Jourdain Guibelet. Scavoir si les démons ont semence de laquelle l’homme puisse estre engendré ; opinions diverses touchant les demons incubes & succubes… Par Jourdin Guibelet.

Jourdain Guibelet. Scavoir si les démons ont semence de laquelle l’homme puisse estre engendré ; opinions diverses touchant les demons incubes & succubes. D’où peut estre provienue cete erreur de la generation par les demons. L’homme ne peut estre engendré que de l’homme. Chapitre XVIII de son ouvrage : Trois Discours Philosophiques. Le I. de la comparaison de l’homme avec le monde. Le II. du Principe de la génération de l’homme. Le III. de l’Humeur Melancholique. Mis de nouveau en lumière par…, A Evreux, Chez Antoine le Marié, 1603, 1 vol.in-12, (12), 286 feuillets, 

 

Jourdain Guibelet est un médecin Normand, supposé né à Evreux (Eure) où il exerça la médecine à la fin du du XVIe siècle.  Il mourut le siècle suivant. Jourdain Guibelet.
On a de lui :
Trois Discours Philosophiques. Le I. de la comparaison de l’homme avec le monde. Le II. du Principe de la génération de l’homme. Le III. de l’Humeur Melancholique. Mis de nouveau en lumière par…, A Evreux, Chez Antoine le Marié, 1603, 1 vol.in-12, (12), 286 feuillets, (8).

Les [p.] renvoient aux numéros de la pagination originale de l’article. – Nous avons gardé l’orthographe, la syntaxe et la grammaire de l’original.
 – Par commodité nous avons renvoyé les notes originales de bas de page en fin d’article. – Les images sont celles parues dans l’article original. – Nouvelle transcription de l’article original établie sur un exemplaire de collection privée sous © histoiredelafolie.fr

[feuillet 209/2]

SCAVOIR SI LES DEMONS ONT SEMENCE, de laquelle l’homme puisse estre engendré ; opinions diverses touchant les demons incubes & succubes. D’où peut estre provienue cete erreur de la generation par les demons. L’homme ne peut estre engendré que de l’homme.

CHAPITRE XVIII.

Apres avoir longuement discouru & prouvé que la semence n’est point animé : ue autre difficulté se présente, pour estre examinée à son tour. Sçavoir si les Demons incubes & succubes peuvent charnellement se coupler avec les hommes, dont s’ensuive la generation d’un homme. Quelques-uns ctoyent que la conionction, ou copulation charnelle des Demons avec les hommes est impossible, attendu qu’ils n’ont point de corps, & que n’estant point composez des élements, ils ne peuvent avoir le plaisir de l’attouchement. S’ils ne reçoisent point de plaisir en cete action, il fault, disent)ils, qu’il soient induicts à cela, ou pour mal faire, ou pour la necessité de la generation. Pour mal [feuillet 210/1] faire ils ont assez de moyens sans celuy-là. Ioint qu’ils ne peuvent induire les femmes à se coupler déreglement avec les hommes, la compagnie desquels leur apporteroit davantage de plaisir. Non la necessité, car il n’est pas besoin d’engendrer les Demons, uis qu’ils sont incorruptibles, n’estant la generation à autre fin, que pour entretenir & conserver les especes des choses perisabkes. Ny de produire des hommes en cete maniere, veu que les hommes de leur part si employent asssez, & que l’espece ne peutperir, faulte de s’adonner à la propagation. Cassianus semble avoir esté de cet advis, Iehan Chrysostome, Philastrius, Iules Scaliger, & un imposteur Alemand qui a écrit de l’imposture des diables. (1)

