La psychanalyse et la notion de constitution. Par Rudolf Lœwenstein. 1932.

LOEWENSTEINCONSTITUTION0001Rudolf Lœwenstein. La psychanalyse et la notion de constitution. Article parut dans « L’Evolution psychiatrique », (Paris), seconde série, numéro 4, 1932, pp. 55-65.

Rudolf Lœwenstein (1898-1976). Médecin et psychanalyste d’origine polonaise. Fut un acteur majeur dans l’histoire de la psychanalyse. Il fut l’analyste de très nombreux praticiens comme Pierre Mâle, Daniel Lagache et Jacques Lacan, pour ne citer que ceux-là. Il fit une communication très remarquée sur la technique psychanalytique en 1928 à la IIIe Conférence des psychanalystes de langue française. Nous renvoyons pour une bibibliographie plus avancée aux travaux de Alain de Mijolla et Elisabeth Roudinesco.

Les [p.] renvoient aux numéros de la pagination originale de l’article. – Nous avons gardé l’orthographe, la syntaxe et la grammaire de l’original.
– Par commodité nous avons renvoyé la note de bas de page en fin d’article. – Les images ont été rajoutées par nos soins. – Nouvelle transcription de l’article original établie sur un exemplaire de collection privée sous © histoiredelafolie.fr

[p. 55]

Rudolf Lœwenstein.

La psychanalyse et la notion de constitution. 

[p. 56 – 57]

Dans tous les domaines de la psychiatrie auxquels elle s’est attaquée, la psychanalyse a porté les coups les plus durs aux conceptions qui se servent de la notion de constitution. Il en a été ainsi surtout pour les psychonévroses, les perversions sexuelles et les troubles du caractère.

Il convient, pour mettre en relief l’antagonisme existant entre la psychanalyse et la notion de constitution de dégager de ce dernier concept les aspects qui lui sont conférés par les divers emplois qu’on lui fait tenir.

La constitution est un ensemble de caractères inhérants à l’individu, indissolublement liés à lui. Habituellement, les constitutions sont considérées comme ayant été transmises héréditairement, quel que soit le moment de leur apparition chez l’individu ; et les caractères transmis sont considérés comme étant d’ordre somatique. La constitution acquise, terme hybride, est impropre à notre avis.

Le concept de constitution est employé de trois façons différentes :

1° A titre descriptif, « morphologique », pour désigner la présence de certains caractères et mettre en valeur le fait de leur présence simultanée ;

2° Pour désigner une prédisposition à certaines affections ou un terrain sur lequel elles s’édifient plus ou moins nécessairement ;

3° La constitution-explication. C’est ce dernier emploi du terme qui est certainement le plus fréquent et en même temps le plus abusif.

Si une névrose est appelée constitutionnelle (neurasthénie constitutionnelle), c’est qu’on remplace un aveu d’ignorance par un terme savant. Or, habituellement, on attache à ce terme une vertu explicative. En substance on dit par là : un homme est malade parce que telle est sa nature. De même l’explication de certaines névroses, par la « constitution émotive » n’est, au fond, guère plus scientifique que la conception qui caractérisait certains névrosés par le terme « dégénérés supérieurs ». [p. 58]

Or, l’antagonisme entre la psychanalyse et le concept de constitution existe exclusivement lorsque ce concept est employé à titre d’explication.

Le principe fondamental de la psychanalyse en tant que méthode est que tous les faits psychologiques sont déterminés par d’autres faits psychiques.

