Nicolas Vaschide  et Henri Piéron. De la valeur séméiologique du rêve. Article parut dans la « Revue Scientifique (Revue rose), (Paris), quatrième série, tome XV, 38e année, 1er semestre, 1er janvier au 30 juin 1901, 30 mars, pp. 385-398 et 6 avril, pp. 427-429.

Nicolas Vaschide  et Henri Piéron. De la valeur séméiologique du rêve. Article parut dans la « Revue Scientifique (Revue rose), (Paris), quatrième série, tome XV, 38e année, 1er semestre, 1er janvier au 30 juin 1901, 30 mars, pp. 385-398 et 6 avril, pp. 427-429.

 

Les travaux de Nicolass Vaschide et Henri Piéron sont si importants et si nombreux, en particulier sur le sommeil, les songes et les rêves, que nus avons crée une rubrique bio-bibliographique spécifique en ligne sur notre site :

[p. 385 – colonne 1]

De la valeur séméiologique du rêve.

1

Hippocrate (1) a donné à la valeur séméiologique du rêve une place telle qu’elle ne lui a plus jamais été attribuée depuis et ne le sera probablement jamais plus. Et aussi il faut avouer que la manière dont il a conçu et exposé cette séméiologie n’était pas faite pour encourager beaucoup à le suivre dans cette voie. Il donne, en effet, à tous les rêves ou à peu près le rôle d’avertir le médecin sur l’état de santé des hommes ; il est ainsi obligé d’établir une espèce de clef séméiologique des songes, ne reposant que sur des constructions de son imagination et non sur des faits précis, et restant nécessairement dans le vague. Aussi n’y a-t-il à peu près rien à tirer, rien à garder là de sérieux. Son disciple Galien (2) n’a guère fait que le répéter. Il donne quelques exemples où le rêve avait servi au diagnostic et au traitement des maladies ; et il y a là une méthode préférable, mais ses exemples ne sont pas tous heureux, ni encourageants, et parfois la généralisation d’un fait peut amener des méprises regrettables.

C’est ainsi qu’un lutteur ayant rêvé qu’il était plongé dans une fosse remplie de sang d’où il ne pouvait sortir, on conclut à une pléthore sanguine, [p. 385 –  colonne 2] et la saignée eut du succès. Mais un malheureux phtisique s’étant par la suite avisé de rêver qu’il nageait dans son sang, on le saigna, ni plus ni moins. Quoi d’étonnant s’il en mourut !

Nous ne rangerons pas parmi les rêves séméiologiques ceux des habitués de la médecine divinatrice, pratiquée dans les temples d’incubation, et où les dieux, si ce n’est les prêtres, mais le plus souvent l’esprit même des consultants, suggéraient dans des rêves des conseils et des médicaments. Cela a d’ailleurs été magistralement exposé dans le livre de Sprengel (3).

Et d’autre part nous nous permettrons de citer comme ayant une valeur séméiologique quelques rêves donnés par Artérnidore comme des avertissements célestes, et qui eurent lieu aussi dans des temples ; ce n’est d’ailleurs que comme cela qu’ils purent être connus:

« Un individu rêva (dans le temple de Sérapis) qu’il recevait d’Asklépios un coup d’épée dans le ventre et qu’il en mourait. Le même homme guérit à la suite d’une opération, d’une tumeur qui lui survint au bas-ventre (4). »

Si la prédiction ne fut pas exacte, on peut au moins reconnaître l’influence de sensations organiques sourdes et restées inconnues dans la veille sur la nature et la direction du rêve. C’est d’ailleurs la tumeur qui donne le plus d’avertissements de ce genre, ainsi que l’angine à laquelle se rapporte le [p. 386 – colonne 1] cas suivant : « Un individu rêva qu’il portait autour du cou, comme un ruban, le nom de Sarapis gravé sur une lame d’airain. Il fut pris d’une angine et mourut au bout de sept jours (5). » Enfin voici encore un rêve relatif au sang, élément que nous rencontrerons aussi souvent dans cette étude. II s’agit d’un individu qui, dans un rêve, voit le Xanthe, fleuve de la campagne troyenne, se changer en un fleuve de sang. Peu après, il mourut d’un épanchement sanguin (6). »

Si nous quittons l’antiquité, nous voyons que cette recherche de la séméiologie du rêve n’a pas été transmise aux époques intermédiaires comme un legs sacré, ainsi que bien d’autres opinions, souvent moins raisonnables. On ne s’en occupa plus, et les médecins du moyen âge négligeaient les conseils d’Hippocrate.

Il faut arriver aux temps modernes pour que la question soit reprise.

En 1806, Double présente des considérations séméiotiques sur les songes (7).

L’auteur considère qu’il ne serait pas mauvais de s’occuper de l’onirocritie médicale et de sa séméiologie ; que cela vaudrait mieux que de cultiver celle qui consiste à connattre le passé, le présent et l’avenir. Parlant de l’histoire de la question, il rejette le Traité des songes d’Hippocrate, comme n’étant pas digne de lui, ce qui est au moins un curieux procédé de critique historique ; il regrette que les séméiologistes les plus célèbres ne tiennent aucun compte de cette partie de la séméiotique dont l’importance a été signalée par Aristote et Galien.

Il divise ensuite les rêves en quatre catégories : a) rêves dépendant de la réaction de l’organe pensant sur lui-même ; b) rêves dépendant de l’action des des sensations extérieures ; c) de l’association des idées ; d) enfin, rêves dépendant de l’action des sensations internes et des fonctions animales.

Ce sont ces derniers seuls qui ont une valeur séméiologique. Puis il distingue les signes diagnostiques et les signes prognostiques. Ne s’occupant pas des premiers, il ne fait que citer quelques exemples :

Dans l’hydropisie de poitrine, il y aura des rêves très fatigants, d’étouffement ; dans les affections gastriques, des tableaux effrayants et hideux, très mobiles, rendant le sommeil très pénible ; dans les hydropisies, les engorgements séreux du cerveau, il y aura des rêves d’étangs, de fleuves, de marais ; dans le travail de dentition des enfants, ou encore quand ils ont des vers, des songes accompagnés de [p. – 386 colonne 2] frayeurs et de tremblements convulsifs. Les rêves peuvent aussi révéler les tempéraments :

Les sanguins rêvent chants, repas, danses, jeux brillants, combats ; les mélancoliques, des spectres, des ombres, la solitude, la mort ; les phlegmatiques, des fantômes blancs, des lieux humides, de l’eau ; les bilieux, des corps noirs, des emportements, assassinats, incendies.

Pour les rêves prognostiques, il en signale quelques-uns :

Tout d’abord, comme on ne doit pas normalement rêver dans le sommeil profond, qui vient au début du sommeil, l’existence du rêve dans les premiers moments du sommeil marque un dérangement de l’économie générale.

Les rêves relatifs au manger et au boire sont de bon augure dans la convalescence, quand on a faim et soif ; ils sont moins favorables à l’origine des maladies ; les goûts pervertis marquent des fièvres gastriques, bilieuses ou putrides.

Les rêves gais sont de bon augure ; les rêves tranquilles constituent un symptôme favorable dans la phrénésie.

Les rêves où l’on croit se baigner dans l’eau chaude sont signes de sueurs critiques.

Les rêves de serpents enflammés présagent, d’après une observation de Galien, une hémorrhagie et un besoin d’évacuations sanguines ; des rêves tristes, pénibles, inquiétants, des maladies à solution difficile.

L’agitation, la frayeur dans les fièvres promettent que la maladie sera longue.

De violentes douleurs à une partie du corps signifient, en général, quand le rêve n’est pas dû à une action extérieure, lésion, inflammation ou gangrène de la partie.

Et à ce propos il cite les deux exemples qui seront partout et indéfiniment répétés dans la suite.

Le premier est celui du savant Conrad Gessner qui rêve qu’il est mordu au côté par un serpent, et qui reconnalt bientôt à cet endroit les signes d’un anthrax qui l’emporte en cinq jours.

Le second est d’Arnauld de Villeneuve : il rêve qu’il a été mordu au pied par un chien enragé, d’autres diront par une vipère, et ne tarde pas à voir ce membre affecté d’un ulcère cancéreux.

On a vécu longtemps sur les données de Double sans rien apporter de nouveau ou d’original. D’ailleurs, on ne s’occupe guère encore de la question. Signalons à cette époque la thèse de Choquet (8) qui est d’avis qu’on n’ajoute pas trop de foi aux syrnptômes [p. 387 – colonne 1] équivoques des rêves, quoiqu’il admette une certaine influence séméiologique des sensations sur les songes. Il parle d’un homme qui rêve qu’un soldat polonais lui lance au sternum une pierre dont le choc le réveille ; et il trouve à cet endroit un phlegmon en voie de développement. Il cite Stalh qui déclare que les rêves ou l’on voit des objets rouges, des incendies, précèdent une hémorrhagie active : mais il a eu de ces rêves dans une fièvre éphémère. Les hydropiques, d’après Haller, voient des lacs et des fontaines : et Boerhaave trouvé une grande quantité de sérosité dans le cerveau des hommes rêvant souvent qu’ils nageaient ou se jetaient à l’eau (9).

Après cela, car il est inutile de citer des ouvrages qui ne font que mentionner le fait sans en rien dire, et après avoir cité en passant l’article Rêve, de Moreau de la Sarthe (10), où sont présentés comme signes d’états morbides les rêves où l’on est plongé dans l’eau, ceux d’incendie, de membre gelé ou mort, de coups violents à la tête, de résistance in­surmontable et de labyrinthe d’où on ne peut sortir, on peut en venir de suite au travail d’Artigues (11).

Le but de l’auteur est de montrer que le rêve peut présenter une réelle valeur au point de vue des diagnostics à établir, que l’étude n’en a jamais été faite réellement, et qu’il y aurait là une lacune à combler.

Après avoir parlé de la théorie du sommeil et déclaré que, la circulation étant ralentie, le réveil d’un organe souffrant active la circulation et donne au rêve une forme et une intensité anormales, il place les rêves de ce genre dans la première période du sommeil, ou période hypnagogique, et dans la dernière, ou période de réveil, mais jamais dans la seconde, de sommeil profond.

Enfin, après un historique, nécessairement peu [p. 387 – colonne 2] rempli, nous arrivons à l’étude des rêves morbides en général. L’auteur regarde l’imagination comme le microscope amplificateur de la sensibilité, et appelle le rêve morbide le délire de l’homme endormi. Il distingue, d’ailleurs, à propos des rêves érotiques, ceux qui sont dus â des sensations réelles, telles que la réplétion séminale, et ceux qui sont causés par l’imagination libidineuse, des masturbateurs, par exemple.

Le songe du docteur – de A. Dürer [estampe]

Enfin il divise en deux catégories les rêves morbides :

1° Les rêves pronostiques, venus de sensations exagérées ;

2° Les rêves délirants, symptomatiques de maladies établies.

