August Wimmer – La folie médiumnique. Extrait de l’Encéphale, (Paris), dix-huitième année, 1923, pp. 8-26.

August Wimmer – La folie médiumnique. Extrait de l’Encéphale, (Paris), dix-huitième année, 1923, pp. 8-26.

 

August Marius Nicolaj Wimmer (1872-1937). Médecin psychiatre et neurologue danois.
quelques publications:
— Psychogenic psychoses. 1 vol. (265 p.)
— Rapports sur le spasme de torsion. Société de neurologie de Paris. Xe réunion neurologique internationale annuelle, Paris, 3-6 juin 1929. – Recueil de trois articles extraits de la « Revue neurologique », 1929, 1er semestre.
— Degenererede børn (1909)
— Hukommelsestab og « dobbeltbevidsthed » (1918)
— Om besættelse (1924)
— Speciel Klinisk Psykiatri – for Studerende og Læger (1936)

Les [p.] renvoient aux numéros de la pagination originale de l’article. – Par commodité nous avons renvoyé les notes originales de bas de page en fin d’article. – Les  images sont celles de l’édition originale. – Nouvelle transcription de l’article original établie sur un exemplaire de collection personnelle sous © histoiredelafolie.fr

TRAVAIL DU LABORATOIRE DE PSYCHIATRIE DE L’UNIVERSITÉ
ET DE LA CLINIQUE DES MALADIES MENTALES ET NERVEUSES DE L’HOPITAL DE COPENHAGUE

[p. 8]

LA FOLIE MÉDIUMNIQUE

par

August WIMMER

Professeur de psychiatrie à l’Université de Copenhague
(Avec une planche hors texte)

« Il y a lieu d’espérer que les progrès des lumières et les idées générales d’hygiène préviendront à l’avenir les populations contre le retour de ces tristes effets de la crédulité et de la superstition. »
BRICQUET. (Traité de l’hystérie, 1859.)

Il est aisé de comprendre que le contenu pathologique de la conscience chez beaucoup d’aliénés reçoit l’empreinte du milieu social ou intellectuel dans lequel le malade est élevé. Magnandistingue et oppose dans la folie le « délire du moyen âge » et le « délire moderne ».

Il est évident aussi que le courant intellectueld’une époque peut à son tour pénétrer dans la vie mentale pathologique en lui prêtant et sa substance et son coloris. Ce phénomène s’accomplit avec d’autant plus de facilité que ce courant entraîne avec lui plus de mysticisme, plus de fanatisme, etc. (1).

Il fallait donc s’attendre à ce qu’un mouvement tel que le spiritisme laissât ses traces dans les services de maladies mentales. Mais, s’il se manifeste dans ces services, ce n’est pas parce que, par exemple, le persécuté a recours au spiritisme pour expliquer les « persécutions », « les voix », etc. (délire de persécution à teinte spirite, Violet) ; mais ce mouvement se manifeste aussi, et surtout, parce que le malade s’occupant d’un spiritisme plus ou moins outré, de pratiques médiumniques et autres, ce genre d’occupation, non seulement vient modeler les symptômes, vient déterminer la substance de l’affection mentale (rôle patho-plastique), mais provoque même directement l’explosion de celle-ci et agit d’une façon pathogène.

Les Français et les Allemands, au cours des six dernières années [p. 9] écoulées, nous ont donné une série assez importante de contributions à cette « folie spirite », à ce « délire de médiumnité (2) ».

Déjà, en 1917, j’avais observé à l’hôpital Saint-Jean un beau cas de cette nature. Mais il me semble que le flot montant du « spiritisme » et de « recherches psychiques » mal dirigées, qui nous a inondés pendant ces dernières années, a aussi entraîné quelques épaves dans le service des maladies mentales de l’hôpital municipal de Copenhague (3).

C’est ainsi que nous avons vu un certain nombre de malades atteints de folie maniaco-dépressive, dont les crises, le plus souvent d’exaltation avec obnubilation plus ou moins intense, d’hallucinations « spirites », etc., paraissaient déclenchées parce que ces sujets s’occupaient d’une manière excessive de manœuvres spirites. La psychose se caractérisait, du reste, par les éléments maniaco-dépressifs habituels (Cf. ce que nous disons plus loin), de même que son évolution se produisait de la manière ordinaire, de sorte que les idées et hallucinations spirites disparaissaient avant ou, en tout cas, en même temps que se produisait la cessation de l’exaltation.

Dans le cas que je vais relater, la psychose avait assurément certains traits maniaco-dépressifs ; mais les idées et hallucinations spirites ont, en tout cas, survécu à une phase maniaco-dépressive éventuelle, et se caractérisent maintenant comme un délire autonomede possession spirite.

Cas I. — Femme mariée, quarante-deux ans ; entrée dans le service en mai 1921.

Son père était excentrique et adonné à la boisson. La malade a toujours été rêveuse ; elle était facilement épuisée au point de vue nerveux, avec dix à douze heures de sommeil. Antérieurement elle n’a pas présenté de signes certains d’hystérie ou de variations de l’humeur, survenant par phases. Elle vit en parfaite harmonie avec son mari.

Quelques mois avant son admission, alors que, d’après l’avis de son mari, elle était comme à l’habitude au point de vue psychique, elle lut dans le Journal des Damesun article sur les communications que les « disparus » faisaient par le moyen des tables. Elle essaya par plaisanterie d’en faire autant. Elle s’en amusa au début ; mais comme quelques-unes de ces communications « réussirent », elle finit par croire. C’était en particulier un de ses frères mort qui lui parlait par l’intermédiaire du pied de table. Un jour, sur l’ordre du frère, elle brûla la table et mit au feu les notes qu’elle avait prises sur les communications.

Elle commença alors à écrire automatiquement, son frère « guidant sa plume ». Quand elle était trop terrifiée par tous ces mystères, elle brûlait [10] ce qu’elle avait écrit, « purifiait » sa demeure et semblait normale pendant quelques jours. Mais la veille du jour où elle fut admise à l’hôpital, son mari, en rentrant, fut surpris de voir la table mise avec un couvert de plus : celui du frère mort. Peu après la malade eut une intense crise de larmes et elle alterna ainsi entre les larmes, le rire, les prières, le mutisme, le refus de nourriture, les tentatives faites pour se jeter par la fenêtre, etc.

Ici, dans le service, elle est muette ou elle prie en silence, les mains jointes, dans une légère extase : « Dieu est dans mon cœur ! » Quand on l’interroge, elle se contente de sourire. Après sa conférence avec Jésus, elle buvait simplement et refusait tout aliment solide. Alors elle parlait davantage, elle souriait, elle était parfaitement orientée; elle se croyait marquée par la Providence : « Dieu m’aime, sa voix retentit dans ma poitrine ; je l’aime, je l’aime lui aussi. » Elle avait vu se réaliser la plus grande vérité de la terre, elle avait pu tout savoir, grâce au petit pied de la table. Par moments, elle avait un sourire libertin auquel il était impossible de se tromper, des contorsions de la partie inférieure du corps, etc. Pas de stigmates d’hystérie. Exophtalmie légère, ébauche de goitre ; pas de tachycardie.