Plusieurs autres tiennent qu’ils peuvent avoir afaire avec les hommes @ engendrer, mais entre eux il y a encore de la diversité. Les Ægyptiens soustenoient obstinement qu’il n’y a point de succube, mais seulement des incubes. Quelques autres qu’il y a des succubes & des incubes, & qu’ils engendrent de leur semence  propre, ayant la compagnie des [feuillet 210/2] hommes. Cete opinion a esté suivie par Iosephe, Justin Martyr, Tertullian, Athenagoras, Clement Alexandrin, Marc d’Ephese, & Franciscus Georgius. Ceux qui croyent que les Demons sont immateriels, & qu’ils n’ont point de corps, soustiennent qu’ils peuven engendrer seulement par le moyen d’unc semence empruntée, & qu’un même Demon se faict succube premierement, afin de recevoir la semence de l’homme,pour la jetter puis apres ayant prins forme de Demons incube) dans la matrice  de la femme, de laquelle il aura la compagnie. Sainct Thomas est de cet advis, Albert le Grand, Hector Boethus, Simphorian Champier, Spranger) Cardan & autres. Ceux-cy se fortifient de témoignages & d’expériences, & disent que ce que les Poëtes ont  autrefois raconté des Faunes, Satre, Silvains, Nymphes Dieux & deesses, n’estoient que Demons incubes & succubes. Qu’un Demon incube nom Jupiter fut pere d’Hercule. Qu’Æneas fut engendré d’Anchise & d’un succube. Romulus d’un incube & de Rhea Silvia. Que le serpent qui coucha avec Olympia fême de Philippes, [feuillet 211/1] estoit un Demon incube qui fit pere d’Alexandre. Que Merlin en Angleterre fut ainsi engendré. Balderus entre les Gots. Que les Huns tirent elur origine de quelques Demons incubes, qui engrosserent certaines femmes de la Gothie. Que Mellusine estit un Demon succube, & que Servins Tullius Roy des Romains fut fils d’un Demon incube laris familiaris filius, comme dit Pline. L’histoire en est assez notable. Ils disent qu’Ocrisia estant assise pres le feu,s’apparut à elle un membre viril, qui saillit de dessous les cendres & l’engrosser. Ainsi Simon le magicien se vantoit d’estre fils de Rachel, lors qu’elle estoit encore vierge, & d’un incube. Et que l’on a attesté le semblable de Martin Luther, qui a esté un des monstres de notre siecle. Mais pour plus grande foy, ils produisent outre cela le histoires qui ensuivent.

Hector Boethe dit qu’en Escosse, une jeune Damoiselle, qui ne voulut entendre à se marier, eut affaire avec un Diable, dont elle devint grosse, & acoucha en fin de temps, d’un monstre hideux & effroyable à la veille, lequel fut jetté au feu & [feuillet 211/2] bruslé oar les sahes femmes, de peur que cela estant cognu, ne tournast au deshonneur de toute la race.

Helinand recite que dans la Diocese de Cologne, est un magnifique chasteau sur le Rhin, nommé Innamen, & que plusieurs Princes qui s’estoient un jour assemblez en ce lieu, apperceurent sur le fluve une chaisne d’argent attachée à son col, de laquelle menée à bord, sorti un soldat inconnu à tous les assistants ; puis le Cigne avec sa nasselle se remit au coulant de la riviere/ Ce soldat se maria depuis & eut des enfants ? Mais quelque temps apres, el Cigne s’estant representé avec sa nasselle, il rentra dedans, & onc depuis ne fut veu d’aucun. On tient que de ce Demon sont sortis les Ducs de Cleves, Comme de Mellusine, les Contes de Poitou.

Godefroy d’Authun faist mention d’un jeune homme de la Sicile fort bon nageur, lequel se bagnant en la mer, sur le coomencemeny de la nuict au clair de Lune, prist par les cheveux une femme qu’il pensoit estre l’i-un de ses compagnons, [feuillet 212/1] & que l’ayant tirée au rivage & interrogée, elle ne profera iamais aucune parole. Nonobstant qu’il la mena ches soy & la print à femme. Mais quelque espace de temps apres, comme quelqu’un luy reprochast d’avoir épousé un Demon ou un fantosme, il tira une espée en presence de ceuila, la menaçant de tuer l’enfant qu’ils avoient eu ensemble, si elle ne parloit & declaroit son origine. A quoy elle fit cete réponse. Melheur sur toy miserable, qui pour m’avoir contrianste de parler, perds une femme qui t’estoit grandement utile & necassaire. Si tu eusses peu porter patiemment ce mien silence, ie fusses demeurée avec toy pour ton profit. Mais puis que tu m’a forcée à cela, tu ne me verras plus desormez, & à l’instnt elle disparut.

Quelques-uns adioustent pour raisons, que telle generation par les Demons n’est point hors de raison, veu qu’on tient que certains poissons naturellement sont le semblable, quand de semence qu’ils recueillent des corps d’hommes morts jettez dans la mer, ils engendrent certains poissons qui portent figure d’homme. Davantage [feuillet 212/2] puisque l’homme peut estre engendré de vapeurs oud’exhalations, selon le témoignage d’Heraclides, qui dit que de son temps, un homme tombe de la moyenne region de l’air, comme un lyon en la Peloponesse, & un beuf du temps & en la presence d’Avicenne. Pourquoy tiendrons nous pour impossibleque l’homme soit engendré par un Demon de semence d’homme empruntée, & jettée encor dans la matrice de la femme ?