Puis il passe à une étude plus particulière :

Les rêves d’alcooliques sont toujours des cauchemars, souvent avec vision, comme dans les délires du même genre, d’animaux repoussants, tels que rats, crapauds, serpents, etc.

Les rêves des fous lui paraissent devoir être caractéristiques de la forme de maladie mentale. Ceux des hystériques seraient de véritables romans, où tout s’enchaîne, en continuant parfois d’une nuit à l’autre. Il signale à ce propos les rapports de la menstruation et des rêves de sangs.

Des accès d’asthme seraient précédés, d’après Macario, d’épouvantables cauchemars. Dans les maladies du cœur, les rêves seraient à la fois très courts et très effrayants.

L’auteur note encore les cauchemars de la fièvre typhoïde, parmi les maladies fébriles, rapprochées des maladies de l’estomac. Parfois même le cauchemar, revenant à heure fixe, revêtirait l’aspect d’un accès véritable de fièvre palustre.

Mais il n’y a que deux cas cités de pronostic précis, l’un est de Galien : un homme, ayant rêvé qu’il avait une jambe de pierre, fut frappé plus tard d’une paralysie de cette jambe : Macario donne l’autre : il s’agit d’un ancien ministre de la Justice sous Louis-Philippe, qui meurt d’apoplexie trois jours après avoir rêvé qu’il succombait à cet accident. Enfin, l’auteur, dans un cas de rêve persistant, devenu une obsession et ayant conduit à la folie, hésite antre deux interprétations possibles, celle qui ferait du rêve un symptôme d’un état morbide, l’autre qui attribuerait l’état morbide à l’influence du rêve. De ces deux sens, il inclinerait plutôt vers celui de signe à chose signifiée que vers celui de cause à effet.

Nous nous arrêterons ici pour la partie historique générale de la question. Le livre d’Artigues marque un effort louable pour ouvrir une question intéressante : on s’en occupe de plus en plus aujourd’hui et dans des voies différentes ; on a recueilli quelques [p. 388 – colonne 1] faits, donné quelques interprétations ; c’est ce que nous allons tâcher de grouper maintenant. Nous nous occuperons d’abord de la séméiologie proprement dite dans les maladies ; puis ce sera le rêve dans l’hystérie et les maladies mentales, et, à ce propos, son influence sur la vie de la veille ; ensuite nous ferons une place à part au domaine le mieux exploré peut-être jusqu’ici, celui du rêve chez les épileptiques : enfin nous donnerons quelques documents personnels et nos conclusions.

II

Le domaine de la pathologie générale n’est pas riche pour ce qui concerne les renseignements à tirer des rêves. Il n’y a que peu d’indications, encore moins de faits et d’observations.

La médecine indoue et chinoise prétendait tirer des rêves les signes généraux de la détermination des affections générales (12) :

La réplétion cardiaque est marquée par des fantômes et des monstres effrayants : l’inanition, par le feu, les flammes, la fumée. La réplétion pulmonaire par des combats, des armes, des soldats, et l’inanition par des plaines, mers, chemins, voyages difficiles. La réplétion rénale par des fatigues insurmontables, l’inanition par le fait de nager avec peine ou se noyer. Les chants, fêtes, musique, plaisirs, marquent la réplétion des canaux de la rate ; les disputes et batailles, l’inanition. Les forêts inextricables, les montagnes abruptes, la réplétion du foie : l’herbe, les gazons, champs et buissons, l’inanition.

Mais ce n’est pas encore là que nous pouvons trouver des vues intéressantes, pas plus que dans les iambes de Nicéphore, où

Niger qui conspecius nunlius est morbi

et

Vesium ferens nigram in fausltum somniun (13).

L’homme noir, messager de maladie, et la veste noire présageant des troubles du sommeil, cela ne nous renseigne pas beaucoup.

Des faits seront donc plus intéressants.

En voici un où un rêve aurait fait présager une atteinte de la peste. Notons cependant qu’il y a lieu ici de faire des réserves, la peste, étant épidémique, pouvant préoccuper assez l’esprit pour provoquer des rêves indépendamment de l’atteinte du mal. Et même, s’il y avait un rapport entre le rêve et la maladie, peut-être que le rêve pourrait être considéré [p. 388 – colonne 2] comme une des causes ayant prédisposé à la maladie, suivant une loi connue d’affaiblissement par la crainte, à la suite de l’impression que le réve fit sur l’esprit.

Il s’agit d’un chevalier de la compagnie de Douglas, Roger d’Osteyn, qui s’endort en pleine santé, et, au milieu de la nuit, voit en rêve un pestiféré tout nu l’attaquer avec fureur, le maintenir, après une lutte acharnée, entre ses cuisses, et lui vomir sa peste dans la bouche. Trois jours après, pris de peste, il mourut (14).

A côté de ce fait, il faut placer tous ceux que nous avons cités dans la première partie, historique, de notre travail.

En voici encore quelques autres :

Celui-ci, est intéressant, non au point de vue purement séméiologique, mais en tant qu’il montre l’influence des sensations organiques sur le cours plutôt d’ailleurs que sur la nature des rêves : ces sensations sont interprétées ainsi et assimilées au rêve :

« A une époque où, lecteur assidu de récits de voyages et d’aventures, j’avais l’esprit rempli des idées qu’ils évoquent, je rèvais que j’étais embarqué sur un navire dont le capitaine eut une violente discussion avec moi. Nous montons dans un canot pour nous rendre à terre afin de régler notre différend. Nous abordons sur la plage d’une île déserte, et là nous commençons un duel sans témoins, je tire sur mon adversaire, et je le manque. Il me répond, et la balle de son pistolet vient me frapper au côté gauche du front. Étonné de n’être pas mort, je tire de nouveau sur lui et je le manque encore une fois. Il riposte, et je reçois encore une balle au même endroit. Le duel continue, et après avoir reçu sept ou huit coups de feu, toujours à la même place, je m’éveille avec une névralgie violente du nerf sus-orbitaire dont le siège correspondait exactement à celui de ma blessure imaginaire, tandis que les intervalles qui séparaient chaque élancement douloureux correspondaient très exactement à l’espace qui séparait les coups de feu (15). »

L’auteur signale dans un autre ouvrage le rêve comme un signe précurseur d’une folie prête à éclater (16).

L’observation que voici, citée par Sergueyeff est plus intéressante, car elle prouve que le rêve peut [p. 389 – colonne 1] servir de signe pronostique à assez longue échéance. Elle a trait à une affection ophthalmique. Notons ici que c’est dans les troubles oculaires que le rêve peut avoir souvent, plus peut-être que partout ailleurs, une réelle valeur séméiologique.

Nous savons qu’un oculiste de très grand renom tient compte des rêves de ses malades. Il est regrettable que la littérature médicale reste muette à ce sujet.

Voici le fait :

« Un savant francais fit en Égypte un voyage d’exploration au cours duquel il fut atteint d’ophthalmie ; après retour en France et guérison complète, dix années s’écoulèrent ; le savant ne songeait plus à son voyage passé qu’à de très rares intervalles, lorsqu’il s’aperçut, avec une certaine surprise, que l’Égypte et ses localités diverses lui revenaient en rêve, avec une fréquence toute particulière. Cela dura quelque temps, et bientôt se déclara derechef l’affection ophthalmique dont il avait jadis souffert (17). »

Hervé Saint-Denys cite plusieurs cas de rêves pronostiques (18).

Il rêve deux nuits de suite qu’il va avoir une angine, et cela lui arrive effectivement le troisième jour.

Chaque fois qu’il allait avoir des maux de tête, il en était prévenu par ce fait que la nuit précédente, il croyait gravir et franchir avec une merveilleuse facilité montagnes et précipices.

Un fait très curieux marque bien la finesse des sensations internes pendant le sommeil :

Un de ses amis ne peut souffrir aucun aliment préparé à la graisse. Quand sa cuisinière le faisait sans l’en avertir, il ne manquait jamais de le savoir à ce simple fait que, la nuit suivante, il rêvait marcher dans l’eau.

Y a-t-il là des corrélations individuelles ou des affinités symptomatiques ? L’auteur inclinait plutôt vers la seconde interprétation, et croyait à la possibilité de l’établissement d’une clef des songes expérimentale.

A côté de faits isolés, on trouve aussi des essais d’interprétation générale et d’établissement de certaines règles de symptomatologie. Debacker (19) est assez célèbre. Il établit que les rêves et hallucinations nocturnes et les terreurs ont une valeur séméiologique, malheureusement bien indéterminée ; ils peuvent marquer des empoisonnements saturnins, ou être dus à la quinine ; apparaître par suite d’indigestion [p. 389 – colonne 2] gastriques ou intestinales, de constipation, de vers intestinaux, de méningite tuberculeuse et d’hydrocéphalie chronique quand il ne s’agit pas tout simplement d’une dépression de convalescence, d’anémie, ou d’onanisme, quand enfin cela n’est pas dû à des causes purement psychologiques.

La persistance du rêve lui paraît marquer la démence, et il y aurait aussi dans les rêves des signes de l’hystérie et de l’épilepsie, comme le somnambulisme, par exemple.

Notons encore que, selon lui, les réves d’animaux peuvent apparaître héréditairement chez les fils d’alcooliques qui verraient surtout des chats, chiens, chevaux, lions, ou puces, punaises, hannetons. Il est bien certain que les animaux qui apparaissent ainsi sont ceux qui sont le plus familiers. Enfin, cela se produit chez les nourrissons par intoxication alcoolique transmise par le lait de la nourrice (20). Et il y a là un moyen de reconnattre si la nourrice s’enivre.

Il donne enfin une observation qui montre, et ce n’est pas là une observation isolée, l’importance du rêve de sang dans la menstruation féminine : il s’agit d’une jeune fille de treize ans, non encore réglée : « Elle a commencé par avoir des rêves terrifiants avec hallucinations, d’abord la nuit, puis en plein jour ; elle a vu des arbres couverts de sang, elle rêve de forêts, a remarqué du sang sur ses souliers. Elle aperçoit souvent des hommes vétus d’une blouse bleue ou blanche très longue qui marchent d’arrière en avant et veulent l’assassiner. Elle a en même temps de grands maux de tète et de ventre (21). Or, dès l’apparition des règles, il y a disparition radicale de tous ces phénomènes.

A propos de la menstruation, Nelson remarque qu’à cette époque, et pendant la grossesse, la femme rèverait davantage (22).

Tissié, dans son livre récent, donne un assez grand nombre d’indications.

Les rêves d’origine circulatoire ont, selon lui, pour caractéristique, un sentiment de peur, d’angoisse, accompagné de représentations spéciales telles que des incendies, des chutes, etc. (23).