Elle arriva ainsi à une exaltationmarquée, avec une gaieté folle et rayonnante, souvent toute secouée de ricanements, frétillant des bras et des jambes, avec un bavardage continu, une démarche sautillante et légèrement déviée, des saillies et des ripostes vives, des traits d’esprit, des réactions maniaques rapides lors des épreuves d’association. Par moments, elle était prise d’une fureur presque maniaque, avec des violences ; à d’autres jours, elle présentait des phases de stupeur maniaque.

On la transféra à l’hôpital Saint-Jean. Elle présenta constamment des symptômes de manie éréthique ; elle ne parlait jamais de spiritisme. Elle reçut son exeat sur la demande du mari.

En octobre de la même année, le mari vint me voir et me raconta que sa femme entendait constamment une voixqui, entre autres choses, lui chuchotait que cette voix allait passer dans un autre homme avec lequel la malade devrait se marier. « C’est quelque chose de surnaturel que ni le médecin ni mon mari ne comprennent. » En même temps, elle racontait à son mari que, pendant son séjour à l’hôpital, la voix lui disait que celui qui la visitait sous les apparences de son mari n’était pas celui-ci, mais un autre qui avait pris la forme de son mari ; c’est le motif pour lequel elle s’était toujours montrée peu aimable pour son mari quand il venait la voir à l’hôpital. Maintenant, elle ne fait preuve d’aucune répulsion à l’égard de son mari. Elle est plus irritable, elle est dépensière dans ses achats, mais, à part cela, elle surveille sa maison comme autrefois, elle s’intéresse à son intérieur, etc. Pas de changement persistant de l’humeur, pas de besoin impérieux de s’occuper ou de parler ; le mari n’a rien remarqué qui indique des traits de schizophrénie. Elle ne s’occupe plus de faire tourner les tables, ni d’écrire automatiquement ; d’une manière générale, elle circule tout à fait silencieusement avec ses « voix des esprits ». Elle n’a pas présenté d’autres idées indiquant la folie (4).

Si l’affection mentale de cette malade, considérée sous un certain [p. 11] aspect, peut être diagnostiquée comme psychose maniaco-dépressive, cela est dû aux « éléments radicaux maniaques » qui existent incontestablement (bien qu’ils ne se soient manifestés dans la psychose qu’au bout d’un certain temps), besoin de parler, exaltation du caractère, agitation motrice. En revanche, il faut faire ressortir que quelques auteurs, en dernier lieu Dide, Pezet et Mire, disent justement que ces « périodes d’excitation » (avec besoin de parler, associations sonores, etc.), sont fréquentes dans les affections mentales chez les spirites, qui, dans l’ensemble, sont très souvent empreintes d’une légère euphorie extatique, tout au moins par moments. Nous montrerons aussi plus loin, comment, dans la suite des idées de ces malades ou dans leurs productions « automatiques » (de même que chez quelques « médiums » professionnels), on trouve constamment un certain degré de fugacité des idées, d’« associations maniaques », etc.

Le diagnostic de « psychose maniaco-dépressive » est par suite peut-être douteux chez notre malade. Mais, de toutes façons, nous ne commettrons pas d’injustice à l’égard des manœuvres du spiritisme en les accusant de l’apparitionde l’affection mentale chez notre malade et du « délire de possession spirite » qui persiste.

Chez la malade suivante, l’action pathogène du spiritisme est manifeste ; manifeste aussi est son action en tant que créateur du substratum.

Cas II. — Femme mariée, vingt-neuf ans ; entrée dans mon service en mars 1921. La famille est quelque peu dégénérée. Elle a mené une vie très active au point de vue sexuel. Syphilis il y a douze ans. Caractère bon, mais à explosions, avec des accès d’emportement, de sorte que « le sang et l’écume lui sortaient de la bouche » ; ces crises sont suivies de syncope (à telles enseignes que le mari devait l’en tirer en lui chatouillant la muqueuse nasale, etc.). Elle a été toujours très jalouse à l’égard de son mari.

Il y a quelques années, elle fut très absorbée par le spiritisme ; l’année dernière elle a couru fréquemment les réunions spirites ; six mois avant le début de sa maladie elle a beaucoup fréquenté un « médium écriveur ». Un mois environ avant son entrée la main de la malade commença à écrire automatiquement ; elle recevait des communications d’une cousine morte depuis quelques mois, d’un oncle (qui n’est pas mort) et en dernier lieu de Jésus ; elle commença à vouloir convertir son mari au spiritisme, elle reçut des communications écrites d’après lesquelles son mari et elle devaient mourir; elle écrivait constamment, de manière automatique, des soirées entières sans interruption, avec une allumette ou autre objet analogue, quand son mari lui eut enlevé plumes et crayons.

Elle confessa alors par écrit à son mari qu’elle avait eu la syphilis. Bientôt après, elle commença aussi à chanter automatiquement (voir plus loin), elle courait dans le cimetière, elle parlait constamment de ses fiançailles avec Jésus ; mais, d’après les renseignements fournis par le mari, elle ne semble pas avoir présenté de confusion vraie, en particulier, elle était parfaitement orientée sur les faits quotidiens. [p. 12]

A son entrée à l’hôpital, elle se montra aussi également bien orientée au point de vue du temps, du lieu, des personnes qui l’entouraient, des événements personnels récents ou anciens, mais seulement avec l’exception qu’elle disait qu’elle avait été mariée(voir ci-dessous). Elle était un peu agitée, mais surtout très repliée sur elle-même, avec une physionomie pensive, et comme forcée, et toute conversation avec elle se passait d’une manière très particulière (5). Avant de répondre aux questions, elle fermait les yeux, son visage prenait une expression à la fois songeuse et attentive, comme si elle eût écouté, et elle répétait la question comme en l’adressant à un auditeur invisible. C’est seulement après qu’elle écrivait avec une rapidité moyenne, ou bien elle écrivait et lisaitses réponses ou ses communications spontanées, s’arrêtant souvent pour de nouvelles questions à un auditeur ou à un souffleur invisible et ainsi de suite. Si on lui enlevait les plumes ou crayons, elle écrivait sur le drap de lit avec son index droit. Pendant ses communications elle demeurait de plus en plus distante, concentrée sur elle-mêmeet constamment elle n’entendait pas mes questions. Humeur changeante, correspondant au contenu des communications.