Mais nonobstant yout cela= Il me semble que l’opinion de ceux là est la meilleure & ka plus certaine qui croyent que telle generation par les Demons esu impossible. Nous confessons bien qu’ils peuvent avoir copulation avec les hommes, soit qu’ils trompent l’imaginative, ou qu’ils se servent de corps empruntés en cete conjonction : Mais nous nyons du tout que de là puisse reüssir aucune generation. La raison est que s’ils engendrent, il est necessaire que ce soit de leur semence propre, ou de semence empruntée. De dire que deux mesmes ils ayent semence, c’est une ignorance, eu égard qu’estant substances immaterielles, ils ne peuvent avoir cet excrement qui est composé [feuillet 213/1] de sang & d’esprit. Ioint que quand cela leur seroit accordé, le Demon incube produiroit plustost  son semblable, ou quelque substance moyenne entre l’homme & le Demon, comme pour estre le mulet entre le cheval & l’asne, que d’engendrer un homme simplement, ce que toutefois nous ne voyons point, si nous ne prenons les demy-dieux de la Poësie pour argent contant. De vouloir d’ailleurs attribuer aux Demons la faculté de transporter la semence de lieu en autre, sans diminuer la vertu generatrice & le principe qu’elle contient. C’est chose où ie ne vous aucune raison, veu que les hommes memes, qui ont la partie genitale trop longue, font trouvez inhabiles au fait de la generation, par ce qu’en si long chemin la semence se refroidit & le principe se debilite. Si cela est possible croyons par mesme moyen ce que dit Auerrois de cette qui conceut dans le bain : & tenons pour histoire la fable de cette autre, qui eut un enfant engendré de neiges au lieu de semence. Albert le grand dit, que la partie genitale de la femme est tellement fœconde, que la semence [feuillet 213/2] estant espandue dedans, elle produit infailliblement. Mais ce produict est une réverie indigne d’un tel personnage, & fondée sur quelques contes de vieilles, plustost que sur la raison. Chaqu’un advouë que l’homme qui est le plus parfait entre les animaux, a par mesme moyen une generation plus parfaite & plus accomplie que tout autre ? Il ny à point d’apparence donc que les Demons quoy que scavans, experimentez de longue main, & habiles à effectuer promptement beaucoup de choses que nous tenons estranges & &impossibles, puissent atteindre à ce chef d’œuvres : Davantage tous les témoignages qu’ils apportent pour fortifier l’autre opinion, ne sont que fables & contes apostez. Les Huns, Simon Mahus, Merlin, Geuffroy à la grand dent, Balderus, ou n’ont point esté du tout, ou ont esté engendrez comme les autres hommes. Telles impostures estoient bonnes du temps que le monde estit au berceau, pour couvrir & cacher les adulteres, & conserver l’honneur des filles qui s’abandonnoient à leur plaisir. Mais maintenant que le monde est hors de page & deniaisé plus [feuillet 214/1] plus que iamais, telles inventions sont jugées vaines & ridicules, & tant s’en faut que de ce temps nous en ayent eu aucuns exemples, que la pluspart ne croyent pas qu’il y ait des Demons. C’est la question que fait Varton qui vivoit sur la fin du regne superstitieux des Demons. Pourquoy Jupiter, dit-il que les Poëtes tiennent avoir esté extremement lascif, a-t-il desisté d’avoir des enfans ? Est-ce point, qu’il est parvenu à l’an soixantiesme de son âge, & que la loy Papie a mis une bride à sa volonté ? Utrum sexagenariuq factus est, & illi lex Papia sibulam imposuit ?

Quant aux raisons qu’ils apportent, elles sont tellement indignes d’estre mises en ieu, que ie fais scrupule de les refiter ? La premiere tirée d’une maxime de Paracelse, pourroit-elle estre qu’a l’advantage des Deons, veu que cet imposteur proteste dans ses œuvres, que le diable a esté son precepteur en Medecine ? Si nous croyons que la semence d’un corps mort, peut estre produit un poissonde forme d’homme. Croyons par mesme moyen avec des sots, que le diablepeut estre engendré d’ube racine de [feuillet 214/2] Mandragore. Pour le regard de ce que dit Heraclides, nous devons tenir cela comme du tout faux, & comme inventé pour confirmer l’opinion de ceux qui soustenoient qu’il y a un monde habitable dans la lune. Ou bien les Deons avoient transporté ce corps en l’air, pour puis apres le laisser tmober & nous abuser par ce moyen.