Ceux d’origine respiratoire éveillent chez le dormeur la sensation d’oppression et d’étouffement (24). [p. 390 – colonne 1]

Voici à ce propos quelques observations citées :

« Sarah, dix-neuf ans, pleurésie aiguë devenue purulente ; entrée à l’hôpitalle 2 novembre 1888 ; cauchemars commencent huit jours après. Ils se produisaient surtout dans l’après-midi vers trois heures : elle se voyait enfermée dans une chambre ; les murs se rapprochaient les uns des autres ; elle ne voyait plus ni porte ni fenêtre, le plafond s’abaissait peu à peu, elle ne pouvait respirer, elle étouffait. Elle avait froid sur tout le corps et ne pouvait parler, car sa voix expirait sur ses lèvres. Elle entendait ses voisines de lit causer entre elles, elle ne pouvait remuer. Sachant pourtant qu’elle avait le cauchemar, elle s’écriait : «  mais réveillez-moi » ; celles-ci entendaient quelque chose, mais ne pouvaient distinguer ce qu’elle leur disait ; elle croyait cependant crier bien fort. Dans le sommeil du jour seulement la malade avait conscience de son cauchemar, mais jamais dans le sommeil de la nuit qui était à peu près le même.

« Une ponction fut faite en fin décembre, l’empyème fut pratiquée le 12 janvier 1889 ; cette malade n’a plus eu de cauchemar depuis la fin du mois de mars. »

«  Jean, quarante-cinq ans, emphysémateux, fait toujours le même rêve : il est poursuivi par les gendarmes, il veut fuir mais ne le peut ; il ressent un grand poids sur la poitrine, il est oppressé, il se réveille alors tout haletant. »

« M…, cinquante-neuf ans, employé de commerce, me dit que depuis 1880 il a le même cauchemar à peu près toutes les semaines. Il correspond presque toujours à un état de préoccupation d’esprit (femme folle, fils et fille morts, perte d’argent) ; depuis cette année il en a moins, il attribue cela au calme relatif de son existence. Il dit aussi ne pas autant souffrir de ses crises d’asthme. M… est emphysémateux. Il se voit poursuivi dans son sommeil. Il ne peut échapper à ses ennemis, il étouffe, il se réveille haletant, s’asseoit sur son lit, voit passer des nuages devant ses yeux ; il reste étourdi pendant trois ou quatre minutes ; il veut parler, mais il ne peut. Progressivcment sa respiration revient. »

Pour ce qui a trait à la digestion, il rernarque que les rêves provoquent des images gustatives (26).

Si l’affection est profonde, les malades ont des rêves effrayants avec une impression de pesanteur et d’angoisse pouvant être très violente.

Enfin, en ce qui concerne l’innervation, l’auteur rapporte un exemple de Faure où un rêve annonça [p. 390 – colonne 2] longtemps à l’avance la paralysie générale (27). Il donne aussi une observation :

« Observé dans le service de M. Pitres un ataxique atteint depuis sept mois d’atonie génitale à l’état de veille, qui dans le sommeil avait des rêves érotiques dans le sens le plus large du mot. Il avait en outre des rêves sympathiques à son affection dans lesquels il se trouvait entouré d’eau. Il essayait vainement de fuir, car il sentait qu’il ne pouvait marcher que difficilement. »

Tissié parle encore de l’influence sur les rêves de la fièvre, du parasitisme, du tellurisme, du saturnisme, dans le même sens que Debacker (28).

Il note aussi les rêves d’animaux chez les alcooliques.

D’une manière générale, l’auteur croit que les maladies débutent généralement par un travail pathologique inconscient à l’état de veille et pouvant provoquer des rêves.

Enfin citons cette observation qu’il nous donne où le diagnostic fut puissamment aidé par la nature des rêves.

« Ladreit de la Charrière a observé un cas de tubercule du cerveau chez un enfant qui n’entendait plus que d’une façon obtuse. Il conclut à une surdité cérébrale et son diagnostic fut heureusement aidé par la constatation des phénomènes de terreur nocturne que l’enfant présentait à un haut degré. Lui qui était presque complètemment sourd à l’état de veille, entendait des voix la nuit, il en avait peur, il criait et avait toujours l’oreille au guet. Trois mois après, il mourait de tubercules cérébraux. »

Enfin, tout récemment, Klippel et Lopez parlent du rêve comme symptôme pour le diagnostic de certaines maladies (29).

Ils rappellent les anciens signes : les troubles circulatoires se manifestant, dans la congestion, par la vue de fantômes effrayants, et dans l’anémie par la vision du feu ; les affections rénales, par des obstacles insurmontables ; et les maladies de foie, par des montagnes abruptes et des forêts inextricables.

Ils trouvent une voie plus scientifique dans l’étude de l’influence des toxines et rapprochent des rêves de l’alcoolisme ceux des maladies toxi-infectieuses.

Ce qu’ils trouvent de plus caractéristique est, d’une part, la zoopsie, la vision des animaux, dégoûtants surtout, tels que rats ou araignées, et le rêve professionnel, et, d’autre part, le prolongement des rêves [p. 391 – colonne 1] en délire dans la veille, en particulier chez les typhiques.

Nous étudierons ce phénomène à part chez les aliénés et les hystériques. MM. Klippel et Trenaunay ont ensuite publié un exemple de ce dernier cas de délire infectieux, et le délire augmentait ou dimi­nuait selon que la langue était plus ou moins chargée (30).

On a pu voir que, dans le domaine que nous venons de parcourir, le petit nombre de faits connus ne permettait pas de tirer des conclusions bien nettes, ni des lois bien précises ; on ne faisait que pressentir des rapports stables. La voie est indi­ quée, que l’on fasse des observations systématiques à ce sujet, et on pourra dégager sinon un système complet de séméiologie, du moins des indications précises et précieuses.

III

. Les rapports des rêves et de la folie, l’influence des rêves chez les hystériques sont mieux connus, et l’on a sur la question un plus grand nombre de travaux et d’études.

Il y a longtemps qu’on a noté les rapports des rêves avec la nature des maladies mentales. Les Iypémaniaques, dit Macario, ont des rêves tristes et oppressifs, et les monomaniaques expansifs, des rêves gais et riants (31). Mais il n’y a là que rapport de coexistence. Or ce que l’on a souvent constaté, c’est le rapport plus curieux de préexistence.

Le travail de Faure (32) fait à l’infirmerie du Dépôt et à la maison de Charenton est capital par le nombre de faits relaté. L’auteur a pris son épigraphe de Falret : « Des rêves maladifs précèdent quelquefois l’éclat de la folie. »

Nous allons très brièvement résumer les observations contenues :

1° Une femme entend trois nuits de suite une voix qui lui dit : « Tue ta fille. » Elle l’immole.

Les rêves sont conscients dans les faits suivants :

2° Une femme rêve que son mari veut se séparer d’elle, et cela sans raison. Elle a conscience que c’est un rêve et tente pourtant à plusieurs reprises de se suicider, sans pouvoir s’en empêcher ;

3° X… est persuadé, à la suite d’un rêve, qu’il a perdu sa fortune ; [p. 391 – colonne 2]

4° W… croit avoir à se battre en duel à la suite d’une dispute accomplie en rêve ;

5° Mme X., croit avoir entendu une musique prussienne sous ses fenêtres ;

6° Un banquier espagnol rêve d’affaires merveilleuses et y croit. Il est atteint dans la suite de paralysie générale.

Dans les cas suivants, le rêve reste inconscient :

7° Un commis raconte qu’il est tombé à l’eau, à la suite d’un rêve d’alcoolique ; un matin, il croit en se réveillant être le prince impérial ;

8° Un charretier raconte une scène de violence dont il a été victime, et montre ses plaies imaginaires. Il l’a rêvé. Il veut se venger ;

9″ X…, cordonnier, a des rêves tourmentés avec idées de prostitution universelle. Il rêve que sa femme se prostitue à tout le monde et en particulier à son frère. Il veut se venger ;

10° M… raconte une scène d’attaque compliquée dont il a été victime et dont l’a sauvé un officier qui l’a ramené sans jamais faire allusion à cela. La nuit renouvelle son délire pour le matin ;

11° X… rêve la nuit qu’il vole, et, dans la journée, il commet des vols impulsifs, le plus souvent stupides ;

12° Un individu a, à la suite de ses rêves, des impulsions érotiques ou humanitaires, selon leur nature ;

13° Un instituteur veut détrôner le roi ou le tuer, parce qu’il aurait voulu le faire écraser avec sa v oiture. On ne peut le détromper ; l’origine est dans un rêve.

Les observations 14, 15, 16, 17, se rapportent à des cas où il y a probabilité d’un tableau imaginaire originel.

La marque distinctive du rêve est le plus sonvent la précision du souvenir.

18° La femme X… dénonce son mari qu’elle a vu se livrer la nuit à un acte monstrueux d’immoralité. L’impossibilité du crime est démontrée, que la femme X persiste encore dans ses affirmations détaillées ;

19° Une dame de Lyon, observée en 1778, par Odier de Genève, crut voir sa belle-mère essayer de la tuer la veille du jour où elle devint aliénée.

L’auteur remarque que Brierre de Boismont et Moreau de Tours ont connu cette persistance du rêve, qui n’est autre que le délire.

Il n’attribue pas le délire à l’action du rêve, qui n’est qu’un symptôme d’un état préexistant :

« En résumé, ce phénomène de la persistance du rêve d’après le sommeil, difficile dans bien des cas à distinguer des hallucinations, a, comme celles-ci, sa signification pathologique importante. Si, dans quelques cas, rares du reste, il peut se déclarer, puis [p. 392 – colonne 1] cesser, de manière à n’être dans la vie de l’individu qu’un fait accidentel et isolé, le plus souvent il est le précurseur de maladies incurables, la manie ou la paralysie. Dans tous les cas, si un rêve peut devenir ainsi le point de départ d’une manifestation intellectuelle anormale, il est certain pour tout le monde qu’il n’en est que la cause secondaire, et que la disposition au délire était préexistante. »

Un autre travail important est celui de Chaslin (33).

L’auteur considère que le rôle du rêve est immense et que pourtant on le néglige.

Le rêve très cohérent peut selon lui paraître s’être accompli réellement, surtout chez les enfants et les vieillards.

Le rêve toujours le même est déjà pronostique. Le cauchemar à l’origine du sommeil est d’origine cérébrale ; celui du milieu de la nuit est dû à une mauvaise digestion (terreurs nocturnes des enfants).

L’éphialte est souvent avant-coureur de l’apoplexle, l’épilepsie ou la manie. L’anxiété est un signe de maladie de cœur (lésion mitrale).

Le somnambulisme spontané est un signe de pathologie nerveuse. Quant au délire, ce n’est « que la continuation du rêve ou sa conséquence, dans les cas extrêmes qui aboutissent à la folie ». Mais le rève n’est pas identique à la folie, qui est durable, tandis qu’il est passager.

Marci à Samia Boudjema.