Ainsi, l’homme sain psychiquement reconnaîtra presque tous ses sentiments et ses pensées comme étant siens, il saura presque toujours leur attribuer leur place dans l’ensemble de sa personnalité, il en connaîtra la cause et le but. Bref, il leur reconnaîtra un sens. Il en est autrement des névrosés : tel obsédé par exemple, a des pensées ou des émotions bizarres, absurdes, qu’il ne reconnaît pas comme étant entièrement siennes, dont il ne connaît ni la cause ni le but, c’est-à-dire auxquelles on ne peut reconnaître le même sens qu’aux pensées des normaux. Or, la démarche essentielle de la psychanalyse est de découvrir le sens caché des manifestations psychiques particulières qui sont les symptômes des névrosés. Ce n’est là, de la part de la psychanalyse, qu’une application dans le domaine psychologique des principes de l’explication scientifique dans le monde physique (1). Car le sens d’un fait psychologique en est une qualité aussi essentielle que la masse et le volume des qualités essentielles des objets du monde physique.

L’explication d’une obsession ou d’une phobie, par exemple, équivaut ainsi à en déterminer le sens.

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Ce même plan méthodologique, la psychanalyse l’applique non seulement à un symptôme isolé, mais à l’état psychique entier d’une personne qui présente, par exemple, des obsessions. Et en cela elle est en opposition avec les conceptions, avec l’esprit même que font naître les conceptions, telles que celles qui se contentent d’expliquer des accidents névrotiques par des états de fatigue, de surmenage, souvent postulés ad hoc. On ne saurait mieux discriminer ces deux points de vue que ne le fit Freud en répondant à certaines objections visant son explication des actes manqués. Il imaginait un homme, dévalisé la nuit par des bandits se plaignant au commissariat d’avoir été volé par la solitude et l’obscurité. Tout le monde sait que si la nuit et la solitude favorisent les méfaits des bandits, des vols se commettent aussi de jour et dans des endroits fréquentés.

Il en est ainsi des névroses. Leur éclosion peut être favorisée par la [p. 59] fatigue et le surmenage comme par une constitution spéciale du sujet, mais ne suffisent pas à provoquer ni à expliquer cette névrose,

Or l’antagonisme qui existe entre la psychanalyse et les conceptions de constitutions est dû surtout à l’emploi abusif du concept de la constitution pour l’explication de faits, à la confusion entre les conditions favorisantes et prédisposantes et les causes des névroses, Cette confusion, des médecins la commettent journellement aux dépens et au préjudice de leurs malades névrosés. Car si un médecin explique un brusque changement de caractère chez un garçon jeune s’accompagnant de violentes crises de rage et de colère contre tout son entourage, par la fatigue, qui provoquerait de l’agacement et de l’irritabilité, ce médecin commet non seulement une erreur de jugement, mais, plus, se prive de moyens d’aider son malade,

Il est certain, d’autre part, que le concept de la constitution n’est pas toujours abusivement employé à titre d’explication simpliste. Ce concept met en relief les faits indubitables de la transmission héréditaire de certains caractères somatiques et psychiques, Or, avant d’aborder la discussion sur le rôle de ces faits dans les névroses, nous aimerions résumer rapidement les principales notions de l’étiologie et de la pathogénie des névroses, telles que les a décrits la psychanalyse.

La névrose est due à un conflit psychologique entre des tendances refoulées et des forces refoulantes. Les manifestations, ces symptômes sont des formations de compromis et servent à satisfaire aux deux exigences, celles du refoulé comme celles du refoulement. Les tendances refoulées, les forces de l’inconscient du soi ou ça, sont de nature sexuelle et agressives. La névrose est provoquée par une « frustration » imposée soit par le monde extérieur soit par le sujet lui-même ; les désirs inassouvis de par la frustration subissent une régression, c’est-à-dire qu’ils s’associent à des désirs infantiles refoulés (les fixations infantiles) et les réveillent. Le refoulement se dirige, dès lors, contre ces désirs infantiles inconscients, c’est là que s’éveille le conflit pathogène, Or, les points de fixation de la libido exercent une attraction régrédiente d’autant plus grande sur les désirs réprimés de l’adulte que ses fixations ont été plus importantes, Le mode de formation des points de fixations peut, schématiquement, être conçu de ces deux façons : une pulsion partielle dans l’enfance peut être ou bien renforcée démesurément ou bien refoulée trop brutalement. Dans le premier cas qui, normalement, doit subir une certaine refonte pour faire partie de la vie sexuelle de l’adulte, elle formera un centre [p. 60] d’attraction pour toute pulsion refoulée ultérieurement et sera une source soit de tendances perverses soit de conflits pathogènes. Dans le cas d’un refoulement brutal, la pulsion refoulée attirera dans le refoulement toutes les tendances qui se rattachent à elle ; elle formera donc ainsi une source de conflits pathogènes.