Nous avons des histoires certaines de nostre siecle, pour preuve de la coplulation des incubes & des succubes avec les hommes, mais que la generation s’en soit ensuivie, il n’en est point de nouvelles.

Iacques le Roux Chirurgien raconte qu’en ville de Constance en Allemaigne, une servante nommée Magdaleine eut la compagnie du diable, dont elle devint grosse. Mais luy ayant donné congé selon le sainct & loüable conseil des supérieurs de l’Eglise, elle fut tellement affligée, qu’elle pensoit à chaque moment estre au terme de son accouchement. En fin comme les sage-femmes estoient ordinairement appellées à cette affaie, elle se delivra, non d’un enfant, mais d’un amas de plusieurs ordures, de clous, de morceaux de bois, verres cassez, [feuillet 215/1] cheveux, estoupes, os, pierres, ferrailles, & choses semblables qu’elle rendit par la matrice.

Le mesme autheur témoigne, qu’une certaine fille receut le diable à coucher avec elle en forme d’homme, dont peu apres elle yomba en telle maladie, que la matrice & entierement toutes les parties genitales luy devinrent gangrénées ; & quelques remedes qu’on apportait contre ce mal, on ne peut empescher que les aynes & toutes les parties  voisines ne luy cheussent de pourriture. Insi fut traicté le serviteur d’un boucher qui allant par pays, rencontra un Demon en habit d’une jeune femme belle & agreable, avec laquelle il eut affaire, ignorant qu’elle fust un Demon. Peu apres il eut une telle inflammation aux parties secrettes, qu’elles luy devinrent totalement ulcérées. D’où nous pouvons conjecturer, q’ils se servent de corps mort pour se iondre avec les hommes, & que de là provient cette corruption : Ce qui n’advient toutefois qaund ils trompent l’imaginative. Nous avons pour confirmer cete opinion, que tous les sorciers [feuillet 215/2] & sorcieres, qui ont confessé en jugement avoit eu affaire avec le diable, ont attesté qu’il est extremement froid au toucher ; & que la semence qu’il rend en l’acte de l’accouplement retient cete mesme qualité. Coniecture certaine que la generation ne peut s’ensuivre de tel embrasement, attendu que la chaleur celeste de la semence qui repondà l’élement des estoilles, selon Aristote, est un fondement tellement necessaire, que sans icelle il ny à point de generation.

Nous concluons dons vace Ulricus Molitor, Peterius & autres, que les Demons ne peuvent engendrer, encore qu’ils ayent affaire avec les hommes. Nous rejettons les opinions premieres pour estre du tout banies, avec les sornettes des Rabins, quidisent que les Demons incubes & succubes prindrent naissance de la semence d’Adam, en cent trente ans qu’ils s’abstint de la compagnie de sa femme, apres le meurtre commis par Cain, en la personne d’Abel son frere. Si les uns croyent que les hommes peuvent estre engendrez de Demons, & les autres que les Demons soient produits de semence d’homme [feuillet 216/1] comment en cete sorte contrarieré pourrons-nous asseoir quelque jugement ? Les Demons ont esté crées au commencement du monde en mesme nombre qu’ils sont auiourd’huy ; ils sont perpetuels, incorruptibles, & sans aucun corps s’il n’est emprunté, & par consequent sans aucune semence, si elle n’est pareillement empruntée. Resulte donc qu’ils sont inhabiles au fait de la generation.

Deux choses à mon advis, ont donné entrée à cette opinion de la generation par les Demons. La premiere un passage de Moyse mal entendu , quand il dit que les fils de Dieu ayants recogneu la beauté des filles des hommes, prindrent à femmes celles qu’ils choysirent entre toutes. Tertullian, Iospehe, Iustin Martyr ont entendu par les fils de Dieu, les Anges contre toute apparence. Aben Ezra interprete, les hommes vertueux. Raby Kimby explique, les hommes de grande stature, selon la maniere de parler des Hebrieux, qui nomment les haultres montagnes, les montagnes de Dieu. Et semble que cete intelligence soit conforme à la verité, eu égard que l’écriture adjouste [feuillet 216/2] puis apres, que de cete conjonction des fils de Dieu vec les filles des hommes nasquirent les Geants.