Le rêve peut parfois être sans rapport avec le délire. Le plus souvent il y a lien étroit.

Voici les observations qu’il cite :

1° Un peintre, après avoir perdu sa femme, rève toutes les nuits qu’il déterre son cadavre pour le manger (34) ;

1) Une malade mélancolique, avec accès de gaieté, rêve qu’elle est mélancolique avant de le devenir (34) ;

3° Dans une folie circulaire, la malade avant la période de dépression rêve de la mort de son père, et différeutes choses gaies avant la période d’excitation ;

4° Une femme reste inquiète après des rêves de brigands.

Les observations 5, 6 et 7 sont tirées de Faure.

8° Une femme a des peurs continuelles survenues après un rêve où elle s’imagina tuer avec un couteau son mari et sa fille ;

9° Une femme est persuadée qu’elle va mourir, parce que pendant trois jours elle rêve de mort et de glas funèbre ;

10° Après des rêves d’enfer, idées d’incarnation du diable et de possession dans la veille ;

11° Une femme, après avoir rêvé que son mari la [p. 392 – colonne 2] violentait, ne peut plus le voir puis aucun homme (35) ;

12° Un délire de persécution suit un rêve renonvelé où l’on en ronce une porte 36) ;

13° Une femme devient anorexique après un rêve où elle croit vomir, à la suite d’un repas trop co­pieux (37) ;

14° Cette observation est celle du gendarme de Taine, rapportée dans une note de l’intelligence, et où il croit devoir être guillotiné à la suite de rêves où il dramatise une observation insignifiante :

15° Un délire alcoolique consécutif à un rêve (38) ;

16° Chez un individu, après le sommeil et consécutivement à un rêve, survenait pendant quelques heures un délire d’excitation maniaque (39) ;

17° Observation de Faure ;

18° Cette observation est négative : des rêves identiques à des hallucinations, qui provoquent des attaques d’hystérie, ne produisent rien ;

19° Un aliéné croit qu’un génie le dirige, grâce à des songes (40) :

20° Un peintre suit dans la veille les vocations qu’il se découvre dans le rêve (41) ;

21° A la suite de rêves de tabliers blancs, un individu vole des tabliers blancs (42) ;

L’auteur considère que le sommeil favorable à l’éclosion du délire peut être favorable aussi à l’action thérapeutique. On peut employer la suggestion, suggérer des rêves déterminés, pendant le sommeil hypnotique, par exemple.

Nous avons vu au passage des observations où le délire des grandeurs chez des paralytiques généraux se manifestait d’abord dans le rêve. Régis et Lalanne (43) l’ont observé dans quatre cas. Cela semblerait indiquer pour eux, en dehors de toute influence alcoolique, un état d’intoxication.

Mandsley en cite évidemment un cas, d’après Baillarger, quand il parle d’un marchand grec qui, après avoir été atteint d’un flux hémorrhoïdal qui disparut, rêva pendant quinze nuits qu’il était à la tête d’im­ menses richesses; puis le délire s’établit dans la veille. Aussi n’y a-t-il guère lieu de tenir compte des observations de Mandsley quand il attribue cela à l’influence d’un trouble de circulation locale sur la circulation cérébrale.

Quand le même auteur cite encore une mélancolique [p. 393 – colonne 1] dont les accès, qui duraient quatre mois, étaient séparés par de longs intervalles de gaieté, il est bien clair qu’il s’agit d’une circulaire et ce n’est pas la première observation que nous en voyons :

« Le fait remarquable de son cas, dit-il, c’est qu’invariablement avant chaque accès, elle rêvait qu’elle était malade de cet accès, et que, lorsque l’accès était sur le point de finir, elle rêvait qu’elle revenait à la santé, qu’elle était gaie et bien portante (44). »

Il y a, dans Dechambre, une observation encore de folie consécutive à un rêve :

« Une domestique nymphomane, âgée d’une quarantaine d’années, qui couchait dans une chambre parfaitement close et séparée du reste de la maison par un escalier, pénétrait un matin chez un locataire, pour lui demander compte de la visite qu’il lui avait faite pendant la nuit. Elle l’avait tout simplement vu en rêve. L’idée fixe de cette visite s’ancra si bien dans son esprit que, renvoyée de chez ses martres, elle revint à plusieurs reprises redemander des explications, et qu’on fut obligé, pour l’écarter, de recourir à l’assistance d’agents de police. La famille fut obligée de la faire enfermer (45) »

L’un de nous (46) a fait à ce sujet l’observation précise d’un cas où le rêve jouait un rôle capital dans un délire établi. Tandis que les rêves du sommeil profond restaient indemnes chez cette malade, une épileptique hypocondriaque de l’asile de Villejuif, ceux du réveil traduisaient des conceptions délirantes, qui, de plus en plus difficilement distinguées de la réalité de la veille à mesure qu’elle s’éloignait du moment du réveil, finissaient par être considérées comme réelles et amenaient des actions en rapport avec elles.

Nous retrouvons ici Tissié (47), qui, nous rappelant qu’Esquirol apprenait par les rêves de ses monomaniaques le sujet de leurs délires, caractérise les rêves de la lypémanie par ce fait qu’ils sont tristes, oppressifs, durables, et comportent des réveils en sursaut, avec des larmes ou de la sueur; ceux de la manie, en ce qu’ils sont bizarres et fugitifs ; ceux de la démence en ce qu’ils sont fugaces ; ceux de l’hypochondrie en ce qu’ils sont terribles, agitent le sommeil et provoquent des réveils subits ; dans la stupidité enfin, les rêves sont vagues, incohérents et tristes.

Dans l’hystérie, les rêves sont généralement [p. 393 – colonne 2] fatigants et épouvantables, d’après lui, et surtout ils peuvent avoir un grand retentissement sur l’état de vieille.

Voici une observation citée.

Il s’agit d’un malade hystérique, F…, Oswald, 42 ans ; avant d’être atteint de parésie, il avait eu des rêves tactiles, il croyait s’envoler dans l’air. Il assure ne plus rêver depuis qu’il est malade. Il le devint après une émotion occasionnée par un procès : quinze jours après, vers minuit, il eut une hallucination, il vit un homme de petite taille sortir de sa chambre les mains en avant. Une autre nuit, il rêve qu’il assiste à un tremblement de terre et à l’écroulement de sa maison ; au réveil, il est tout étonné de trouver tout en place.

Rêve qui coïncide avec son état parétique.

« J’étais seul, dit-il, dans la forêt d’Arcachon ; dans un endroit triste. A un moment donné, je vis des pieds avec les jambes et les cuisses nues qui se promenaient majestueusement sur la route empierrée. Je distinguai surtout une paire de mauvaises jambes qui s’en allaient eahin-caha. Voilà mon affaire ! celles-là, on ne les réclamera pas, donnez­ moi la meilleure et mettez-la à la place de la mienne, dis-je, ce qui fut aussitôt fait… »

Escande de Messières croit que le vrai caractère du rêve hystérique est son influence longtemps persistante après le sommeil et la perte fréquente de son souvenir.

Ainsi, Marie rêve que la foudre la frappe et garde une douleur persistante. Berthe L… ressent une violente antipathie pour son père et veut se livrer à des voies de fait sur une de ses amies, parce qu’elle a rêvé qu’elle était leur victime.

Le dédoublement de la personnalité est permanent, et l’absence persistante de contrôle permet au rêve de s’imposer comme une suggestion ; l’objet du délire est souvent variable parce que le défaut de synthèse mentale, la désagrégation de l’esprit, produit un dédoublement de personnalité (49).

Signalons une observation de Dubruel qui n’est d’ailleurs appuyée d’aucun exemple précis : il attribue à des rêves des cas de pseudo-grossesse, qu’il considère alors comme traitables par suggestion (50). [p. 394 – colonne 1]

Kelle considère comme signes précurseurs de l’hystérie les actes de somnambulisme, les cauchemars et les terreurs nocturnes, mais ce sont des signes bien peu caractéristiques.

Ce que l’on remarque surtout chez les hystérlques c’est l’objectivation, semble-t-il, des données du rêve. Le rêve n’est pas différencié de la vie de la veille. Le peu de systématisation psychique ne permet pas de critérium suffisant de distinction générale, et l’intensité du rêve ne permet pas même le critérium de l’effacement des images.

Parfois des suggestions du sommeil hypnotique sont accomplies imaginairement en rêve, et le sujet croit réellement les avoir exécutées, comme l’a montré Delbœuf (51).

En revanche, la suggestion des rêves pourra ainsi donner des résultats, comme le montre l’observation de Pitres.

Il s’agit d’une hystérique, une certaine Louise G…, âgée de 37 ans. Le docteur Pitres remarqua qu’elle avait souvent son caractère modifié, sans cause apparente, par des rêves dont elle n’avait aucun souvenir à l’état de veille, qui étaient attestés par une très grande agitation, et qui lui furent révélés dans le sommeil hypnotique où elle en gardait un souvenir précis. Il essaya dans le sommeil hypnotique de lui donner des rêves suggérés qui réussirent pleinement, et même arriva ainsi à la guérir d’un grand nombre d’accidents, par ce moyen (52).

Aussi, s’il est bien probable que, dans le délire, le rêve qui le précède n’est qu’un symptôme, au même titre que le rêve qui l’accompagne, que ce n’est qu’une première manifestation d’un état établi et durable, il n’en va pas de même pour les rapports du rêve et des accidents hystériques qui semblent bien être déterminés par lui comme une suggestion quelconque.

Les fugues du fameux malade de Tissié (53) sont dirigées par des rêves.

Voici un cas curieux de Macario :

« Une femme à laquelle j’ai donné mes soins, et dont j’ai rapporté l’histoire dans mon mémoire sur la paralysie hystérique (Annales médico-psychologiques, numéro de janvier 1844), rêve (c’était à l’époque de ses menstrues), qu’elle adresse la parole à un homme qui ne peut pas lui répondre, car il est muet, [p. 394 – colonne 2] et, chose remarquable, à son réveil elle est aphone (54). »

L’observation suivante est très analogue, mais plus frappante encore :

«  Une dame âgée de trente-cinq ans, mariée, mère de famille et manifestement hystérique, se plaint de palpitations et d’angoisse précordiale ; elle se croit atteinte de cardiopathie ; en réalité, il s’agit de topo-algies qui cèdent facilement à la suggestion, mais ces topo-algies récidivent avec ténacité. C’est qu’elles sont sous la dépendance d’un rêve terrifiant, toujours le même, oublié au réveil, mais persistant à l’état subconscient et susceptible d’être retrouvé pendant le sommeil hypnotique. Grâce à la suggestion, ce rêve est inhibé, le sommeil naturel devient exempt de cauchemar, et la santé générale se rétablit.