C’est ainsi qu’elle m’expliqua ce qui suit. La première chose que sa main ait écrite, fut la phrase : « Je t’attends, Ingrid » (nom de la cousine décédée). Puis sa main avait écrit que son esprit protecteur était Jérémie ; plus tard, ses parents morts se manifestèrent à elle ; enfin le message suivant lui parvint : « Je suis le Maître ! Veux-tu être à moi ? » question à laquelle sa main répondit le lendemain matin : « Je veux être à toi. » La voix de Jésus qui « écrivait avec sa main et retentissait à ses oreilles » déclara ensuite : « Oui, Jenny, tu es une prostituée d’autrefois, mais je suis Jésus ; depuis longtemps nous appartenons l’un à l’autre ; tu es Marie-Madeleine et notre fils est Judas. »

La lutte qui se livre en moi, écrivait-elle encore, est entre le prince noir et Jésus : « J’ai souvent péché avec le prince des ténèbres (6). » Elle a été « excessivement légère », une « p…rostituée. »

« Le prince » l’a souvent visitée de nuit et « il a eu des relations avec elle » ; il en a été ainsi la nuit dernière ; mais « Dieu a alors pris sa passion ». Elle a eu aussi « des relations avec Jésus » mais c’était « une tout autre sensation », « une sensation douce, comme un rêve, mais aussi véritablement divine ». Jésus la visitera de nouveau « quand elle aura été purifiée des relations nocturnes avec le prince (7) Elle sera religieuse (nonne) ; quand elle sortira d’ici elle n’appartiendra plus qu’à Jésus, elle délivrera toute la terre. « Elle mourrait volontiers pour prouver la toute-puissance de Dieu. »

Son écriture automatique(fig. I) était très courante, sans signes de ponctuation, parfois même illisible. Souvent elle ne pouvait interpréter elle-même ce qu’elle avait écrit, même immédiatement après l’avoir écrit et prononcé. Le passage suivant est très caractéristique : « Je suis le Maître comme toi et [p. 13] moi… Le prince est ici, mais sa puissance est brisée… Jenny doit partir d’ici car Dieu le bénit, bénit le principe comme un homme se bénit lui-même Jésus est allé en effet lui… dans son propre appartement mais maintenant il est neuf et… oui chant et danse ici j’ai demandé une âme simple avec le sentiment du devoir, oui Jenny ma force… tu crois… mais maintenant le salut du droit de la mère avec le soleil 12. » D’autres fois elle écrivait toujours le même petit nombre de phrases. « Le prince qui a été mauvais pour les hommes au point de tourmenter la prostituée toute une nuit de sorte que Dieu pleura il est mort mais Jenny et Jésus vivent et doivent délivrer l’humanité », etc.

Elle déclara enfin, quoique ne sachant pas chanter, qu’elle avait reçu le don du chant et pouvait chanter avec deux voix : avec un sourire extatique, les yeux fermés elle chantait d’une voix monotone les fragments d’airs suivants (voix grave d’homme) en déclarant que c’était Jésus qui chantait par elle :

J’aime ce don,
Car il est si bon,
Il me remplit tout entière,
Comme aucun autre ne peut faire.

Puis, avec une voix de fausset (c’est-à-dire « la voix de sa mère ») elle chantait :

Dieu tout-puissant,
Du beau ciel divin habitant,
Laisse Jésus avoir plaisir suprême,
Grand plaisir avec lui et moi-même.

Elle prenait une attitude de catéchiste vis-à-vis des autres malades ; elle circulait dans la salle et priait auprès de leur lit.

Au début, elle était tout à fait anxieuse à l’égard de l’examen objectif ; elle redoutait un attentat à sa pudeur de la part du médecin. Elle n’avait pas de troubles moteurs ou sensoriels ni dans la main droite ni dans le bras droit ; d’une manière générale elle ne présentait pas de stigmates hystériques. Exagération très considérable des réflexes. Le liquide céphalo-rachidienétait normal ; réaction de Wassermannnégative dans ce liquide et dans le sang. Un peu de tuméfaction de la région antérieure du cou. Pouls 126 ; pas d’exophtalmie.

Un certain jour, elle eut une crise ; elle demeura couchée pendant un quart d’heure toute rigide, les yeux fermés, les mains jointes avec force, la physionomie immobile, sans aucun signe notable d’angoisse, type de respiration normal. Elle déclara ensuite « qu’elle avait été morte ».

Son état demeura stationnaire avec les mêmes idées religieuses et extatiques, démonomaniaques et sexuelles, caractère instable, tendance au verbiage et à la prédication, mouvements d’écriture. Ultérieurement le reploiement sur elle-même devint plus marqué et le besoin d’expansion diminua. Mais il ne se développa jamais d’état d’obnubilation vraie ; elle était constamment pleinement orientée. Très rares étaient les ébauches d’hallucinations visuelles (soleil entouré d’une puissante clarté rayonnante, la mort vue sous [p. 14] forme d’un nuage sombre). Elle dormait après le véronal ; jamais de somnambulisme, elle ne parlait pas pendant son sommeil et ne faisait pas non plus de mouvements d’écriture.

Elle fut transférée à l’hôpital Saint-Jean, le 31 mars 1921 ; elle raconta ici aussi qu’elle était spirite, elle narrait et écrivait la « lutte » ; elle avait des hallucinations, elle était absorbée par des voix qui plus tard devinrent impératives ; elle brisa les vitres, elle commettait des violences sur elle-même, fit tentatives de suicide. Par la suite elle devint extatique, en état de demi-stupeur, muette pendant des périodes, refusant les aliments, malpropre ; elle gisait dans des positions rigides et contracturées (en position de crucifiement) : par moments, secousses convulsives dans les membres. Pas de troubles de la sensibilité. L’écriture automatique avait rapidement disparu.

Cette observation correspond de façon très exacte à la majorité des cas de « folie spirite » (affection mentale médiumnique) (9) qui ont été antérieurement publiés. Nous avons un terrain psychique préparé, une diathèse psychogène, sur laquelle les manœuvres de spiritisme vont déclencher une affection mentale psychogène, souvent avec une apparition très aiguë, tandis que l’évolution ultérieure est souvent rémittente.

Il n’y a pas d’obnubilation persistante de la conscience, mais, au cours de certaines exacerbations ressemblant à la « transe », il existe fréquemment un reploiement-sur soi-même, entraînant une « absence » très considérable, allant parfois jusqu’à la stupeur, le tout mélangé de symptômes hystériformes. Il peut exister de l’amnésie (?) ou un souvenir sommaire de ces exacerbations, tandis qu’il n’y a pas d’oubli pour les événements de la maladie.

Les réactions de l’humeur sont changeantes, polymorphes, correspondant aux idées fausses, variables, d’origine spirite, avec crainte de la persécution, expansion, dépression, etc. Ce qui est caractéristique pour ce « délire moderne » spirite, c’est, comme dans le « délire du moyen âge », l’intime et insipide mélange avec les idées d’auto-accusation, les idées (et hallucinations) religieuses et mystiques, emphatiquement exaltées, associées à des idées grossièrement sexuelles et érotiques allant jusqu’au blasphème.

Le délire est très hallucinatoire, avec des hallucinations auditives et surtout avec les hallucinations verbo-motrices et « graphiques » si caractéristiques pour ces affections : verbosité, écriture automatique, etc. (Cf. plus loin.) En revanche, les hallucinations visuelles passent ici très loin à l’arrière-plan, de même que les hallucinations gustatives et olfactives. Par contre, les sensations sexuelles organiques sont très fréquentes.

La marche de l’affection est certainement très variable. Quelquefois, [p. 15] il y a une guérison extrêmement rapide ; dans d’autres cas, la maladie dure des années, peut-être avec terminaison en « folie spirite » chronique. Même dans le cas de guérison, la disparition totale des idées erronées spirites n’est pas toujours de règle (« délire résiduel »).

De même que notre cas II nous ramène dans son aspect directement aux délires de possession, extatiques, sexuels et démoniaques des couvents de femmes au moyen âge, de même aussi, par sa substance, son contenu, par la verbosité, l’écriture « automatique », il nous conduit directement au « délire moderne », à la « transe médiumnique » de notre époque. Cette ressemblance symptomatologique se transforme en identité dans l’observation qui suit.

