Henri Gaidoz. Les noms du diable. IV. Le rapporteur. Extrait de la revue « Mélusine, recueil de mythologie, littérature populaire, traditions & usages », (Paris), tome X, 1900-1901, colonne 19-20.

H. G. [Henri Gaidoz]. Les noms du diable. IV. Le rapporteur. Extrait de la revue « Mélusine, recueil de mythologie, littérature populaire, traditions & usages », (Paris), tome X, 1900-1901, colonne 19-20.

Élie Henri Anatole Gaidoz (1842 – 1932). A l’origine professeur de géographie et d’ethnologie, il est devenu celtiste et un folkloriste d’une érudition rare. Il occupa la chaire de philologie celtique à l’EPHE à partir de 1876. Ses contributions tant à l’ethnologie, qu’à la mythologie, qu’au domaine de la linguistique, émaillent son parcours éclectique. Il fur enfin un collaborateur attitré de Paul Sébillot. Il a fondé la Revue celtique en 1871 et la revue Mélusine en 1877.
Quelques publications retenues :
— Esquisse de la religion des gaulois avec un appendice sur le Dieu Encina. Extrait de l’Encyclopédie des Sciences Religieuses, Tome V. Paris, Sandoz et Fischbacher, 1879. 1 vol. in-8°, 24 p.
— (avec Sébillot). Bibliographie des traditions et de la littérature populaire de la Bretagne. Nogent-le-Rotrou, impr. de Daupeley-Gouverneur, 1882.
— (avec Sébillot). La France merveilleuse et légendaire, par H. Gaidoz et Paul Sébillot. Paris, éditions Le Cerf, 1884.
— Mélusine, recueil de mythologie, littérature populaire, traditions et usages. Paris, Viaut puis E. Lechevalier, 1878-1901. 10 volumes.
— De l’étude des traditions populaires ou folk-lore en France et à l’étranger. Extrait des Explorations Pyrénéennes, 3°série, Tome 1, 1906.-Bagnères-de-Bigorre, D. Bérot, 1907. 1 vol. in-8°, 2 ffnch., pp.175-193.

Les [p.] renvoient aux numéros de la pagination originale de l’article. – Nous avons gardé l’orthographe, la syntaxe et la grammaire de l’original., mais avons corrigé plusieurs fautes de composition – Par commodité nous avons renvoyé les notes originales de bas de page en fin d’article. –Les images ont été rajoutées par nos soins. – Nouvelle transcription de l’article original établie sur un exemplaire de collection privée sous © histoiredelafolie.fr

[colonne 19]

LES NOMS DU DIABLE

IV

Le rapporteur.

On lit dans le Bulletin de la Société Archéologique et Historique du Limousin, T. XXXVIII, 1891, p. 458 :

« M. l’abbé Poulbrière… signale particulièrement un passage concernant la curieuse inscription des fonts baptismaux de l’église de Saint-Priest-Ligoure (Haute­Vienne) : Gardes vos du rapportor. Vivo Jesus ! Que signifie ce mot de rapportor ? Plusieurs archéologues très experts n’ont pu donner une solution satisfaisante, de ce petit problème. M. Poulbrière relève, dans un article (Loupiac) du tome IV du Dictionnaire [colonne 20] du Cantal, la mention de la représentation d’un personnage fantastique chargé d’un sac de rats, avec la légende à double sens : rapportor. M. Arbellot pense que le mot rapportor est mis pour accusator, nom sous lequel le démon se trouve désigné dans l’Apocalyse. L’inscription de Saint-Priest signifierait donc simplement : « Gardez-vous du démon. Vive Jésus ! »

Donnons plus de détails sur l’image auvergnate dont il est question dans le Dict. Hist. et Stat, du Cantal, par Deribier du Châtelet (T. IV, p. 41.) II existait autrefois dans les ruines du château de Branzac , commune de Loupiac, une peinture, datée de 1571, qui représentait un personnage portant sur son dos une hotte pleine de rats, avec la légende : gardez-vous bien d’un rapporteur.

Peut-être y-a-t-il dans ce nom de rapporteur une allusion aux gens de justice, toujours détestés, qui faisaient les rapports des procès (voir Littré, s. v. Rapporteur) ; en tous cas, ce nom désigne bien le Diable, si on se rappelle que le Diable écrivait les péchés des hommes sur un gros livre pour les leur rappeler au jugement devant Dieu. Dans cette scène de jugement et avec son registre le Diable jouait bien le rôle d’un « rapporteur ».

Quant aux rats que ce personnage énigmatique emporte dans sa hotte, ils peuvent être regardés comme le symbole des âmes emportées par le démon. Dans une légende du moyen-âge bien connue, l’âme du dormeur sort de sa bouche, pendant son sommeil, sous la forme de souris ou de rat.

H. G.

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