« Mais quelques mois après, de violentes émotions surviennent, la vie de famille est désorganisée, et cette même dame souffre d’une crise angineuse très intense. Il s’agit d’une fausse angine de poitrine ; or cet accès angineux a été la copie fidèle et la reproduction exacte d’un rêve survenu pendant la nuit qui a précédé la crise, mais oublié lui aussi pendant la veille normale, et resté à l’état subconscient ; une circonstance de peu d’importance a suffi pour donner le branle et lâcher la bride à tout ce complexus d’associations qui s’étaient peu de temps auparavant systématisées sous la forme onirique (55). »

Féré cite encore un fait semblable :

Une jeune fille de quatorze ans rêve que des hommes la poursuivent pour la tuer sur la place de l’Odéon. Elle fait de grands efforts pour leur échapper et y réussit, mais elle est très fatiguée toute la journée du lendemain. Cela se répète plusieurs nuits de suite et persiste même dans la veille. Enfin, à la suite d’une faiblesse continue des jambes, elle a une paraplégie et va à la Salpêtrière (56).

Cependant l’auteur attribue le fait ici à une paralysie véritable par épuisement, ce qui est en effet tout à fait vraisemblable. Il a d’ailleurs, parait-il, déterminé des parésies analogues en provoquant chez des sujets hypnotisables des rêves de course.

Enfin, dans les Névroses et Idées fixes, on trouve des exemples de pathologie du sommeil.

A côté des insomnies provoquées par des idées fixes, des rêves qui réveillent le sujet à peine en­ dormi (57), nous trouvons des exemples d’action extérieure des rêves sur le corps : une malade est [p. 395 – colonne 1] prise, même dans le sommeil naturel, d’attaque de sommeil avec attitude de contracture, à la suite de rêves émotionnels (57).

Dans un autre cas, l’influence des rèves se manifeste au réveil par des contractures systématiques. Des rêves de déménagements, de marche la tête en bas ; des rêves où le sujet joue l’octave, ou grimpe aux arbres, provoquent au réveil des contractures appropriées (58).

Notons qu’en revanche, des accidents hystériques disparaissent souvent pendant le sommeil, ainsi en est-il pour des contractures (59), pour une paralysie (60), un torticolis mental (61), des hoquets et des rots (62), un tremblement émotionnel qui réapparalt pourtant avec des rêves reproduisant l’émotion (63).

M. Janet (64) avait déjà signalé des exemples de l’influence et du rôle du rêve dans l’hystérie.

Citons en particulier une femme qui, à la suite de reproches que lui fit subir sa mère, voulut se jeter à l’eau dans son rêve ; elle fait un soubresaut qui la réveille, et, à la suite, a des peurs qui ont, dit elle, pour motif des hallucinations de serpents provoquées par l’émotion de la peur; et Isabelle qui devint anorexique depuis que sa mère morte lui eut défendu de manger dans un rêve. Notons ici qu’il doit y avoir bien des anorexies entre autres manies hystériques consécutives à des rêves, comme inversement on a vu des cas de boulimie et surtout de dipsomanie ainsi provoqués ; enfin Daill, qui vit le démon en rêve, et eut à-la suite un délire de possession avec agitation maniaque.

Pour terminer cette étude du rôle du rêve chez les hystériques, notons que le rêve semblerait avoir même une force de suggestion suffisante pour provoquer ces fameuses plaies ou cicatrices imaginaires.

Une femme, en effet, aurait rêvé avoir reçu le fouet, et le matin, elle aurait senti des lésions semblables à des cicatrices (65).

En résumé, nous avons trouvé dans cette partie de notre travail deux significations possibles du rêve :

La première se rapporte aux délires ; le rêve peut en général faire prévoir un délire en manifestant par avance l’état qui en est l’origine. C’est un signe, un symptôme, comme il peut l’être pour les autres [p. 395 – colonne 2] maladies, mais plus clair ici, plus net, mieux observable. Selon la deuxième, au contraire, comme cela arrive dans l’hystérie, le rêve est en général, un facteur même des troubles qui se produisent, s’il n’en est pas toujours l’unique cause.

Instrument de constatation dans le premier cas, le rêve peut et doit donc devenir, dans le second, instrument d’action directe.

IV

Nous donnons ici une place à part à l’influence exagérée et morbide du rêve sur la veille, à l’extension anormale des rapports toujours si étroits de ces deux états, sans que, restant sur les confins de l’aliénation véritable et parfois même empiétant sur son domaine, nous ayons réellement affaire à des délires graves et nettement caractérisés. Qu’on nous excuse donc si l’on trouve ici la limitation souvent trop vague et trop arbitraire.

Chabaneix (66) montre que les manifestations subconscientes de l’esprit sont très fréquentes chez les intellectuels qu’il a particulièrement interrogés ; et, parmi elles, celles qui résultent du rêve sont les plus fréquentes et les plus importantes. Il prouve ainsi l’influence incontestable de la vie du sommeil sur celle de la veille tout en reconnaissant l’influence réciproque.

Un certain P. B… (67) nous raconte une curieuse observation. Après un rêve où il avait vu sa femme, morte depuis peu, un homme déprimé par la fièvre jaune dont il n’était remis que depuis peu de temps, eut une hallucination visuelle intense au réveil : il vit sa femme rester longtemps devant lui, puis sortir par une porte où il voulutla suivre ; et il se trouva en chemise de nuit dans la pièce voisine où étaient ses enfants et sa sœur.

On pourrait rapprocher de ce fait la fameuse histoire du gendarme de Taine dont on a déjà parlé ; mais qui est plutôt un véritablo délire, passager mais réel.

Une observation de Brodie présente un cas beaucoup moins grave ; elle est citée par Hack Tuke : « Un de mes amis vit le matin à son réveil un personnage, habillé en Persan, debout au pied de son lit. Il le voyait aussi nettement, aussi distinctement que les chaises et les tables de la chambre : aussi fut-il sur le point de se lever et d’aller voir de près quel était cet objet ou ce personnage. Mais, en regardant avec plus d’attention, il s’aperçut que tout en voyant le personnage aussi bien que possible, il distinguait [p. 396 – colonne 1] nettement la porte derrière lui. A ce moment la vision s’évanouit. Mon ami se. souvint alors qu’il avait eu un songe dans lequel l’image d’un Persan avait joué le rôle principal (68). »

Nous rapprocherons, à titre de renseignement, des faits cités, ce que rapporte Sully du physiologiste Grathuisen qui eut un songe dans lequel il vit une flamme violette qui, pendant un temps appréciable après son réveil, lui laissa l’impression d’une tache jaune complémentaire (69).

Cette influence du rêve sur la veille, on a cherché il l’utiliser par une influence préalable sur le rêve devant ainsi se répercuter sur la vie normale.

M. Paul Farez (70) s’est aussi beaucoup occupé de suggestion dans le sommeil naturel : il arrive par certains procédés à se faire écouter du dormeur et il lui suggère alors les rêves qu’il croit utiles.

D’une autre manière, mais en se fondant sur le même principe, Corning (71), ayant observé que les rêves sont souvent produits par les sensations extérieures qui précèdent le sommeil, veut agir sur eux, au moyen des vibrations musicales, avant le sommeil, et ainsi agir par contre-coup sur la vie de la veille elle-même. On les transmet au malade au moyen d’un bonnet relié à un phonographe, et on les unit, avant le sommeil, à des images chromatoscopiques dont l’influence est somniférente. Leur action matérielle produit d’excellents effets pour la guérison des phénomènes neurasthéniques ; on y peut ajouter l’influence spirituelle de la parole.

Remarquons que, dans deux cas intéressants de cette nouvelle thérapeutique, un M. L…, dont les rêves morbides auraient été complètement transformés en rêves plus agréables, et un M. S…, dont les idées fixes disparurent par ce moyen, il faut faire appel, non à la simple action matérielle des vibrations, mais à des associations psychologiques éveillées par l’harmonie musicale.

De Sanctis (72), dans ses remarquables travaux, [p. 396 – colonne 2] considère l’influence habituelle de la vie du sommeil sur celle de la veille, et vice versa, comme un phénomène morbide.

En particulier, il a remarqué, surtout chez les hystériques et neurasthéniques et chez les enfants, une répercussion des émotions du sommeil sur la vie de la veille.

Les travaux de M. Nacke signalent aussi l’empiétement de la vie du rêve sur celle de la veille.

En criminologie, on rencontre fréquemment des actes, incendiaires, par exemple, qui sont dus à l’action suggestive des rêves.

Il cite un cas de crime commis dans la somnolence du demi-sommeil consécutivement à un rêve qui le détermina.

Parfois le suicide peut être dû à l’ampliflcation, dans le sommeil, de petits désagréments de la vie normale.

Pour cet auteur, le rêve représente le caractère réel de l’individu : « Dis-moi ce que tu rêves, dit-il, et je te dirai qui tu es. »

Ainsi il croit qu’on peut reconnattre les malades à leurs rêves, les hystériques ou épileptiques par exemple (73).

Il s’est occupé aussi des rapports du rêve et de la sexualité. Il remarque comme une menstruation masculine, marquée par le retour périodique, tous les vingt-cinq jours, de rêves érotiques. Rappelons à ce propos ce que nous avons vu déjà de l’influence de la menstruation féminine sur les rêves qui sont engénéral alors des rêves de sang.

Il pose la question des rapports des pollutions inconscientes avec l’épilepsie larvée. En tout cas l’interruption de la pollution lui paraît un aussi grave symptôme dans le sommeil que dans la veille.

Enfin il remarque surtout l’importance du rêve au point de vue psychologique « charakterologische » et diagnostique.

L’inversion, les perversions sexuelles se reflètent d’après lui dans les rêves comme dans un miroir. Et le rêve érotique joue un rôle très important au point de vue médico-légal en ce qui concerne les fausses accusations des hystériques.

Il cite la remarque de Pitres, qu’à la suite des rêves de coït, les hystériques ressentent de grandes douleurs aux parties génitales à cause d’une contracture vaginale persistante.

Citons enfin avec lui ce passage de Féré à propos de l’inversion sexuelle : « C’est surtout dans les rêves que l’inversion est bien caractérisée. C’est un fait qui est fréquent et peut-être même constant chez les invertis précoces : il parait même exister des cas [p. 397 – colonne 1] dans lesquels l’inversion est exclusivement limitée aux rêves (74). »

M. Mariani (75) a tout récemment publié une étude sur un songe mystique :

Il s’agit d’un individu qui, après s’être occupé longtemps de navigation aérienne, fit un songe s’y rattachant, où il voyage dans les airs et arrive au troisième ciel où se trouve le Paradis et naturellement Dieu, la Vierge, etc., avec musique céleste et accompagnements d’usage. Et les préoccupations techniques, de respiration, d’oxygène, de danger de chute etc., se mêlent aux impressions mystiques.

Le songe le laissa pendant trois jours dans un état de prostration. La mémoire du rêve resta comme stéréotypée dans tous ses détails. Il brûla d’ailleurs son matériel d’études à la suite de ce songe.

