D’Alembert & Diderot. Incube. Extrait de « l’Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers… par Diderot et D’Alembert », (Paris), Tome huit, 1766, pp. 659-660.

D’Alembert & Diderot. Incube. Extrait de « l’Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers… par Diderot et D’Alembert », (Paris), Tome huit, 1766, pp. 659-660.

 

Voir aussi des mêmes auteurs l’article : succube.

Jean le Rond D’Alembert (1717-1783). Mathématicien, physicien, philosophe et encyclopédiste. usqu’en 1759. Il collaborera comme est co-éditeur avec Denis Diderot à l’Encyclopédie qui porte leurs noms.
Quelques publications :
— Mémoire sur le calcul intégral (1739).
— Mémoire sur la réfraction des corps solides (1740).
— Traité de dynamique (1743 puis 1758).

 

 

Denis Diderot (1713-1784). Philosophe, écrivain et encyclopédiste.
Quelques publications :
— (Anonyme) De l’interprétation de la nature (1753) puis sous son nom : Pensées sur l’interprétation de la nature. 175.
— Jacques le Fataliste et son maître, paru d’abord en feuilleton dans la « Correspondance littéraire » de Melchior Grimm entre 1778 et 1780. Puis posthume en France en un volume en 1796.

Les  images ont été rajoutées par nos soins. – Nouvelle transcription de l’article original établie sur un exemplaire de collection personnelle sous © histoiredelafolie.fr

INCUBE, s. m. (Divinat.) nom que les Démonographes donnent au démon quand il emprunte la figure d’un homme pour avoir commerce avec une femme.

Delrio, en traitant de cette matière, pose pour premier axiome incontestable que les sorcières ont coutume d’avoir commerce charnel avec les démons, & blâme fort Chytrée, Wyer, Biermann, Godelman, d’avoir été d’une opinion contraire, aussi-bien que Cardan & Jean-Baptiste Porta, qui ont regardé ce commerce comme une pure illusion.

Il est vrai que saint Justin, martyr, Clément Alexandrin, Tertullien, saint Cyprien, saint Augustin & saint Jérôme ont pensé que ce commerce étoit possible ; mais de la possibilité à l’acte il y a encore une grande distance. Delrio prouve cette possibilité, parce que les démons peuvent prendre un corps & des membres phantastiques, les échauffer jusqu’à un certain degré. Quant à la semence nécessaire à la consommation de l’acte vénérien, il ajoute que les démons peuvent enlever subtilement celle que des hommes répandent dans des illusions nocturnes ou autrement, & en imiter l’éjaculation dans la matrice : d’où il conclut que les incubes peuvent engendrer, non pas de leur propre nature, puisque ce sont des esprits, mais parce que la semence qu’ils ont ainsi enlevée conserve encore assez d’esprits vitaux & de chaleur pour contribuer à la génération.

Pour appuyer ce sentiment, cet auteur cite sérieusement ce que les Platoniciens ont pensé du commerce des hommes avec les génies ; ce que les Poëtes ont dit de la naissance des demi-dieux, tels qu’Enée, Sarpedon, &c. & ce que nos vieilles chroniques racontent de l’enchanteur Merlin. Les faits de sorcellerie qu’il ne rejette jamais, viennent aussi à son secours. On peut juger par la solidité de ces preuves, de celle de l’opinion qu’il soutient, & que le lecteur peut voir en son entier dans les disquisitions magiques de cet auteur, liv. II, quest. 15, pag. 159 & suiv.

Il est bien plus raisonnable de penser que tout ce qu’on raconte des incubes, & ce qu’en ont dit elles-mêmes les sorcières dans leurs dépositions, est l’effet d’une imagination ardente & d’un tempérament fougueux. Que des femmes abandonnées à la dépravation de leur cœur, embrasées de désirs impurs, ayent eu des songes & des illusions vives, & ayent cru avoir commerce avec les démons, il n’y a rien-là de si étonnant qu’à s’imaginer qu’on est transporté dans les airs sur un manche à balai, qu’on danse, qu’on fait bonne chère, qu’on adore le bouc, & qu’on a commerce avec lui ou avec ses suppôts. Tout ceci cependant ne passe parmi les esprits sensés, que pour des effets d’une imagination vivement frappée ; il lui en coûte encore moins d’efforts pour supposer des incubes.

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