CAS III. — Employée de magasin, 27 ans, non mariée, entrée dans le 6e service de l’hôpital municipal en mai 1920 ; elle n’y séjourna malheureusement que cinq jours, sa mère, ne comprenant pas toute l’importance de la situation, la fit sortir. Il n’était pas certain que notre malade présentât une prédisposition héréditaire ; caractère difficile et émotif, elle n’a pas eu de crises hystériques antérieurement. Elle avait lu pas mal de choses sur le spiritisme, mais ne s’en était jamais occupée activement.

Un mois avant son entrée, elle avait repoussé les avances matrimoniales d’un Monsieur K. H. Cet événement ne paraissait pas avoir fait sur elle une profonde impression (extérieure). Mais une vingtaine de jours plus tard, tout à fait brusquement, alors que le matin elle était dans son lit, éveillée, elle remarqua qu’on parlait avec sa langue, elle sentait comment sa langue se mouvait comme si on disait quelque chose dans sa langue (en revanche, on ne parlait pas dans son oreille ni dans sa tête). Tantôt c’était comme un clic-clic, tantôt comme une parole ou un chant réels dans tous les idiomes possibles « et je ne connais aucune langue, ajoute-t-elle, de telle sorte que je ne pouvais comprendre ce qui était dit ou chanté avec ma propre langue. » Dès que la glossolalie commença, elle sentit une pression dans la région précordiale, « comme un courant chaud » ; plus tard, sa glossolalie s’accompagna d’un « état extraordinaire », comme si la malade eût été « tout à fait éveillée ». Pendant sa glossolalie « elle ne pensait à rien », elle « n’en avait pas le temps ». Le timbre de la voix était masculin, tantôt suédois, tantôt anglais, tantôt c’était celui de la voix du jeune homme dont elle avait repoussé les avances.

Après de telles crises de glossolalie, elle était épuisée et anxieuse, « surtout quand les voix, par la suite, lui dirent des choses –menaçantes ». K. H. était à Londres, sous l’influence hypnotique du Prof. Raymond (10) qui avait aussi hypnotisé la malade et lui avait suggéré, entre autres choses, de parler dans diverses langues et la menaçait de la rendre folle si elle informait la police de ces faits.

Pendant la journée, d’une manière générale, elle était légèrement accablée et sans repos ; par contre, elle dormait bien la nuit et ne rêvait jamais.

A l’entrée à l’hôpital, elle était complètement lucide et bien orientée ; mais sans la moindre idée qu’elle fût malade. La conversation avec elle était interrompue à tout instant par ses crises de glossolalie. Elle commençait à [p. 16] faire des grimaces, elle tirait la langue, elle louchait et débitait avec une grande volubilité une série de bribes de mots qu’elle baptisait tantôt de français, tantôt d’anglais, tantôt de suédois, etc. La litanie de ces mots avait autant que faire se pouvait le caractère de ces divers idiomes, de sorte qu’on pouvait nettement deviner à quelle langue ces mots prétendaient appartenir. Son –« français » et son « anglais » étaient composés uniquement de bribes de mots, arrangés d’après le son, sans aucune idée de la syntaxe. Son « suédois » était en partie mieux élaboré et plus intelligible ; elle disait, par exemple, dans cette langue : »Du er et utmàrket bra medio min pika ; jag skal ikke slippadig min ptka, du er et udmärkat bra medio (au lieu de : duär ett utmärkt bra médium, min piga; jag .skall icke slippa dig, min piga, etc.) (« c’est la voix du Prof. Raymond) ». On reconnaissait ainsi au milieu de son charabia qu’elle parlait des influences ci-dessus mentionnées, et provenant de Londres.

En dehors des crises son humeur était tout à fait égale, plutôt légèrement apathique. Elle ne donnait pas nettement l’impression de quelqu’un qui veut se rendre intéressant ; elle était très mécontente d’être hospitalisée ; et il était réellement impossible de la convaincre du caractère morbide de sa glossolalie. On ne remarqua rien pendant la nuit. Il n’existait pas de traits de schizophrénie.

La mère la reprit chez elle le 11 mai. Trois jours plus tard, je reçus d’elle la lettre suivante (fig. 2) : « J’ai appris par une de mes connaissances que M. K. H., de Vordingborg, fait assidûment des recherches psychiques. Ne vaudrait-il pas mieux que la police trouvât l’endroit où il se tient ? Je continue à avoir ces communications en clic-clic et aussi des secousses dans le visage, de telle sorte que je voudrais que la question fût étudiée à fond, si cela est possible ? »

Elle vint chez moi sur rendez-vous, le 27 mai 1920, et me raconta ce qui suit : « K. H. lui parle toujours avec sa langue à elle et par sa bouche à elle comme un gramophone ». Il lui est toujours impossible de retenir cette parole imposée.

Mais depuis le 21 mai, il s’est ajouté de l’écrire automatique, le plus souvent entre 7 et 9 heures du matin ; elle remarque des fourmillements partant du coude droit et descendant à travers l’avant-bras, dans les trois doigts du côté radial de la main ; elle constate que sa main est entraînée sur le papier, tantôt lentement, tantôt d’une façon très rapide. C’est quand elle tient le crayon très près du bout inférieur (du bout de la mine) qu’elle écrit le mieux.Elle ne sait pas ce qu’elle écrit, avant de l’avoir lu. Elle ne peut s’empêcher d’écrire, quoique souvent elle essaie de changer le cours de ses idées, qu’elle récite des vers à haute voix, etc.

Parfois, elle écrit des mots tels que « vengeance » ; à d’autres moments, on lui écrit qu’elle doit se rendre à Soendermark, à 4 heures, chez un nommé Salvador (11) Jensen qui l’amènera à Londres avec lui ; d’autres fois, elle doit se rendre, lui écrit-on, chez Faustinus (12) etc. (Voir plus loin.)

A d’autres moments, elle est obligée de frapper avec son index, 7, 8, 10, 25 coups ; elle ne soupçonne pas elle-même ce que cela signifie.

Pendant ces crises d’écriture automatique, il n’y a jamais de perceptions

[p. 17] sexuelles ; d’après sa description, son état mental rappelle à peu près des degrés plus ou moins considérables d’absence. De même, en dehors des crises, son état mental général ne paraît pas très modifié ; elle pensait peu aux crises, elle mangeait et dormait bien; pas de rêves.

Elle était pleinement convaincue qu’il s’agissait de spiritisme, puisqu’on lui avait indiqué toute une série d’adresses de gens dont elle ne croyait connaître ni le nom, ni la demeure (13).

L’examen objectif ne révéla pas de paralysies, pas de contractures ni de troubles de la sensibilité dans la main ou le bras droits.

Malheureusement, j’ai perdu ensuite cette malade de vue.