Il y avait là, pour l’auteur, une véritable forme d’aliénation, ou du moins un délire en germe chez un candidat à la folie. Un traitement approprié avec du bromure produisit un rétablissement complet.

Et, à ce propos, M. Mariani répète après De Sanctis, que « les songes sont révélateurs de l’état psychique le plus intime et le plus impénétrable d’un individu. »

Enfin M. E. Régis (76) est revenu à maintes reprises sur ce qu’il appelle les délires, les hallucinations oniriques.

Nous parlerons particulièrement de sa très intéressante et très remarquable étude sur les dégénérés mystiques.

il cite un grand nombre d’exemples dont voici la plupart :

R… ayant conversé trois quarts d’heure avec [p. 397 – colonne 2] Dieu, la nuit, se déclare le Messie chargé de préparer le jugement dernier (77).

Une femme a des rêves où elle voit Dieu et la Sainte Vierge qui lui donne sa main à baiser avant de remonter au ciel.

Un autre entre toutes les nuits en conversation avec le ciel au moyen de la Grande Ourse (78).

Un individu réclame la tiare à cause de la voix de Dieu qui parla par sa bouche et de l’incarnation du diable dans un chat, de ses visions dans le sommeil et des paroles qu’il entend alors ; enfin d’une voix intérieure (79).

Une femme voit « le Très-Haut, la nuit, dans sa splendeur (80). »

Les hallucinations d’un officier (81), d’un certain V… (82) et d’un individu que Dieu appelle à de grandes choses (83) sont du même ordre.

Une autre classe sera celle des régicides, qui, pour l’auteur, sont des dégénérés mystiques héréditaires (84).

Ainsi Ravaillac voit sortir des hosties d’un tison enflammé (85). Jacques Clément reçoit dans son sommeil la visite d’un ange messager de Dieu qui lui commande de tuer le roi de France et lui promet la couronne du martyre (86). Staaps, qui voulut tuer Napoléon à Schœnbrunn, écrivait à son père : « Encore cette nuit Dieu m’est apparu. C’était une figure semblable à la lune ; sa voix m’a dit : « Marche en avant, « tu réussiras dans ton entreprise, mais tu y périras » (86).

Enfin, un anarchiste voit un être sous la forme de l’archange Michel qui, s’intitulant le génie de la Révolution, lui commande de mourir pour ses principes comme Jésus-Christ et Pranzini ; et le créateur d’une religion nouvelle reçoit une nuit de Jésus-Christ lui­ même la mission de l’établir.

L’auteur, dans la division classique du sommeil, montre que ces hallucinations se produisent [p. 398 – colonne 1] souvent dans la période hypnagogique, parfois aussi dans la période hypnopompique comme la vision du colonel Gardiner (87).

Mais il arrive aussi que ces hallucinations se produisent le jour, en plus très souvent des visions nocturnes, comme le malade de Moreau de Tours (88) ; mais alors elles se produisent dans une période d’extase très analogue au sommeil et où il y a véritablement des rêves, comme le disait déjà Maury (89). Aussi l’auteur attribue-t-il à ces hallucinations le qualificatif très bien choisi d’onirique. Pour cette hallucination comme pour le rêve il y a intermittence, ce qui ne permet pas de confondre un pareil délire avec les vésanies pures.

Cependant elles peuvent parfois persister comme les songes après le réveil : ainsi cet assassin à qui les anges venaient parler en songe et dicter des actions; et quand il s’éveillait, il croyait les voir encore (90).

Et la vie des religieux et des saints est très riche en exemples de ce genre. Un songe de sœur Anne de Saint-Barthélemy se prolonge en vision après son réveil. Cependant cela est relativement rare.

Enfin ces hallucinations oniriques, intermittentes, se reproduisent toujours identiques, comme stéréotypées. Très différentes donc de celles de l’aliénation mentale, elles se rencontrent non seulement chez les dégénérés, mais en général dans tous les délires toxiques. Nous en avons eu des confirmations dans la première partie de notre étude.

Il ne faut pas chercher dans cette partie de notre étude, par conséquent, des symptômes très nets d’un état bien défini, mais seulement des indications, qui peuvent d’ailleurs être précieuses, sur un certain état morbide, un état de neurasthénie ou de dégénérescence.

N. VASCHIDE ET H. PIERON.

 

[p. 727 – colonne 1]

De la valeur séméiologique du rêve (94)

V

Nous avons réservé aux rêves des épileptiques une partie spéciale, parce que, s’il n’y a pas un très grand nombre d’études sur ce sujet, les résultats semblent du moins assez précis et assez nets.

Féré (95) a parlé de ce qu’il appelle les rêves d’accès chez les épileptiques : ce sont des rêves où le malade se sent le théâtre d’une crise épileptique qui n’a point réellement lieu. Or cela constitue un syrnptôme précurseur de réels accès prochains. L’auteur cite à l’appui trois observations.

Plus récemment encore, Ducosté (96) nous parle, non plus des rêves d’accès, mais de ce qu’il appelle des songes d’attaque. Ces songes se produisent pendant les attaques dont ils sont, par conséquent, contemporains, et pendant les attaques seulement, selon lui. Mais ce point aurait besoin d’être démontré.

Nous allons résumer ici, mais assez longuement les exemples qu’il cite, car ils sont, à notre avis, d’une importance capitale. Il n’y en a d’ailleurs que quatre.

1° J… Elle est immobile dans la mer froide qui lui vient à hauteur des seins. Elle éprouve une sensation très pénible, une angoisse inexplicable. A ce moment arrive une pieuvre qui l’enserre ; elle sent le froid visqueux de ses tentacules glisser sur son corps et sur sa poitrine ; la pieuvre lui suce le sang ; des homards et des marsouins rouges l’enserrent ; elle glisse et tombe ; un homard lui fouille le crâne ; elle aperçoit un phare et veut s’y diriger, mais ses ennemis la harcèlent ; la mer est rougie de son sang, et, trop faible, elle meurt.

2° Marie, 35 ans. C’est le soir ; le soleil se couche, illuminant en rouge la campagne et le ciel. Elle est debout dans un champ de trèfle. Un taureau monstrueux qui galope dans le champ vient la frapper à la poitrine, sans que, le laissant venir, elle pense à s’enfuir, jusqu’à ce que, renversée, songeant enfin à se défendre, elle saisisse l’animal par les parties sexuelles, qu’elle lui arrache. Un flot de sang s’écoule alors ; le taureau se retourne furieux et lui enlève la tête au bout de ses cornes. [p. 727 – colonne 2]

 

3° Hippolyte, 53 ans. Les Tuileries brûlent ; il est sur les bords de la Seine, entend une détonation, et reçoit une balle dans la poitrine ; il voit sortir quelque chose de l’eau. C’est un drapeau rouge dont une main invisible tient la hampe ; ce drapeau grandit démesurément, s’enroule autour de lui, fait cent fois le tour de son corps et l’étouffe ; un bruit d’enfer lui semble sortir de ses plis, et c’est comme une canonnade qui lui brise le tympan ; il a la sensation que ce bruit lui perce un trou au sommet de la tête ; il a un trou en effet et tombe de son haut ; une colonne de sang chaud, brûlant même, le traverse complètement et sort en jet puissant par le pénis. Il porte une main au sommet de sa tête pour empêcher le sang d’entrer, et de l’autre serre le gland. Mais le sang traverse la main posée sur le vertex et passe quand même ; et le gland étant trop serré pour qu’il puisse sortir, il le sent se gonfler de plus en plus. Ses pieds et ses jambes lui semblent d’un poids énorme ; son ventre est d’une ampleur démesurée ; le drapeau rouge qui l’entoure craque de tous côtés : il revoit Paris et les Tuileries qui brûlent toujours; il court alors droit devant lui, mais, épuisé, glisse et s’enfonce. Tout à coup son crâne éclate avec un grand bruit, et il meurt.

4° Paul, 42 ans. Une apparition se présente à lui, avec une croupe de cheval, une tête de sorcière, une poitrine de femme, les cheveux formés de serpents entrelacés. Cette apparition s’approche ; et avant de la voir, il la sent à une odeur d’excréments. Ce monstre porte à la place des organes sexuels un tire-bouchon qu’il enfonce dans la poitrine du malheureux et le fait ainsi tomber, puis l’écrase. P… reste un moment impassible, malgré ses souffrances, puis saisit soudain le monstre aux mamelles et les tord de toutes ses forces. Les serpents se déroulent alors, l’entourent et pénètrent dans son crâne ; quand ils ont dévoré sa cervelle, il meurt.

Pour la première observation, l’auteur note que le songe était connu de la malade bien avant qu’ou lui ait connu des attaques. Lorsqu’elle a fait ce songe la nuit, elle est rompue, son lit est souillé, elle a mordu sa langue. Dans les attaques diurnes, elle ne rêve pas ; cependant, deux ou trois fois, le soir, étant assoupie près du feu, elle fit le songe et eut une attaque.

L’auteur conclut qu’il y a des songes spéciaux toujours les mêmes, pour chaque malade, qui imprègnent la conscience pendant la crise épileptique et il met en parallèle l’aura dans la crise et dans le rêve, la période tonique de la crise et l’immobilité ou l’angoisse du rêve; la période classique et la lutte ; enfin la résolution générale et la mort.

Nous ne savons, pour notre part, si tout le rêve n’est pas une sorte d’aura et si la crise réelle ne se [p. 728 – colonne 1] produit pas au moment où le malade croit mourir, c’est-à-dire, au fond, perd conscience.

L’auteur, en constatant la prédominance du rouge, ne met pas assez en relief les caractères communs à tous les rêves ; et c’est ce que nous allons tâcher de faire :

Tout d’abord le rouge, en effet, chez J…, nous voyons les homards et les marsouins rouges, l’eau rougie de son sang ; chez Marie, c’est le soleil qui rougit le ciel ; le sang qui s’écoule du taureau ; chez Hippolyte, ce sont les Tuileries qui brûlent, le drapeau rouge qui sort de l’eau ; la colonne de sang qui le traverse. Il n’y a que Paul chez qui on ne le remarque pas.

Il y a des parties du corps qui réapparaissent : le crâne, les parties sexuelles, la poitrine.

Le crâne est en général au dernier acte du drame : chez J…, c’est un homard qui lui fouille le crâne ; chez Marie, le taureau lui enlève la tête ; chez Hippolyte, le bruit lui perce un trou dans la tête par où le sang pénètre, malgré ses efforts, et notons que le trou est au vertex, et son crâne éclate à la fin ; chez Paul, enfin, les serpents lui rongent le crâne et la cervelle.

Pour les mamelles, chez J… , l’eau vient à la hauteur des seins, la pieuvre glisse sur sa poitrine ; chez Marie, le taureau la frappe à la poitrine ; Hippolyte reçoit une balle dans la poitrine ; Paul, enfin, a la poitrine percée par le tire-bouchon, et saisit le monstre aux mamelles. Les parties génitales, enfin, jouent un rôle important duns les observations Il et Ill.

