l’état hypnotique, différence explicable par la cessation complète du fonctionnement, le repos absolu, dans ce dernier état, du centre supérieur, sur lequel on a directement agi, d’où pour l’hypnotisé, la possibilité de marcher, de sauter, de courir, tandis que le dormeur s’éveille au moindre bruit ; à noter cependant que chez les sujets prédisposés, le sommeil normal comporte parfois un repos du centre supérieur, comparable à celui de l’hypnotisé ; ainsi le somnambule se lève la nuit, exécute une foule d’actions sans se réveiller.

La suggestibilité plus vive dans l’hypnotisme, reconnaîtra la même cause : la profondeur du sommeil du centre supérieur qui permet de faire vibrer toutes ses mémoires, de provoquer toutes ces réactions ; tandis que chez le dormeur, le moindre cri, le moindre bruit peuvent provoquer un début l’image ou la réaction appropriées, mais ne tardent point à provoquer le réveil.

L’oubli consécutif au réveil de l’hypnotisé ; le retour des souvenirs lors d’un nouveau sommeil hypnotique. C’est le phénomène le plus difficile à expliquer ; notons que très certainement, la plupart des rêves du sommeil normal sont, eux aussi, oubliés au réveil, et que parfois [p. 373] quelques-uns sont partiellement retrouvés lors d’un sommeil ultérieur sous l’influence de circonstances appropriées. Que conclure de ceci ? Peut-être que toute mémoire locale, toute mémoire d’un groupe donné de cellules n’est perçue d’une façon constante et définitive que lorsqu’elle est parvenue à l’élaboration du centre supérieur ; le souvenir d’un acte pouvant rester dans le centre ayant présidé à cet acte et y persister longuement, mais n’être conservé dans le centre supérieur que s’il a été en quelque sorte fixé par ce dernier ; les rêves dont on se souvient seraient ceux-là seuls qui se sont produits lors d’un réveil partiel du centre supérieur (réveil d’un groupe de cellules de ce centre, ou réveil très fugace du centre entier) (8).

La suggestion, la conservation d’un ordre donné au cours du sommeil hypnotique et exécuté inconsciemment ensuite. Dans ce cas, comme dans le précédent, il y a eu dissociation dans le mécanisme cérébral ; un groupe de cellules a agi et continue d’agir pour son propre compte. Le centre supérieur, n’ayant point reçu l’ordre au moment où il a été donné, parce qu’il était alors profondément endormi, n’a pu le conserver, se l’approprier, les cellules des antres centres agissent comme si rien ne s’était passé ; le sommeil du centre supérieur ne s’étendant pas à elles, les seules différences pour elles entre l’état de veille et l’état hypnotique ne proviennent que de la cessation de leurs communications avec le centre supérieur ; elles n’influencent ni leur vie, ni leur activité propre. Des phénomènes assez analogues, mais dus peut-être au mécanisme inverse (fonctionnement et réveil du centre supérieur) se produisent souvent au [p. 374] cours du sommeil normal (on arrive à se réveiller, à l’heure à laquelle on désire se réveiller).

CONCLUSIONS.

Je ne veux point, à propos de vues purement hypo­thétiques, entrer dans de plus longs développements. Pour conclusions aux quelques réflexions que je présente aux lecteurs, je dirai :

Le rêve est occasionné par le fonctionnement partiel du cerveau. Il existe des rêves d’images, des rêves d’actes sentimentaux ou instinctifs issus des premiers, ou occasionnés par un état particulier de l’organisme, les uns paraissant due au réveil partiel du cerveau antérieur, les autres à celui du cerveau postérieur. Ces rêves com­portent des raisonnements, des associations d’idées tout faits, l’évocation des manifestations les plus compliquées du caractère.

Il existe un état voisin du réveil, noté seulement chez des nerveux, que la netteté des images, leur caractère hallucinatoire, la possibilité d’une certaine auto-observation, l’hyperesthésie concomitante peuvent faire considérer comme la limite du rêve, l’état le plus voisin possible de la veille,

Enfin, je considère comme nécessaire à l’état de veille, le fonctionnement d’un centre de coordination intellectuelle supérieure, de fixation et d’élaboration des matériaux fournis par les autres centres. Admettre ce centre conduit aux définitions suivantes:

Sommeil d’un centre.—État de cessation du fonctionnement psychogénique de ce centre.

Sommeil normal complet.—État de cessation de fonctionnement psychogénique du cerveau entier .