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Les recherches de ces dernières années sur les forces de refoulement, c’est-à-dire l’étude du moi ou du surmoi, ont beaucoup compliqué nos connaissances sur la pathogénie des névroses. Nous pouvons cependant les négliger pour confronter les conceptions psychanalytiques et celles découlant de la notion de constitution. D’ailleurs, la conception étiologique de la psychanalyse, la notion de l’étiologie sexuelles des névroses reste inchangée.

Ainsi, si les conceptions pathogéniques de la psychanalyse ainsi que sa méthode thérapeutique sont entièrement psychologiques, la notion étiologique tient compte du facteur qui est à cheval sur les domaines organiques et psychiques — l’instinct sexuel. D’ailleurs, la simple observation du rôle de la puberté et de la ménopause sur la formation et l’évolution des névroses suffirait pour mesurer l’importance du facteur somatique.

La notion de constitution peut intervenir, dans le schéma que nous venons de tracer, de la structure des névroses à deux endroits :

1° Etant donné que l’homme sain subit, lui aussi, des frustrations continuelles sans que sa libido inemployée prenne pour cela le chemin de la régression et du refoulement, on peut concevoir que le névrosé est atteint d’une incapacité foncière, constitutionnelle de maintenir en suspens une partie de sa libido inassouvie. Ce point de vue, pour probable qu’il soit, n’est pas établi avec certitude. Il existe, d’autre part, certainement des variations individuelles de l’intensité du « besoin d’amour » qui joue un rôle considérable dans la pathogénie des névroses (2). Par contre, nous savons que la libido inassouvie prend le chemin de la régression, d’autant plus facilement que les points de fixation infantiles sont plus nombreux ou plus importants. Nous arrivons ainsi à envisager :

2° La possibilité d’un renforcement constitutionnel de certaines pulsions [p. 61] partielles et de points de fixation en dérivant. L’étude analytique des névroses confirme cette hypothèse. Ainsi, par exemple, la névrose obsessionnelle est caractérisée par la prédominance dans ses symptômes de deux pulsions partielles : le sadisme et l’érotisme anal. Les conflits pathogènes dans cette névrose ont presque toujours comme composantes libidinales principales l’une ou les deux de ces pulsions partielles. Ces faits, comme d’ailleurs d’autres encore, démontrent que la névrose obsessionnelle est édifiée sur des points de fixation du stade sadique-anal (3), c’est-à-dire que des fixations à ce stade créent une prédisposition à cette névrose (42), à condition, toutefois, que cette fixation aille de pair avec l’existence d’une évolution objectale de la libido, ce qui crée l’ambivalence et la sévérité du surmoi si caractéristique de cette névrose. Cette prédisposition peut être héréditaire, c’est-à-dire constitutionnelle, ou bien provoquée accidentellement. Ainsi, le psychanalyste Abraham (de Berlin) citait un cas très frappant de prédisposition à la névrose obsessionnelle d’ordre constitutionnel : il avait soigné un obsédé dans la famille duquel, depuis deux générations, presque tous les membres étaient des obsédés et chez lesquels les intérêts et préoccupations anales et excrémentielles jouaient un rôle extraordinaire, tels que conversations continuelles sur la nature et le nombre de selles de chaque membre de la famille, etc. Ce cas, pour explicite qu’il puisse paraître, recèle cependant toutes les difficultés inhérentes à ce problème. Il est, en effet, vraisemblable qu’une pareille intensité des intérêts familiaux pour les questions anales a pu être cultivée, ainsi que dans d’autres cas sont cultivées des fixations au stade anal par de fortuites maladies intestinales chez l’enfant.

