Apparitions démoniaques. Par Don Bernard Maréchaux. 1898.

MARECHAUXAPPARITIONS0001Don Maréchaux Bernard. Apparitions démoniaques. Article parut dans la revue « Le Monde invisible », (Paris), Première année, 1899, pp. 93-94.

Bernard-Marie Maréchaux (1849-1927). Bénédictin olivétain du monastère Notre-Dame de la Sainte-Espérance de Mesnil-Saint-Loup, Aube (1871/1872-1901 et à partir de 1914). – Assura la charge pastorale de la paroisse du Mesnil-Saint-Loup de 1901 à 1903. – Abbé du monastère de Sainte-Françoise-Romaine à Rome (1903-1914). Quelques uns de ses travaux :
— La réalité des apparitions démoniaques. Paris, P. Téqui, 1899. 1 vol.
— Le démoniaque dans la vie de Saints. Le monde invisible; 1899.
— Apparitions démoniaques. Article parut dans la revue « Le Monde invisible », (Paris), Première année, 1899, pp. 56-56.
— Le merveilleux divin et le merveilleux diabolique. Paris, B. Bloud, s. d. [1901]. 1 vol
— Anges et démons le monde des esprits. Paris : Bloud , 1911. 1 vol.

Les [p.] renvoient aux numéros de la pagination originale de l’article. – Nous avons gardé l’orthographe, la syntaxe et la grammaire de l’original.
 – Les  images ont été rajoutées par nos soins. – Nouvelle transcription de l’article original établie sur un exemplaire de collection personnelle sous © histoiredelafolie.fr

[p. 93]

APPARITIONS DÉMONIAQUES

Dans la dernière séance de l’Académie des sciences psychiques, Mgr Méric a répondu à M. le docteur des Chesnais qu’il suffisait de lire les Bollandistes et les procès-verbaux de la canonisation des Saints pour acquérir la certitude scientifique de la réalité des apparitions corporelles des démons. Nous sommes heureux de reproduire la lettre suivante qui développe la pensée et la réponse de notre président.

Monseigneur,

J’ai lu avec le plus vif intérêt le premier numéro de votre estimable Revue du Monde Invisible, que je crois appelée à rendre les plus grands services à l’Église pour l’éclaircissement des questions mystérieuses qu’elle entreprend de traiter.

Permettez-moi de vous présenter quelques observations sur le débat ouvert par M. le Dr Le Menant des Chesnais, et dont le thème est :

Depuis le Sauveur, y a-t-il des faits bien avérés d’apparitions diaboliques ?

J’ai été fort surpris de l’assertion dc M. l’abbé Le Camus, que cite votre honorable collaborateur : Rien n’indique que Satan ait été vu par Jésus-Christ, dans la fameuse tentation au désert.

Je me demande quels sont les théologiens sur lesquels M. Le Camus appuie son opinion. Les interprètes de marque, que j’ai pu consulter, sont tous du sentiment contraire, qu’ils donnent comme touchant à l’évidence.

Le savant Maldonat dit ; Tous les auteurs, omnes auciores, pensent que le diable s’approcha du Sauveur sous une forme corporelle, et sous une forme humaine.

Jansénius : Que le diable se soit approché du Sauveur sous une forme corporelle et humaine, cela ressort du terme approcher, et de ses colloques avec Jésus-Christ.

Cornélius à Lapide : Satan s’approcha du Christ, ayant pris la forme d’un corps humain, connue uu homme s’approche d’un homme, pour le tenter en l’interpellant d’une voix sensible.

Bien plus, Cornélius s’appuie sur une raison théologique, pour démontrer que Satan n’a pu apparaître qu’extérieurement au Sauveur. II n’avait pas puissance, dit-il, pour affecter et illusionner son imagination : il ne pouvait tenter Jésus-Christ, comme l’enseigne saint Grégoire le Grand, que par voie de suggestion externe. Comment admettre [p. 94] que Salan ait pu illusionner le Sauveur, au point de lui faire croire qu’il le transportait tantôt sur le pinacle du temple, tantôt sur une montagne ? — Si cet argument du savant interprète parait discutable, son sentiment, fondé sur la lettre du texte évangélique, n’en a pas moins d’autorité.

C’est incontestablement aussi le sentiment de Bossuet, dans ses Élévations sur les mystères. Il se demande comment il fut permis à cet esprit impur de toucher à ce corps innocent et virginal, etc. (XXIIe Semaine, Ve Élévation). Dans un opuscule trop peu connu, Réflexions sur l’agonie de Jésus-Christ, le grand évêque se déclare porté à admettre d’après plusieurs célèbres docteurs, et même quelques saints Pères, que Satan « qui lui-même avait tenté Jésus-Christ au désert, fit encore visiblement un dernier effort, lorsquil le vit attaché à la Croix ».

MARECHAUXAPPARITIONS0002

Dans la pensée des graves auteurs que je viens de citer, tout indique, dans le texte évangélique, que Satan apparut visiblement à Notre-Seigneur.

Depuis la venue de Notre-Seigneur, demande M. le Dr Le Menant des Chesnais, y a-t-il des faits bien avérés d’apparitions, diaboliques ?

La réponse me paraît simple.

Que l’on prenne un volume quelconque des Bollandistes, que l’on se reporte à la table au mot daemon, on trouvera relatée toute une série d’apparitions visible du diable à différents saints. Tous ces faits réunis formeraient une liste interminable. Pourrait-on soutenir qu’aucun d’eux. n’est avéré ?

Qu’on lise en particulier la vie de saint Antoine par saint Athanase, la vie de saint Benoit par saint Grégoire le Grand. Chacun sait que ces deux vies sont pleines de récits, d’apparitions diaboliques. Dira-t-on que les deux grands docteurs de l’église ont manqué de critique et de jugement ?

Les légendes du bréviaire relatent plusieurs de ces apparitions, Celle de saint-Agathon mentionne les multiples manifestations du diable, qui se produisirent à Rome lors d’une grande peste qui ravagea la ville.

Plus près de nous, la vie de sainte Frauçoise Romaine nous est donnée comme une lutte continuelle contre le diable qui l’attaquait visiblement, alors qu’un ange la défendait visiblement. Et à ce propos, on peut observer que nier les apparitions sensibles du diable, c’est nier par contre-coup les apparitions sensibles des anges.

Je m’arrête. La thèse que je soutiens trouvera sans doute des champions plus compétents que moi. Je vous livre néanmoins ces notes, dont vous apprécierez la valeur probante.

Veuillez agréer, Monseigneur, l’expression de ma respectueuse considératlou.

Monastère de Soullac (Gironde).                            D. Bernard MARBCHAUX

20 juin 1898.                                           Bénédictin de la cong. olivétaine.

 

 

LAISSER UN COMMENTAIRE