Enfin, notons le monstre, pieuvre, taureau, drapeau rouge ou chimère, et la chute dans tous les cas, ainsi que la marche identique des phénomènes.

Que ces songes n’existent que dans la crise ou qu’ils la précèdent et puissent exister sans qu’on la constate d’une manière bien définie, il est clair qu’il y a là plus même qu’un symptôme précieux, décisif même pour le diagnostic ; il y a une source de données curieuses sur la nature même de l’épilepsie et le rôle que jouent certaines parties du corps, la tête, la poitrine, les parties génitales, dans ces accès.

Nous pouvons rapprocher de cette étude celle de Thomayer, de Prague (97), qui considère certains rêves pénibles comme de véritables accès d’épilepsie.

Notons en particulier, dans l’un de ses deux exemples, l’envoi de deux boulets rouges ; dans tous les deux, l’écrasement, l’étouffement, l’étranglement.

Nous admettrions peut-être les conclusions de l’auteur pour le second des rêves qu’il cite, mais non [p. 728 – colonne 2] pour l’autre, où vraiment cela est trop douteux ; car dans ce dernier cas, il n’y a jamais d’accidents le jour, ni de morsure de langue, ni d’émission d’urine au lit ; le seul signe de l’épilepsie serait le battement de cœur ; est-ce vraiment suffisant ?

Quant au premier, on peut le regarder à la rigueur comme un accès épileptoïde, à cause de la répétition dans le jour du rêve de la nuit, et de l’apparition, après le rêve, de vertiges, troubles de connaissance, etc.

Mais ici les exemples ne sont certainement pas assez nets.

Enfin, terminons par cette observation de Debacker qu’un petit malade épileptique « se voyait toujours menacé de globes de feu ».

VI

Nous voici au terme de notre étude historique que nous avons tâché de faire la plus complète possible (98). Les renseignements sont bien épars, souvent de mince valeur. Néanmoins, il est possible de tirer des conclusions de certains rapprochements, de dégager l’utilité et le sens de ces recherches.

Tout d’abord il ne faut pas regarder le rêve comme un symptôme suffisant, sauf dans des cas très rares, ni même, bien souvent, comme un symptôme nécessaire ; mais il ne doit pas être pour cela négligé et il peut fournir un appoint précieux à la séméiologie.

Pour ce qui concerne la pathologie générale, les terreurs nocturnes, les cauchemars, les zoopsies manifestent bien un dérangement fonctionnel, intoxication ou autre trouble, mais sans en déterminer clairement la nature ou la gravité. On ne peut prétendre tirer de ces cas un symptôme clair dans la nature du rêve, d’ailleurs très variable avec les individus.

Mais, dans les affections organiques, il peut y avoir des signes pronostiques donnés par des rêves, présentant comme caractère défini de faire intervenir d’une façon toujours à peu près identique la partie lésée de l’organisme : Les tumeurs et cancers peuvent être ainsi prévus.

D’autre part les affections intestinales, les [p. 729 – colonne 1] angines, les méningites nous paraissent pouvoir être connues d’avance de la même façon.

Et ici nous pouvons donner quelques observations personnelles.

La première concerne une méningite :

Il s’agit d’une enfant de trois ans et demi. Etant couchée dans un lit de cuivre fermé, elle rêve qu’un menuisier, qui a la figure de son médecin, fixe un étau sur le côté de son lit et y enserre sa tête ; elle fait son possible pour se dégager et passe son bras hors de son lit pour desserrer l’étau, avec une telle force qu’elle portera une grande marque à son bras le lendernain matin. A son réveil, elle a une forte fièvre, et le médecin, appelé en toute hâte, reconnait une méningite.

Le second cas a trait à une angine.

Une enfant de huit ans rêve une nuit qu’elle est aux Champs-Élysées avec sa bonne. Un camion passe avec des caisses qui menacent de tomber ; le cocher arréte sa voiture, descend du siège et s’efforce de les remettre en équilibre. Elle s’approche ; le cocher l’attrape aussitôt, la met sur le camion, et lui met une caisse sur la gorge, lui expliquant que c’est pour le faire tenir en équilibre. Elle crie ; on la réveille; elle suffoque bientôt ; et une angine se déclare.

Le troisième concerne une angine gangreneuse. Une jeune fille de quinze ans et demi rêve un jour qu’elle avait été demandée en mariage par un jeune homme qu’elle détestait ; que ce dernier, afln de la forcer à l’accepter comme fiancé, la renverse à terre, et, lui mettant un genou sur la gorge, lui enfonçait des ordures dans la bouche pour I’ernpécher de crier. Quatre jours après, l’angine se déclara.

Un autre fait que nous pouvons encore citer se rapporterait plutôt aux accidents organiques comme abcès ou tumeurs :

Une femme rêve une nuit qu’une de ses voisines vient la voir, ayant autour du cou un serpent, qui aussitôt saute sur elle, lui entre par la bouche et cherche à sortir par l’oreille ; elle le retient pour l’empêcher de piquer ensuite son enfant ; et alors le serpent la mord, et elle souffre beaucoup ; elle entend aussi ses sifflements de colère. Le matin, elle constate qu’elle s’est écorché l’oreille dans cette lutte. Trois jours après, elle avait dans l’oreille un écoulement purulent et entendait des sifflements identiques à ceux de son rêve.

Remarquons à ce propos l’intervention presque constante des monstres, des bêtes dont on a très [p. 729 – colonne 2] peur dans ces cauchemars organiques. La douleur évoque ce qui parait le plus terrible, c’est-à-dire au fond le plus susceptible de faire souffrir.

Enfin, signalons la traduction, dans les rêves, des troubles de la menstruation et, en général des fonctions sexuelles et des organes génitaux.

En tout cas, bien souvent, les femmes peuvent prévoir à leurs rêves l’arrivée du flux menstruel.

La plupart du temps ces rêves sont des rêves de sang.

Pour les épileptiques nous avons cité que le rêve nous donnait des enseignements précieux, précieux surtout quand il y a lieu par exemple, ce qui n’est pas toujours facile de faire, le diagnostic différentiel avec l’hystérie.

D’ailleurs la disparition des accidents hystériques dans le sommeil est un moyen très commode de reconnaître si certains accidents sont nerveux ou réellement organiques. De même pour reconnailre des cécités, ou surdités psychiques il y a lieu de rechercher le rôle des sensations visuelles ou auditives dans les réves.

L’hystérie, ainsi qu’un grand nombre d’états de dégénérescence, si caractérisés par la nature des rêves et surtout l’influence anormale de ces rêves et sur la veille, qui peut, chez les hystériques être utilisée par une action sur les rêves se représentant indirectement sur la veille.

Pour ce qui est des délires véritables et de l’aliénation, le rêve a une valeur pronostique et diagnostique indiscutable; et c’est sur ce point qu’il y a le plus de faits, et les Iaits les mieux observés. Il y a là un moyen de connaissance, et tout moyen da connaissance est ici comme partout un moyen d’action.

Pour tout ce qui concerne l’action morbide du rêve sur la veille, le rôle du rêve dans les délires, en particulier, et dans l’épilepsie, les rêves de prévision des états alternants chez les circulaires, nous publierons un jour les études très longues que nous en avons faites, dernier terme de la longue série d’études que nous avons consacrées à la valeur du rêve dans la vie humaine (99).

N. VASCHIDE ET H. PlERON.

NOTES

(1) Hippocrate, Des Songes, liv. IV du Régime, œuvres complètes, édit. Littré; Paris, Baillière, 1881, t. VI, p. 640-663. [en ligne sur notre site]

(2) Galien, Œuvres, trad. Darernberg, 1854, liv. VIII, p. 524. De la tête, de l’encéphale et des sens.

(3) Sprengel. Histoire pragmatique de la médecine, trad. Jourdan, 1815, t. I. sect. 2, chap. V, p. 140-175.

(4) Artérnidore, Oneirocriticon, liv, V, ch. LXI.

(5) Artérnidore, Oneirocriticon, liv, V, ch.XXVI.

(6) Ibid., liv, V, ch. v.

(7) Double, Quatrième fragment séméiotique. Considerations séméioloqiques sur les songe. Journal général de médecine, vol. XXVII, oct. 1806, p. 129-153. [sur notre site : Signes déduits du sommeil et de la veille. Séméiologie générale, ou Traité des signes et de leur valeur dans les maladies. Paris, Croullebois, 1811-1812, pp. 562-596]

(8) Choquet, Hypnologie, ou du sommeil considéré dans l’état de santé et de maladie ; Thèse de méd., Paris, 1808, t. V, n’ 124, 49 pages.

(9) Voici quelques livres encore de cette époque que nous n’avons pu trouver : Janitsch, Dissertatio de somniis medicis ; Argentorati, 1720, in-4°.
Richier, Onéïrologie ou Dissertation sur les songes considérés dans l’état de maladie, in-4°, 26 pages ; Paris, 1816.
Ammon, Commentarium semeiologicum in quo somni vigiliarumque status morbosi symptomatica exponuntur. Gottingue, 1820, in-4°.
Heusinger, Commentarium semeiologicum de variis somni vigiliarumque conditionibus morbosis earumque in morborum et diagnosi et prognosi Dignitate ; Eisenach, 1820, in-8°.
G. Fabius, Dissertatio psycho-meclica de somniis; Amsterdam, 1836, in-8°.
J. Niderus, De visionibus ac revelationibus.
Von der Hardt, De somniorum differentiis, de causis eorum de deceptis per somnia etl visiones.
F. Sanchez, Lusit, Med. in Tractatu de Divinatione per insomnia.
Peucerus, De prœcipuis divinationum generibus, p. 421 sq.
Schottus, Physic. curios., lib. III, cap. xxv.

(10) Moreau de la Sarthe.

(11) R. Artigues, Essai sur la valeur seméiologique du rêve ; Thèse, Paris, 1884, 52 pages, in-8°.

(12) Larousse, Dictionnaire, art. Rêve.

(13) Xicéphore, in Oneirocriticis iambis.
Cf. Rhazis ad Mansor, De Re medica, liv. II, cap. XXIV ; — Michaël Scot, Physionomia, cap. X.

(14) Ysbrand de Dimerbroeck, lib. IV. De Peste, hist. 67.
Cf. encore Philip Hoechstetteri, Obs. méd., De Cas. VII, Casus secundus, Scholion.
Borrichius, Act. de Copenhague, 1677, 78, 19. Collect. Acad. part. étr., VII, p. 355, obs. 46.

(15) Ball, Théorie des Hallucinations. Revue Scientifique, 1er mai 1880, 2e série, 9e année, n° 44, p. 1029-1036.

(16) Ball, La Morphinomanie, 1885, ch. I, les Rêves prolongés, p. 123-143.