Des échantillons d’écriture automatique que la malade m’a laissés, nous donnons ceux qui suivent (fig. 3). L’écriture, ainsi que le montre une comparaison avec son écriture normale (fig. 2), était considérablement modifiée. Cette écriture automatique était très difficile ou même impossible à interpréter (14). La teneur était, par exemple, la suivante : Tu t’appelleras Jenny H… (15), que tu le veuilles ou non tu seras ma femme je puis le jurer sur tout… Fille honorable, ils peuvent seulement nous dénoncer à la police de sorte que nous verrons ce que j’ai à faire avec vous je viendrai à Copenhague avant longtemps et c’est ainsi que nous parlerons avec ma jolie fille… Professeur Raymond Londres Square 1316. Jenny P… viendra à Londres… pour se marier… le Prof… notre super-grand-prêtre. K… H…4 London square 1316 (16).

Au point de vue symptomatologique, en tenant compte de la glossolalie, de l’écriture automatique, des bruits de frappement (« raps »), les crises de cette malade me paraissent tout à fait identiques à la majorité des descriptions que nous possédons sur les états de transe médiumnique plus simples. Sans aucun doute, notre malade aurait eu un immense succès parmi les spirites croyants ou dans les assemblées de parleurs inspirés. (17)

C’est uniquement le préjugé ou la prévention en faveur d’une théorie ou d’une foi « métapsychiques » déterminées qui empêcheront de voir dans cette identité symptomatologiqueun reflet des mêmes mécanismes psycho-pathologiques.

Telle est aussi l’opinion à laquelle sont arrivés les auteurs antérieurs (Pierre Janet, Grasset, Henneberg, Alfr. Lehmann, etc.) dans leurs recherches sur l’état psychique des médiums pendant leurs séances (18). [p. 18]

Ils font ressortir très nettement la parenté de la médiumnité avec la diathèse hystérique : « Presque toujours (je ne dis pas toujours, pour ne pas préjuger une question importante), ce sont des névropathes, quand ce ne sont pas franchement des hystériques. » (P. Janet.) Grasset s’exprime dans le même sens. Tous les auteurs font ressortir la présence assez fréquente d’accidents hystériques marqués, crises convulsives, délires, etc., parallèlement aux autres manifestations médiumniques. Suivant Janet, dans la « transe » médiumnique complète il y aurait un dédoublement maximum de la personnalité, un profond « somnambulisme » dans lequel les deux personnalités s’ignorent complètement et se développent indépendamment l’une de l’autre. Chez leurs sujets hypnotisables, Janet, Grasset ont pu provoquer des manifestations « médiumniques », de l’écriture automatique, etc.

Il est cependant douteux que, dans la majorité des cas, il existe des troubles somnambuliques aussiprofonds ; certainement, souvent, il n’y a qu’un hémi-somnambulisme qui a ses analogies psychologiques normales dans les « absences » ou le « reploiement sur soi-même », dans le stade hypnagogue qui précède le sommeil, etc.

Mais, dans tous les cas, l’état de la conscienceest caractérisé chez les médiumspar : ° un degré plus ou moins considérable d’absence (distraction) ou de concentration sur eux-mêmes, un rétrécissement du champ de la conscience, pour parler comme Pierre Janet. Ce phénomène s’accompagne : 2° d’une modification du courant des idées, d’une activité idéatrice « inconsciente » automatique, qui également, dans son contenu, diffère du contenu normal de la conscience, surtout parce que les idées en question apparaissent partiellement avec une intensité anormalement augmentée, jusqu’à avoir une netteté d’hallucination. De plus, la vie mentale ainsi modifiée présente : 3° une tendance à se manifester sous forme de combinaisons d’idées à teneur plus ou moins abondante, extraordinaires, baroques, fantastiques (« Hyperimagination subliminale »). Enfin cet état est caractérisé par : 4° la puissante tendance des idées à « s’extérioriser », à se créer des manifestations verbales, graphiques, mimiques (glossolalie, écriture automatique), « raps » (ou coups), incarnations, etc.

La conséquence immédiate de cette « absence », cette suppression de l’attention volontaire et éveillée, c’est la modification du courant des idées, chose qui est bien connue dans la fatigue cérébrale, le stade hypnagogue qui précède le sommeil, etc. Les idées directrices proportionnées à un but et qui existent dans la conscience normale sont supprimées ; « les pensées voyagent pour leur propre compte » ; l’enchaînement des idées devient purement accidentel, et se fait suivant les lois [p. 19] les plus simples de l’association ; « associations par contact », par ressemblance acoustique, par rimes, etc. La sélection que fait l’attention entre les éléments d’idéation émergeant automatiquement, l’inhibition et la conduction corticales, suivant la parenté ou la valeur logiques, personnelles, sentimentales des éléments de la conscience, toute cette critique et toute cette sélection, si importantes pour la clarté et l’économie de la vie consciente, sont supprimées. Quand il n’existe pas en même temps dans la conscience du médium, des conglomérats d’idées ou de sentiments qui se suggèrent eux-mêmes ou qui en suggèrent d’autres et qui dirigent (partiellement) le cours des idées, celui-ci peut alors subir un fort nivellement, il devient lâche, capricieux, ressemblant à des boutades, rempli de répétitions intriquées, d’associations d’idées baroques et arrivant même à l’inintelligibilité. Les manifestations verbales ressemblant à des idées, qui existent chez nos malades ou chez les médiums, rappellent jusqu’à un certain point les vagabondages improductifs de la pensée, mais cependant, elles ont plutôt quelque chose de la dispersion catatonique des idées ; « ils pensent suivant des lignes brisées (Bror Gadelius), avec des stéréotypies verbales (19), une tendance à la persévération et une quantité constamment croissante de mots néoformés, des néologismes qui précisément font partie de la glossolalie vraie ».

L’écriture automatique des observations 2 et 3 montre une série de ces troubles du fond et de la forme. On peut trouver des exemples plus bizarres encore dans un ouvrage paru ces jours derniers qui, au dire de l’auteur, renferme ses « communications médiumniques », principalement par écriture automatique (20). L’auteur, qui a écrit son livre comme un Mane, Thecel, Pharès, caractérise par des expressions très fortes le contenu de ces communications des esprits. En effet, il est incontestable que ces communications montrent jusqu’à quel maximum de fatras confus et dénué de toute imagination, l’activité idéatrice anarchique de la « subconscience » peut arriver. Nous donnons ici seulement quelques échantillons des manifestations de « l’esprit Kamma Rahbek » :

« Kamma rit, Gide, Gisse pleure ; petite Gide, Gisse n’est pas un corps aux genoux de faon ; Gisse aimable ; aimable Gisse ; Gisse aimable, etc. » (page 60). Puis, les communications deviennent une véritable salade de mots, de la verbigération. « Puisque ton Giese est tinn; chanter comme un coq, edfale ; gale gale gale edfale gale edfale Gide… Ide bide byse, base knide, knude, knuse, knase Gase est Gises, etc. » (page 64). Le maximum de l’absence totale de signification des [p. 20] mots et de stéréotypie graphique est atteint dans la communication suivante (page 4) qui reflète aussi bien qu’on peut le souhaiter la misère physiologiquede « la subconscience » (P. Janet) ; un catatonique en pleine désorganisation ne pourrait rien fournir de plus baroque ou de plus inintelligible.