En effet, on ne saurait jamais assez insister sur les rôles des facteurs accidentels de la toute première enfance, à tel point, qu’à notre avis, il est impossible constitution [sic pour la suite] particularités psychologiques d’un individu paraissent constitutionnelles qui ne sont, en réalité, que les résultats d’événements ou de situations psychologiques de la toute première enfance à tel point, qu’à notre avis, il est impossible d’affirmer la nature constitutionnelle ou innée de telle particularité psychologique, d’un trait de caractère ou de comportement, avant d’avoir procédé à [p. 62] une psychanalyse approfondie du sujet. En n’envisageant que schématiquement les principales pulsions partielles dans l’évolution de la libido, la psychanalyse démontre, avec toute la netteté voulue, que des influences de l’entourage peuvent déterminer des particularités psychologiques qui sont dans la sphère d’influence de ces pulsions. Ainsi, pour ne citer que quelques exemples : un intérêt excessif apporté aux fonctions excrémentielles et à la zone anale de l’enfant, de même que des interdictions brutales dans ce domaine peuvent créer des points sensibles pour l’évolution ultérieure de l’individu ; le comportement de l’entourage en présence de l’agressivité de l’enfant peut avoir des suites que les parents ne prévoient, habituellement, pas du tout. Il est, d’ailleurs, important de tenir compte de ce fait que les événements qui ont ultérieurement une grosse répercussion sur l’évolution de l’individu passent inaperçus ou sont complètement méconnus des parents ou éducateurs non avertis.

La psychanalyse nous révèle, de plus, l’existence de deux ordres de faits dont la méconnaissance fait croire à des facteurs constitutionnels là où leur rôle doit être considéré comme restreint, sinon comme inexistant.

Ce sont d’abord les cas très nombreux où l’identification de l’enfant avec l’un de ses parents, peut faire penser à une transmission héréditaire de certains traits psychologiques. Ensuite, c’est le rôle de la névrose parentale dans la provocation d’une névrose chez les enfants et cela soit grâce aux troubles apportés par la névrose dans la vie familiale, soit grâce à l’empreinte que laisse l’affectivité troublée des parents sur celle des enfants. Au lieu d’innombrables exemples, nous aimerions citer seulement l’avis d’une psychanalyste d’enfants : le meilleur moyen de guérir une névrose d’enfant est souvent d’analyser ses parents ; dès que ceux-ci sont guéris, la maladie de leur enfant disparaît, souvent, comme par enchantement (Mme S. Morgenstern).

Les résultats thérapeutiques obtenus par la psychanalyse dans des cas de névrose sont souvent des témoignages confirmant d’une manière inéquivoque ces résultats des recherches psychanalytiques. Ainsi, l’on voit des obsédés « émotifs » ou « scrupuleux » soignés à temps et bien guéris se transformer en êtres parfaitement équilibrés et même agressifs, et présentant alors seulement par cette agressivité leur véritable aspect constitutionnel.