L’autre est une maladie nommée εφιάλτης incubus coquemare, qui a la verité est tellement estrange, que celuy qui en est saisi, pense estre suffoquer par un Demon. Ce mal prend principalement au commencement du dormir, quand quelques vapeurs épesses & grossieres portées des parties inferieures, principalement de l’estomach au cerveau, bouchent les nerfs servent à la voix & à la respiration. Au moyen dequoy le malade a opinion d’un pesant fardeau sur la poitrine, ou d’un Demon qui vient faire force à s pudicité. De verité ce mal peut estre causé par un Demon. Toutefois le vulgaire qui ignore les causes des choses, & qui ne s’arreste qu’à l’apparence exterieure, croit que ce sont touiours esprits qui apportent telles maladies. Pline a suivy l’erreur du vulgaire en ce qu’il nomme ceste indisposition faunorum ludibrium, le passetemps des fées. Nous lisons de ce subiect une histoire assez plaisante, d’un faict que raconte un Medecin de ce temps estre [feuillet 217/1] nagueres advenue en un couvent du pays d’Auvergne. Ce medecin ayant esté appelé pour visiter en ce lieu quelque malade, l’apotiquaire qu’il avoit mené avec luy, voulut un matin, apres avoir esté tourmenté de la coquemare, quereller ceux qui avoient couché en la mesme chambre, de ce qu’ils luy avoient tellement serré & pressé le col, qu’ils l’avoient, disoit-il, presque suffoqué. Ses compagnons au contraire nyoient hardiment, & le blasmant rejectoient sur luy toute la faute, de ce qu’il auroit pasé toute le nuict sans dormir, comme s’il eus testé oultré de folie. E jour ensuivant apres avoir soupé largement, & pris des viandes flatueuses, qu’on lyu avoit ^resentées de propos delibéreé, on le fit coucher seul en une chambre, bien close & fermée de toutes parts, où l’accez l’ayant repris comme en la nuict precedente, il iura que c’estoit un Demon, duquel mesme il dépeignoit fort naivement les gestes & le visage. Ce que depuy on ne luy peut oster de la phantasie, sinon apres avoir consulté les Medecins, & par leur moyen receu la guerison de son mal. [feuillet 217/2] Il est certain donc que les Demons incubes & succubes peuvent avoir affaire avec les hommes, mais sans aucune generation, quelque histoire que ‘ob apporte au contraire. Le generation de l’homme naturellement ne peut estre sans semence. Puis donc que les Demons manquent de ce principe, veu qu’ils n’ont point de sang, il faut qu’ils l’empruntent ailleurs. Et à raison qu’estant empruntée, il est impossible de la transporter de lieu en autre, sans perdre ce principe, il s’ensuit de toute necessité, que la generation de l’homme est une mutation hors de la puissance des Demons.

BRIEFVE CONCLUSION DE TOUT ce discours. Description de la semence..

CHAPITRE XIX.

Pour mettre fin à ce discours, nous concuons generalement, que la semence nommée apr Euripide une rousée du Ciel, par Lactance, une grasse & blanche humeur, pinguis & candens humor. Par Pline & Tertullian virus genitale. Par Arnobius vis Lucilii, par Nonnus [feuillet 218/1]panapolitain écume mouvante  d’elle-mesme, Es un excrément de la seconde coction, loüable blanc, & &cumzux, composé de sans et d’esprit, qui acquiert sa perfection aux testicules, pour servir en la generation de cause materielle par le moyen de la copulence, & de cause efficiente à raison de ses esprits qui portent le principe. C’est cette vertu generative qui en l’absence de l’âme du pere prepare & dispose la matiere, articule les parties de l’enfant, & les rend capables de recevoir la forme qui est l’âme, à l’advenement de laquelle est la generation accomplie. Pour cete generation sont necessaires le masle & l femelle, l’un pour engendrer hors de soy son semblable : l’autre pour engendrer dedans soy, estant impossible que l’un ou l’autre separement puisse susfire à la production de l’enfant. La semence du masle doit estre immediatement par le masle conferée à la femelle ; car autrement elle demeure sterile par la perte de son principe, quelque dilignece que les Demons y apportent. La semence de la femelle est principalement dediée pour servir de matiere aux membranes, qui [feuillet 218/2] enveloppent l’enfant, & de supplement à la semence du masle, pour l’accomplissement des parties spermatiques.

Notes par histoiredelafolie.fr

(1) Jean Wier.

 

 

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