Il est cependant évident que si les « communications » médiumniques ne s’élevaient pas habituellement, dans leur forme et dans leur fond, au-dessus d’un pareil galimatias, elles n’auraient pu être prises comme elles l’ont été, pour une bonne marchandise et n’auraient pas pris l’importance religieuse et sentimentale qu’elles ont acquise, même pour des hommes aux idées sérieuses. Il existe donc chez certains médiums, au milieu de leur « transe » extatique, certaines conditions de leur activité idéatrice automatique qui peuvent donner un pseudo-fondà ces communications, un caractère de choses extraordinaires, inattendues, étranges, surnaturelles, etc., un enchaînement formel, une pseudo-productivité, qui ont amené à créer l’expression « intelligence subliminale », etc.

Une des sources des communications plus intéressantes ou plus surprenantes des médiums, c’est ce qu’on dénomme la cryptomnésieet la seconde de ces sources est représentée par leur hyper-imaginationautomatique (subliminale).

Quoique, comme le dit Ribot, l’oubli soit une des conditions principales de la mémoire, c’est-à-dire la condition de la conservation des choses valant véritablement la peine d’être maintenues dans le souvenir, nous constatons cependant tous les jours que notre cerveau possède une quantité de traces latentes de souvenirs, des reliquats de sensations et d’événements plus ou moins lointains, plus ou moins fortuits, isolés et indifférents. Normalement, nous n’avons aucun soupçon de toutes ces « scories du souvenir ». Et si, parfois, elles émergent spontanément dans notre conscience, au cours d’un état de distraction, au cours d’un rêve, leur apparition nous remplit d’étonnement ou — d’autres fois — nous ne les reconnaissons même pas comme nos souvenirs personnels. Cette apparition dans la conscience de « traces de souvenirs oubliées », cette cryptomnésie, qui, par comparaison avec la plus grande limitation du souvenir normal, peut nous en imposer comme étant de l’hypermnésie, est un phénomène bien connu dans divers états de psychose, délires psychogènes, infectieux, dans l’hypnose véritable et aussi dans les « transes » des médiums (Janet, Grasset, Lehmann, etc.). Plus l’inhibition provenant de la conscience quotidienne est supprimée, plus le sujet est « distrait » (ou plutôt plus des ensembles concrets d’idées ou de sensations, de suggestions, viennent à agir pour tracer la voie aux reliquats latents du souvenir), plus la cryptomnésie agit avec facilité. On comprend aisément que cette apparition de souvenirs complètement oubliés jusqu’alors doive faire une profonde impression, surtout quand le médium (ou le malade) ne les reconnaît plus comme son bien personnel ; ces souvenirs [p. 21] paraissent alors quelque chose d’étrange, d’inexplicable, de surnaturel, d’« inspiré », aussi bien pour le médium que pour son public plein d’une attente anxieuse. Cette illusion est encore augmentée parce que la cryptomnésie agit à un degré considérable à l’égard des associations avec chaînons inconscients, à la façon d’idées émergeant librement et ne semblant avoir aucun lien avec le contenu actuel de la conscience du sujet.

La cryptomnésie fournit des matériaux abondants et très intéressants au point de vue psycho-pathologique pour la question de la science, souvent étonnante, que les médiums possèdent sur des choses que, de bonne foi, ils avouent ignorer dans leur état normal. Il faut la persévérance et la sagacité d’un Flournoypour démontrer comment et jusqu’à quel point ces souvenirs « subliminaux » sont perdus dans le cerveau du médium.

La cryptomnésie explique un seul des côtés de la productivité des médiums. Mais les manifestations médiumniques reçoivent leur élaboration la plus parfaite, leur coloris qui éblouit à distance, grâce à l’action de l’hyper-fantaisie automatique, grâce à la façon dont, bravant tout bon sens et tout contrôle expérimental, les éléments de la conscience du médium sont enchaînés entre eux. Nous rencontrons ici les mêmes combinaisons fantastiques d’idées que nous avons appris à connaître dans les délires psychogènes, dans les rêves, etc.

En règle générale, cette production excessive de l’imagination se déroule autour d’un « leit-motiv » formé par une idée ou une sensation. Parfois il s’agit d’ensembles d’idées et de sensations « refoulés » qui, sous l’action de la modification de conscience, « se ravivent », redeviennent actifs et tracent la voie au courant des idées, ainsi que nous l’avons vu chez nos malades, et ainsi que nous avons appris à le connaître dans d’autres formes de maladies mentales psychogènes. Il semble pourtant que ces ensembles qui, en règle générale, sont très fortement « personnels » peuvent souvent avoir une action compromettante sur les manifestations des médiums en donnant lieu à l’apparition de ces « esprits d’oppositions » plus ou moins mal gracieux, pleins de critique, moqueurs et obscènes que nous avons vus figurer dans les possessions des religieuses et des sorcières et aussi chez les médiums de notre époque et dans les autres « dissociations de la personnalité (21). »

Chez les médiums professionnels, la fantaisie exagérée (l’hyper-fantaisie) automatique se cristallise de préférence autour de « noyaux » d’une autre espèce. Par auto ou hétéro-suggestion, la vie mentale consciente ou inconsciente du médium s’ajuste, s’adapte à certaines idées de spiritisme, d’occultisme, d’idées transcendantes, à des efforts pour entrer en rapport avec certaines personnes déterminées vivantes ou [p. 22] mortes, pour donner des renseignements sur certains faits déterminés (« l’homme au sixième sens »), etc. Habituellement, cependant, on constate que, même avec une telle adaptation, il faut une certaine « période de préparation » avant que le médium soit capable de fournir des communications plus enchaînées entre elles, plus intelligibles, plus substantielles et plus convaincantes pour les croyants. Ces communications sont souvent précédées d’une série d’éjaculations verbales tâtonnantes, d’une indigente imagination. Mais avec une imagination personnelle suffisante, avec une faculté mythomaniaque suffisante pour s’adapter à la situation, pour la vivre, avec une capacité suffisante pour sortir d’une manière auto-hypnotique de la conscience normale pleine de bon sens et enfin, ce qui n’est pas le moins important, sous l’influence suggestive constante de l’entourage, les communications « subliminales » du médium peuvent atteindre un maximum étonnant de plénitude et de coloris fantastique, dont Je summum aboutit aux « romans médiumniques » et aux incarnations qui ont tait la célébrité d’une Hélène Smith, d’une Mistress Smead.

Cependant l’analyse intime de ces étonnantes « communications », la recherche soigneuse de leurs sources psychologiques montrent à quel degré le médium puise dans son propre fonds ou bien à quel point il est suggestionné par son entourage ou comment il sait l’exploiter (22) Ces « communications » fantastiques montrent, si on les examine d’un peu près leur communauté d’origine avec les connaissances ou l’imagination personnelles du médium. Celui-ci calque ses communications « ses romans », ses « incarnations » sur un cercle d’idées très terre à terre, il commet les fautes les plus grossières par ignorance (23) et, dans sa productivité, il est toujours influençable par les suggestions bonnes ou mauvaises venues du dehors. Nous ne rencontrons jamais une imagination vraiment créatrice, modelant des images et idées sortant de nos idées terrestres. Et dans de nombreuses « communications » de médium, nous trouvons une pauvreté de fond qui est mal dissimulée par les images pseudo-fantastiques, par des oracles auxquels on prétend en vain attacher une signification profonde.