II existe un autre domaine, celui des perversions sexuelles, où les facteurs constitutionnels paraissent expliquer tout. Là aussi, la psychanalyse montre que les choses ne sont pas si simples. Considérons, par exemple, les cas très [p. 63] nombreux de perversions sexuelles caractérisées par l’attrait de certaines parties du vêtement féminin comme les jarretières ou les chaussures. On ne peut raisonnablement admettre dans ces cas l’existence d’instincts innés spéciaux dont l’objet sont des chaussures féminines à talons Louis XV. Cependant, Freud admet chez ces fétichistes, une faiblesse constitutionnelle de la génitalité. De même pour ce qui est de l’homosexualité : on peut fort bien admettre, étant donné la nature bisexuelle de l’être humain, une homosexualité passive, à caractère féminin, constitutionnelle chez l’homme et une homosexualité virile constitutionnelle chez la femme. Par contre, la nature constitutionnelle des cas d’inversion active chez l’homme si fréquemment considérée comme telle, nous paraît d’autant moins vraisemblable que l’objet de l’instinct sexuel paraît être assez indépendant de son but (Freud). De sorte que le choix exclusif d’objet de même sexe chez ces invertis ne peut être considéré que comme déterminé par des phénomènes psychologiques inconscients tels que les décrit Freud dans son travail sur Léonard de Vinci (5). Tout au plus, pourrait-il envisager dans ces cas un renforcement constitutionnel du narcissisme chez ces invertis. De façon générale, l’étude psychanalytique des perversions, montre bien l’existence de facteurs constitutionnels, tels que le renforcement des pulsions partielles déterminées, mais elles nous démontre, d’autre part, que ces facteurs peuvent, dans d’autres cas, aboutir à un état morbide différent, tel qu’une névrose, dont les symptômes seront les « négatifs » des pulsions perverses inconscients. De plus, l’existence de pulsions partielles renforcées n’explique, naturellement, ni la pathogénie des névroses ni celle des perversions sexuelles.

La psychanalyse dans l’état actuel de nos connaissances, ne peut déterminer nettement, dans tous les cas, pourquoi certains événements dans l’enfance comme à l’âge adulte, conduisent tel individu à la névrose ou à la perversion sexuelle et permettent cependant à un autre sujet de rester relativement sain.

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Pourquoi dans un cas apparaît une forme de névrose plutôt qu’une autre et dans un autre cas une perversion. La psychanalyse doit avoir recours à des facteurs quantitatifs, à la notion d’une prédisposition, d’un terrain, comme d’ailleurs toute science biologique, toute science dont l’objet est un organisme [p. 64] vivant, mais elle s’astreint et réussit parfois à préciser, à circonscrire le facteur constitutionnel et à décrire son rôle et son point d’application exacts ; dans les cas où ces facteurs lui échappent, elle admet bien l’existence de quelque prédisposition, mais à titre d’inconnue, que des recherches ultérieures arriveront à décrire.

Le troisième emploi de la notion de constitution en psychiatrie est purement descriptif « morphologique » et sert souvent à l’établissement de types caractérologiques. L’intérêt de la légitimité de cet usage de la notion de constitution est évident. Dans le domaine plus étroit de la caractérologie, la psychanalyse n’a certainement pas dit son dernier mot. Cependant, là aussi, elle a apporté des conceptions et des points de vue nouveaux. Pour ne citer que les travaux de Freud, mentionnons la fréquente association de trois traits de caractère : l’entêtement, l’avarice et la « manie de l’ordre », décrits par Freud comme étant de formation réactionnelle à l’érotisme anal. Tout récemment encore, Freud décrivit (6) trois types caractérologiques d’hommes sains en se servant de la conception de la libido : les types « érotique-narcissique »,

« érotique-obsessionnel », et « obsessionnel-narcissique ». Le terme « obsessionnel » sert ici à indiquer la dépendance de l’individu de son surmoi, c’est- à-dire sa dépendance de personnes jadis aimées, ses parents. La discussion de cette classification des hommes en « types libidinaux » dépasserait les cadres qui nous sont assignés. Nous nous bornons donc simplement à la mentionner, à titre d’exemple de typologie psychanalytique, voisine, par conséquent, d’autres recherches utilisant la notion de constitution.

Essayons de résumer la position de la psychanalyse vis-à-vis de la notion de constitution en psychiatrie et plus particulièrement dans le domaine des névroses et des perversions sexuelles (7).

La psychanalyse en tant que méthode thérapeutique est essentiellement psychologique, comme l’est aussi le champ de son investigation. Par contre, dans la conception qu’elle se fait des névroses comme de l’évolution psychologique normale elle tient largement compte des facteurs organiques. L’édifice théorique de la psychanalyse, la « théorie de la libido », tient compte du [p. 65] facteur à la fois organique et psychologique : l’instinct, notion fondamentale de la théorie psychanalytique.