Sommeils partiels. Rêves. —État de repos du centre [p. 375] supérieur ; fonctionnement partiel ou total d’autres centres (rêves partiels ou généralisés).

Veille. —État de fonctionnement du centre supérieur (avec, peut-être, sommeil possible d’autres centres ?).

Sommeil Hypnotique.—État de sommeil profond et durable du centre supérieur ; l’état des autres ne différant de l’état normal que par la cessation de leurs communications avec le centre supérieur, d’où une plus grande intensité dans leur fonctionnement.

Ajoutons que, comme tous les autres centres, ce dernier serait sujet à certaines maladies (dans certains genres de démences) ou inhibé à l’état normal, surtout chez des prédisposés ou sous l’influence du fonctionnement exagéré d’autres centres. Ainsi le fonctionnement intensif d’une zone visuelle pourrait produire l’hallucination au cours de laquelle il y aurait inhibition du centre supérieur. Cette inhibition totale ou partielle, longue ou courte, parfois sujette à des alternatives rapides, pourrait se rencontrer lors des rêves généralisés de l’état intermédiaire. (Voir paragraphe 3, page 364.)

Je ne me dissimule point le caractère problématique de quelques-unes des réflexions que je présente aux lecteurs, mais je ne suis point de ceux qui pensent qu’il est interdit de faire des hypothèses, et je crois qu’elles sont bonnes lorsqu’elles sont sincères et qu’elles s’appuient sur un certain nombre de faits minutieusement observés. Je crois aussi qu’étudier le rêve est un moyen d’investigation précieux, qui n’a point encore donné tout ce qu’on en devrait attendre, ni, sans doute, dit son dernier mot.

Notes

(1) Voici un exemple curieux, « Je rêve d’un coq qui dans la rue s’envole devant moi en criant : « Je suis blessé » ; il vole aussi haut que le toit des maisons, puis soudain pousse un second cri plus éclatant encore que le premier : « Malheur à… » Je m’éveille et le cri se termine par le chant réel d’un coq du voisinage. » Dans cet exemple l’image auditive défigurée a néanmoins donné une image visuelle, se rapportant au véritable son, entendu. Il y n donc eu dédoublement de l’image auditive, d’une part en une image auditive exacte, mais passée inaperçue et allant éveiller l’image visu elle appropriée, et d’autre part, en une image auditive déformée, et nettement perçue par le dormeur. Ou bien il faut admettre un premier cri mal perçu, ayant occasionné le rêve, les deux cris suivants altérés peut-être par le rêve lui-même.

(2) Parfois les images se transforment très rapidement ; ainsi tel personnage vu en rêve devient subitement tel autre. Parfois l’absurdité de la scène rêvée est si évidente qu’elle amène le rire et le réveil : ex, Muscadin, mon cheval, croquant des poulets avec satisfaction.

(3) Il faut noter aussi le fonctionnement du centre de la mémoire musicale, les refrains d’airs connus, parfois d’exquises mélodies inconnues qui en résultent, et charment le dormeur.

(4) De même le besoin de miction introduit souvent dans le rêve les images qui lui sont appropriées.

(5) L’auteur de ce rêve ajoute : « J’ai compris à ce moment pourquoi l’Écriture donne comme un signe de profonde horreur « les animaux parleront », ce que je n’avais point compris jus­qu’alors. » Il est probable que c’est l’inconscient souvenir du mot de l’Écriture et du sentiment auquel il fait allusion, qui avait occasionné la peur.

(6) On peut observer également les plus délicates nuances du caractère, amour propre, susceptibilité, etc., etc. On note aussi une recherche de composition littéraire ou musicale ou de solution de problèmes ; il en résulte parfois des associations d’idées des inspirations heureuses, dont, au réveil, on pout tirer parti.

(7) Exemple : On entend des coups frappés distinctement à l’une des portes de l’appartement. On comprend que c’est une hallucination ; l’on peut dans cet état la répéter à souhait, faire vibrer de la même façon et d’un nombre donné de coups toutes les boiseries. C’est-à-dire que l’on s’imagine les entendre, lorsqu’on le désire, que l’on peut noter des différences de hauteur dans le son, tenant au volume, à la résistance, à la hauteur des boiseries évoquées. Je ne sais si ce phénomène est fréquent, je l’ai noté plusieurs fois. Nul doute qu’il ne prédispose certaines personnes au spiritisme.

(8) Ces réveils partiels permettent, de constater des rêves des centres instinctifs comportant des scènes, des tendances, des sentiments depuis longtemps oubliés, et ayant persisté en eux. (Voir page 363.)

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