Les « poésies médiumniques » sont souvent d’une très grande banalité ; souvent elles constituent, dans leur forme et dans leur fond, des injures verbales contre les malheureux poètes qui ont quitté cette terre et auxquels on attribue ces insanités.

La dernière particularité, la plus intéressante et qui est tout à fait décisive pour l’action que les médiums exercent sur leur entourage au moyen de leur conscience modifiée, c’est la tendance excessive à[p. 23] s’extérioriser que présentent les éléments de leur conscience, à se créer des manifestations extrinsèques : verbales, graphiques, motrices, etc.

Ici nous rencontrons d’abord la parole automatique, la glossolalie. Nous la retrouvons du reste dans d’autres états de psychose. Derrière elle se cache un phénomène hallucinatoire particulier : l’allucination verbale motrice(Séglas) (24) dont j’ai analysé ailleurs (25) les mécanismes psycho-physiologiques, en me fondant en partie sur les explications de Séglas. Il s’agit d’une manifestation, anormalement renforcée, de la tendance normale que possède le centre moteur de la parole à participer lui aussi à l’activité particulièrement vive de la pensée (concentration extrême, émotions, etc.), tantôt sous forme de parole intérieure (endophasie, Ballet), tantôt sous forme d’expression plus ou moins distincte des idées qui remplissent la conscience: Une certaine prédisposition individuelle (ainsi que nous la constatons chez l’enfant et le vieillard) facilite l’apparition de cette « conversation avec soi-même ». Chez les médiums parleurs proprement dits (chez qui aussi l’entraînement joue un rôle), de même que dans les affections mentales d’origine spirite ou médiumnique, l’impulsion motrice verbale est à son maximum ; la glossolalie est une parole forcée.

La dénomination que ces sujets donnent aux phénomènes : « parole de la langue », est très exacte au point de vue psycho-physiologique. Il s’agit de l’action de processus cérébraux surtout moteurs, qui, ici comme dans d’autres formes de maladie mentale, sont sentis sous forme de mouvements involontaires dans les organes de la parole, tandis que, par contre, les idées qui les déclenchent sont souvent inconscientes ou très vagues. Ou bien encore, il s’agit de l’action (inconsciente) d’idées « refoulées » comme dans la glossolalie démonomaniaque, dans l’apparition des « esprits contradicteurs », etc. De cette manière et aussi par une transmission, probablement autonome, du mouvement qui existe dans le centre moteur de la parole, la « parole par la langue » prend le caractère de parole forcée et le malade ne la comprend qu’aprèsque les mots ont été prononcés, si même il la comprend. En effet, l’absence de contrôle ou le contrôle défectueux des mouvements de la parole par les idées entraîne fréquemment (ainsi que nous le savons par ce qui se passe dans la parole « distraite »), des erreurs de paraphasieallant jusqu’à des mots ou des constructions de phrases absolument incompréhensibles. La parole prend donc ainsi partiellement le caractère de formation de néologismes ; mais les néologismes plus parachevés, le fait de parler réellement dans des langues étrangères, dans une langue néoformée et logiquement construite supposent un long entraînement, ainsi que le montre le cas d’Hélène Smith.

D’autres fois encore l’activité interne des idées est très vive et très [p. 24] nette et le médium a l’illusion que sa parole lui est « dictée », comme nous le voyons dans l’observation numéro 2.

Chez les sujets normaux, habitués à écrire (et chez la plupart des aliénés) l’équilibration entre les centres des idées et le centre des mouvements de la main pour l’écriture n’est pas si facile à réaliser que l’écriture automatique se produise aisément et sans plus. Habituellement il faut pour cela un certain entraînement, plusieurs séances, des suggestions puissantes, etc., avant que l’individu, franchissant la période d’éjaculation scripturale tâtonnante, illisible, dépourvue de sens et pauvre de fond, puisse arriver à des « communications » plus dignes d’attention ou faisant époque. Psycho-pathologiquement parlant, nous avons dans l’écriture automatique un processus d’hallucination analogue à l’hallucination verbo-motrice ; Séglas parle d’hallucinations graphiques. A ces dernières s’applique, au point de vue des mécanismes psycho-physiologiques, ce que nous avons dit plus haut des hallucinations verbo-motrices. De même, l’écriture automatique est sentie comme forcée, inspirée et le médium ne soupçonne pas la teneur de ce qu’il écrit et, peut-être, il ne peut même pas déchiffrer ensuite ce qu’il a écrit. Ici aussi nous rencontrons souvent de la paragraphie allant jusqu’aux degrés les plus considérables. Ce qui est intéressant et possède, au point de vue psycho-pathologique, des analogies avec d’autres altérations psychogènes de la conscience, c’est la modification calligraphique de l’écriture automatique (fig. 1 et 2) ; différence frappante entre l’écriture du sujet à l’état normal et à l’état médiumnique, modification que les croyants au spiritisme n’hésitent pas évidemment à porter à l’actif de leurs théories.

Chez les médiums spirites dont l’évolution est achevée, les divers « esprits » ont parfois chacun son écriture ; quelquefois aussi chaque main écrit à sa manière (Mistress Piper) ou bien, la main gauche écrit par exemple par une écriture en miroir. La création de signes graphiques spéciaux semble demander un entraînement antérieur considérable. Ce qui est spécial à l’écriture des médiums, c’est souvent un excès de boucles et paraphes, des petits dessins intercalés (fig. 5). Les « dessins médiumniques » proprement dits ont leurs correspondants psycho-pathologiques dans certains produits des états d’obnubilation psychogène avec puérilisme, ces produits rappellent les dessins faits par les enfants, comme par exemple dans un cas relaté par Dupré et Tarrius (26).

Ce qui est particulier au point de vue symptomatologique, mais est, au point de vue psycho-pathologique, analogue aux manifestations médiumniques décrites plus haut, c’est la composition musicale automatique (fig. 6), le jeu de la guitare (chez un sujet très doué pour la musique (27)) et le jeu automatique du piano (parfois à l’imitation de compositeurs célèbres). Dans [p. 25] un cas de « délire mystique » rapporté par Laignel-Lavastine et Vinchon, chez une femme sculpteur de quarante-six ans qui jusqu’alors avait travaillé dans un style français moderne un peu maniéré, il existait, pendant la psychose, de la « sculpture automatique » avec retour au style gothique ancien dans le choix des sujets et pour la technique. Cette malade se livrait aussi à l’écriture automatique (28).

Les manifestations purement motrices que présente la vie mentale du médium sont certainement déterminées dans leur nature, et à un haut degré, par les auto-suggestions ou les hétéro-suggestions portant sur ce que le sujet attend de soi-même ou que les autres attendent de lui. Dans notre cas III, nous voyons un début de tapotement automatique. Mais les vrais esprits frappeurs, les véritables intermédiaires des communications supra-terrestres par le moyen du pied de la table sont, très incontestablement, des manifestations de certaines adaptations. Il est plaisant de voir, dans les Journées dans l’enfer, comment les tapotements de la table furent ensuite remplacés par d’autres automatismes moteurs simples : des « raps » ou coups des doigts d’une main frappant sur l’autre ou des coups des doigts sur la joue ou enfin par un entrechoquement des dents (éventuellement avec transmission antérieure télépathique de phrases au moyen de la tête).