Les recherches psychanalytiques s’opposent à l’explication simpliste des névroses ou des troubles sexuels par l’application de l’étiquette « constitutionnels », qui n’est, d’ailleurs, dans ce cas-là, qu’aveu d’impuissance thérapeutique. De façon générale, la nature constitutionnelle et héréditaire de certains cas de névroses ou de traits psychologiques particuliers ne peut être affirmée sans psychanalyse préalable du sujet, les influences parentales sur l’affectivité de l’enfant en bas âge pouvant faire croire à une transmission héréditaire souvent inexistante en réalité.

La psychanalyse admet, évidemment, l’existence de facteurs constitutionnels, mais elle réduit considérablement leur portée et voit en eux, surtout, des facteurs prédisposants à la névrose et aux troubles sexuels, ou bien à une névrose ou perversion déterminées. De plus, la psychanalyse essaye de préciser la place et le rôle exacts de ces facteurs dispositionnels et doit souvent admettre leur existence à titre d’inconnues. Cependant, là où elle réussit à préciser un facteur dispositionnel comme, par exemple, en mettant en relief le point de fixation anal-sadique dans la névrose obsessionnelle, la psychanalyse apporte une contribution importante à l’étude des constitutions.

 

NOTES

(1) Nous négligeons intentionnellement le problème métaphysique du déterminisme.

(2) Il est possible pour que la présence de grandes névroses parmi les hérédosyphilitiques, signalée par Freud (le Cas de Dora, Revue franç. de Psychanalyse, III, N° 1), puisse créer ou favoriser cette incapacité de subir des frustrations ou intensifier le « besoin d’amour ».

(3) La fréquente association de ces deux pulsions partielles, le sadisme et l’érotisme anal est due, d’après Freud, à la simultanéité de leur évolution chez l’enfant, et non pas à une parenté entre elles.

(4) FREUD : La prédisposition à la névrose obsessionnelle. Trad. franç. Pichon et Hösli. Rev. franç. de Psychanalyse.

(5) FREUD: Un souvenir d’enfance de Léonard de Vinci. Trad. franç. Marie Bonaparte, N. R. F. Voir aussi VINCHON et NACHT : Psychanalyse d’un cas de névrose homosexuelle. Rev. franç. de Psychanalyse, Tome IV, N° 4.

(6) Uber libidinose Typen, Internat. Zeitschr. für Ps.A. 1931, N° 4.

(7) La notion de la Constitution paranoïaque nous paraît si complexe qu’elle mériterait, à notre avis, une étude spéciale.

 

 

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3 commentaires pour “La psychanalyse et la notion de constitution. Par Rudolf Lœwenstein. 1932.”

  1. bernier thfdLe mardi 24 novembre 2015 à 20 h 13 min

    bonjour!

    je viens de terminer la refonte entière d’un site web, qui s’intitule « une lecture de la schizophrénie psyrespirans ».

    présenté sous une forme littéraire, il traite aussi et cependant des concepts propre à une compréhension fine de ce qu’est une psychose.

    c’est là un travail achevé dont je vous recommande la lecture, et qui amène la clarté des interprétations de la psychanalyse,
    sur le sujet complexe des limbes de la folie.

    avec tout le respect qu’il vous manifeste, l’auteur.

  2. Michel ColléeLe vendredi 27 novembre 2015 à 16 h 54 min

    Bonjour, Je ne manquerais pas de signaler vitre très intéressant site Internet sur mon propre site dans les prochaines jours. Bien cordialement. Michel Collée.

  3. Michel ColléeLe samedi 28 novembre 2015 à 11 h 52 min

    Bonjour (suite). Après avoir lu attentivement une parie de votre site, j’ai mis votre adresse sur mon mur FB hier soir, et je tiens à voussoir qu’elle été vivement appréciée et largement partagée. Je ne sais comment l’inscrire sur mon site Internet. J’y réfléchi. N’hésitez pas me contacter pour toute autre demande. Bien à vous.