Ces manifestations extérieures de la modification médiumnique de la conscience atteignent leur apogée dans ce qu’on appelle les « incarnations » dans lesquelles tel ou tel « esprit » vient se loger dans le corps du médium et dans lesquelles le médium, par ses écrits, ses chants, sa pantomime, « mime » l’esprit incarné. Nous avons ici une analogie bien connue avec les manifestations de sujets hypnotisés. Au point de vue psycho-pathologique, ces manifestations médiumniques ne diffèrent que quantitativement de la « transe » simple, pure : la légère « dissociation de conscience », avec connaissance vague ou incomplète des manifestations médiumniques qui caractérisent l’état de transe, est souvent augmentée de façon certaine dans les « incarnations » jusqu’à arriver à un véritable état d’obnubilation psychogène avec lacunes plus ou moins grandes dans le souvenir de ces incarnations.

Mais que le médium ou le malade atteint de folie médiumnique fasse beaucoup ou peu de chose dans ces manifestations, il ne produit rien de nouveau. Il peut seulement extérioriser ce qui se trouvait déjà dans sa vie mentale, que cela soit conscient ou « oublié » ou bien que cela lui soit apporté de l’extérieur. Il est et demeure un automate, un phonographe, pour employer une expression énergique. Comme les autres natures prosaïques, il ne peut, dans sa parole, son écriture, qu’exprimer ce qui est la propriété de sa vie mentale. L’antique maxime philosophique : Nihil est in intellectu quod non antea fuerit in sensibus[p. 26] s’applique à ce médium, comme à tout, du reste, en psychologie. Ou encore, on peut lui appliquer ce que répondait le mari de ma première malade, quand sa femme lui racontait les communications des esprits : « Mon Dieu, ma pauvre Marie, ce sont là des choses que tu savais déjà (29). »

La saine raison de ce brave homme venait naturellement se briser contre la « conviction » de la malade. Et il en arrivera tout autant à ceux qui, sur ce chapitre, voudraient essayer de prêcher la raison. Les paroles de Bricquet, écrites il y a plus d’un demi-siècle, ne sont, maintenant plus que jamais, qu’un pium desiderium, qu’un vœu stérile. Cependant, nous psychiatres, nous avons toujours l’obligation de lancer l’appel aux armes contre toutes ces pratiques et « recherches » spirites, contre cet amusement avec la « subconscience », jeu dangereux pour celui qui n’a pas une culture scientifique ou dont l’esprit est naïvement mystique. Entre les mains du psychologue ou du médecin psychologue, dans le plein jour et la pleine lumière du laboratoire scientifique, la « recherche du subconscient » est pleinement légitime, alors même que ses « mystères » soient rarement très intéressants ou aient rarement quelque valeur. Pour le profane, homme ou femme, doué de ce tempérament nerveux qui souvent conduit précisément au mysticisme, toutes ces pratiques spirites, toutes ces « recherches psychiques » dans la chambre noire, renferment toujours un grave danger ; elles risquent de briser sa vie mentale, de la faire glisser dans le monde mensonger de la maladie mentale, ainsi que nos observations servent à le démontrer.

Notes

(1) « La folie comme toute chose se met au goût du jour », dit LÉVY-VALENSI en parlant de la psychose des spirites. [en ligne sur notre site]

(2) Voir la bibliographie dans l’ouvrage de DUHEM : Contribution à la folie chez les spirites. (Thèse de Paris, 1904.) — LÉVY-VALENSI : Spiritisme et Folie. (L’Encéphale, 1919, I, 696.) [en ligne sur notre site]— DIDE, PEZET, MIRE : Délire systématisé… variété spirite. (Annales méd.-psychol., 1920, 76e année, 269.) [en ligne sur notre site]— HENNEBERG. Arch. f. Psychiatrie, 1901. T. XXXIV, 998 et Berlin. Klin. Wochenschrift, 1919, 873.)

(3) De même les communautés de « parleurs inspirés », etc., ont aussi fourni souvent des recrues à la clientèle de notre service.

(4) Malheureusement, il m’a été impossible de la faire venir chez moi pour un examen plus minutieux.

(5) A la question posée d’après le schéma de l’interrogatoire : « Pourquoi êtes-vous venue ici ? » elle répondit immédiatement : « Je suis un médium écrivant ! »

(6) A la question posée pour savoir le nom du prince, elle répondit une fois « Petterson », mais se reprit immédiatement et dit « Judas ».

(7) Elle sent la visite du prince comme un « chatouillement par en bas », mais elle ne voit jamais ce prince.

(8) Quand elle n’écrivait pas, elle n’avait jamais de mouvements involontaires de la main droite.

(9) Cf. DUHEM, LÉVY-VALENSI. [en ligne sur notre site]

(10) Probablement confusion entre le nom de l’ouvrage et celui de l’auteur de cet article.

(11) Salvator, c’est-à-dire sauveur, libérateur.

(12) Prestidigitateur et magicien bien connu à Copenhague.

(13) J’ai essayé de vérifier l’exactitude de ces communications ; seulement une sur cinq était exacte.

(14) Entre autres choses, à cause de l’absence de ponctuation et du fait que les diverses lettres empiètent les unes sur les autres.

(15) C’est le nom de famille du jeune homme.

(16) Nom du jeune homme écrit en entier.

(17) Remarquer que dans son écriture automatique elle est également polyglotte. Dans le passage reproduit sont quelques mots suédois.

(18) P. JANET. L’automatisme psychologique, Paris, 19 19. — État mental des hystériques. Les accidents mentaux, Paris, 1894. — GRASSET. L’occultisme hier et aujourd’hui, Montpellier, 1908. —HENNEBERG. Ueber Spiritismus und Geistesstorung. (Arch. f. Psychiatrie, 1901. T. 34, 998.) — Alfred LEHMANN. Overtro og Trolddom [Hypercroyance et sorcellerie), I-II, 2e édition. Copenhague, 1920.

(19) Par exemple : terminaison des mots par le même son (i, a, etc.)

(20) Fritz HOLST. Dage i Helvede[Les journées dans l’enfer]. Données provenant de la limite de la vie consciente. Avec introduction par le docteur N.-C. Borberg, Copenhague, 1921. Malheureusement, dans cet ouvrage, d’un style très maladroit, nous ne trouvons pas l’auto-analyse psycho-pathologique qui aurait pu donner à ce livre une plus grande valeur scientifique.

(21) Voir par exemple : Les Journées dans l’Enfer. — Morton PRINCE : The dissociation of a personality. Londres, 1906 (« Sally »).

(22) Cf. GRASSET, LEHMANN, etc. Au sujet des manifestations d’Hélène Smith, voir surtout FLOURNOY ; Des Indes à la planète Mars. Paris, 1900.

(23) Professeur Raymond dans l’observation VI ; cf. les anachronismes extraordinaires rencontrés cher Hélène Smith.

(24) Leçons cliniques sur les maladies mentales. Paris, 1895 (1ère et 2e leçons),

(25) Hospitals-tidende, 1918, p. 529 et suivantes,

(26) L’Encéphale, 1911, 1, 32.

(27) Les Journées dans l’enfer.

(28) Revue neurologique, 1920, 824.

(29) There needs no ghost, my lord, come from the grave, to tell us this. (Hamlet, acte I, scene v.)

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