(17) Sergueyeff, Physiologie de la veille et du sommeil, 1890, T. II, p. 791.

(18) Hervé Saint-Denys, les Rêves el les moyens de les diriger, p. 355, note, 356, 357, 359.

(19) Debacker, Des Hallucinations et Terreurs nocturnes chez : les enfants et les adolescents ; Thèse, Paris, 1818, 164 pages.

(20) Debacker, p. 19-80 et note.

(21) Ibid., p. 65.

(22) Julius Nelson, A study of dreams. The American Journal of Psychology, vol. I, May 1888, n° 3, p. 365-402.

(23) Tissié, Les Rêves, p. 60-74.
Il cite à ce propos : Artigues, p. 43 ;
Lasègue, le Sommeil. Études médicales; Paris, 1884, p. 442 ;
Morgagni, Epist. 18, cap. VI.

(24) Ibid.

(25) Il cite : Debacker, p. 96 ;
Macario, Annales médico-psychologiques, t. IX, 1847, p. 27 ;
Simon, L’Irritabilité cérébrale chez les enfants et son traitement. Revue de Thérapeutique générale, 1891, 2° série, t. 1er.

(26) Tissié. Il cite :
G. Sée, Des Dyspepsies gastro-intestinales, 1881 ;
Maury, le Sommeil et les Rêves ;
Azam, Amnésie périodique, Bordeaux, 1877 ;
Ph. Chaslin, Du Rôle du rêve… Thèse, Paris, 1881 ;
Gitauner, Ueber die Kinderkrtmkheiten, p. 112

(27) Faure, Rêves morbides. Archives générales de médecine, p. 558.

(28) Tissié, p. 91-99.

(29) Klippel et Lopez, Du Rêve et du délire qui fait suite dans les infections aiguës. Revue de Psychiatrie, avril 1900, p. 91-103.

(30) Kippel et Trenaunay, Un rêve prolongé d’origine toxi-infectieuse. Revue de Psychiatrie, juin 1900, p. 161-170.

(31) Macario, Des Rêves. Annales médico-psychologiques, 1847, t. IX, p. 17, 48.
Cf. encore: Esquirol, Des maladies mentales.

(32) Faure, Étude sur les rêves morbides. Rêves persistants, Archives générales de médecine, mai 1876, vol. 1er, 6° série, t. XXVII, p. 550-570.

(33) Ph. Chaslin. Du rôle du rêve dans l’évolution des délires, Thèse, Paris, 1887, 61 pages.

(34) Moreau de Tours, Du Haschisch et de l’Aliénation, Paris, 1845, p. 254. Emprunté à Nodier.

(35) Maudsley, Pathologie de l’esprit, p. 46.

(36) Féré, Médecine d’imagination ; Paris, 1887, p. 21.

(37) Ibid.

(38) Ibid.

(39) Lasègue, Études médicales, t. Il, p. 422.

(40) Moreau de Tours, p. 266-273.

(41) Ibid.

(42) Sauvet, Ann. médico-psychologiques, mars 1844, p. 303

(43) Charcot et Magnan, Inversion du sens génital, Archives de neurologie, 1882.

(44) Régis et Lalanne, Origine onirique de certains délires dans la paralysie générale ; Revue de Psychiatrie, novembre 1900, p. 34.

(45) Maudsley, La Pathologie de l’esprit. Trad. du Dr Germont ; Paris, Germer-Baillière, in-8°, 1883, p. 44 et 46.

(46) Dechambre, Dictionnaire encyclopédique des sciences médicales, 1881. Art. Songe, p. 430.

(47) V. Vaschide et P. Meunier, Projection du rêve dans l’état de veille ; Revue de Psychiatrie, tome IV, n° 2, février 1901, p. 38-49. [en ligne sur notre site]

(48) Tissié, p. 85-91.

(49) Escande de Messières, les Rêves chez les hystérique. Thèse de Bordeaux, 1895-1896. D’après Maury, Tissié, Janet, Pitres, Leçons cliniques. — Giraud, l’Asclepeion d’Alhènes. — Russel Reynolds, Remarks on paralysis and other disorders of motion and sensation dependent of idea. — Bernheim, Suggestion et psychotérapie. — Bateman, De l’aphasie. Trad. Villard, p. 95. — Chaslin, Paris, De l’Hystérie infantite, Thèse, Paris, 1880. — Vibert, les Mensonges des hystériques. Progrès médical, 1893, p. 469.
Cf. encore, Escande de Messièrcs, les Rêves chez les hystériques, Revue de l’Hypnotisme, janv. 1896, p. 211-213.

(50) Dubruel, Considérations sur la pseudo-grossesse, Thèse de Bordeaux, 1895-96, n°35, p. 12.

(51) Delbœuf. De l’appréciation du temps par les somnambules. Proceedings of the Society (or Psychical research, vol. VIII, part. xiii, 1892. p. 414-422.

(52) Pitres, Du Rôle des phénomènes psychiques inconscients et des rêves dans la pathogénie et la curation des accidents hystériques ; Revue de l’Hypnotisme, nov.-déc. 1894, p. 129-134, 164-169.

(53) Tissié, L’Automatisme ambulatoire ; Bulletin médical, 1889, n-°18.
Ibid., les Rêves, 1890, Alcan.

(54) Macario, les Rêves ; Annales méd., psych., janv. 1847, p. 29.

(55) Fausse angine de poitrine consécutive à un rêve subconscient. Archives de Neurologie, 1899, 2e Série, n°7, p. 400.

(56) Féré, Un cas de paralysie hystérique consécutive à un rêve ; Société de Biologie, 20 novembre 1886.

(57) E. Raymond et Pierre Janet, Névroses et Idées fixes. Alcan, 1898, t. ler, ch. IX. Insomnie par idées fixes, p. 354-374.

(58) Névroses et idées fixes, t. II, ch. VI, obs. 66. Les Attaques de sommeil.

(59) lbid., t. 1er, ch. IV, p. 175-176. Histoire d’une idée fixe.

(60) lbid., t. Il, p. 516, t. 1er, ch. VIII, § 5, p. 336-338.

(61) lbid., t. 1er, p. 337.

(62) lbid., t. Il, ch. III, § 2, obs. 103, p. 377.

(63) lbid., id., id., § l, obs. 100, p. 366-368.

(64) lbid., id., id., § 3, obs. 91, p. 325-326.

(65) Janet, les Idées fixes de forme hystérique ; Revue de l’Hypnotisme, juin 1895, n’ 9, p. 353-361,
lbid., L’État mental des hystériques.

(66) Hasse, Zeitschrift fûr psychische Aertze, vol. IV, § 3, p. 20.

(67) Chabaneix, Le subconscient chez les artistes, les savants et les écrivains ; Paris, Baillière, 1891, 121 pages.

(68) L. B …, Observation d’hallucination ; Revue Scientifique, 1891, 2e semestre, p. 305.

(69) Hack Tuke, Esprit et corps, l886, p. 16.

(70) J. Sully, Illusions ; a psychological study, 1882, p. 144.

(71) Paul Farez, De la suggestion pendant le sommeil naturel. Revue de l’Hypnotisme, n° 12, p. 257-266, 292-302, 324-335, et Maloine, 1898, 46 pages.
Cf. encore P. Farez, Pratique, avantages, surprises etl dangers de la suggestion dans le sommeil naturel, Communication au Congrès de l’Hypnotisme. Paris, août 1900. Rev. de l’Hypnot.
Ibid., Sommeil naturel et suggestion, Revue de l’Hypnotisme,
novembre 1900.

(72) J. Léonard Corning, Emploi des vibrations musicales avant et pendant le sommeil. Revue internationale d’Electrothérapie et de radiothérapie, 1899, t. IX, p. 209-224.

(73) Sante de Sanctis, Sui rapporti etiologici fra sogni e pazzia. Rome, 1898. V. Rivisla quind, di Psicol . Psichiatr, e neuropatoloqia.
Ibid., 1 soqni. Studi psicologici e clinici di un alienista. Torino, 1899, 1 vol., 390 pages.
Ibid., Emozioni e sogni. Comm. au Congrès int. de psycho de Munich, 1896, sect. IV, p. 348.

(74) Nacke, Die Forensische Bedentung der Träume. Archiv. für Kriminalanthropologie, Bd. V. 1er avril 1900.

(75) E. N¨cke, Kritisches zum Kapitel der normalen und pathologigischen Sexualitat ; Archiv. fur Psychiatrie, Bd. 32. Helt. 2, 1899, p. 363-365, 380-381.
D’après Féré. La Prédisposition et les agents provocateurs dans l’étiologie des perversions sexuelles ; Revue de Médecine, 1891.
Féré, Hysterian epilepsy and the spasmodic neuroses ; Ninetheent Practice of medecin, vol. X, New-York, 1891.
Ellis, Auto-erotism ; a psychological study ; The Alienist and neurologist, oct. 1898.
Lacassagne, Vacher l’éventreur et les crimes sadiques ; Lyon, Paris, 1899, p. 249-215.
Moll, Untersuchungen über die Libido sexualis
Zuccarnlll, Polluzione notturne ed epilepsia. L’Anomalo, 1894-95, p. 42.

(76) C. E. Mariani, Un soqno mistico ; Rivista mensile di neuropatoloqia e Psichiatria, 1er août 1900, n° 2.

(77) E. Régis, Les Hallucinations oniriques ou du Sommeil des dégénérés mystiques. Commun. au Congrès de neuro-psychiatrie de Clermont-Ferrand, août 1894 ; Tribune médicale, in-8°, 22 pages, 1895.
Ibid., Le Délire de rêve chez les vieillards ; Journal de médecine de Bordeaux, 1895, XXV, p. 494-496.
Ibid., Les Rêves. La Gironde ; Bordeaux, 31 mai 1890.
Ibid., Note sur le délire consécutif aux brûlures graves. Congrès de médecine, Paris, août 1900. Cf. Revue de psychologie clinique et de thérapeutique, sept. 1900.

(78) Lélut, Observations sur la folie sensorielle, p. 284. Du démon de Socrate, l vol. in-8°, 1834.

(79) Dupain, Étude clinique sur le délire religieux ; Thèse. Paris, 1888, p. 124 et 78.

(80) Magnan, Les Délires des dégénérés ; Bulletin medical, 24 juin 1894.

(81) H. Colin, Essai sur l’état mental des hystériques ; Thèse, Paris, 1890, obs. XXXII, p. 147.

(82) Christian, art. hallucination du Dict . encycl. des Sc. méd., p. 95.

(83) Dupain, p. 64.

(84) Kraft-Ebing, Lebrbuch der Psychiatrie, t. III, 1880, obs. LXVIII, p. 89.

(85) E. Regis. les Régicides dans l’histoire et le présent ; Archives de l’Anthropologie criminelle, 1890 ; 1 vol. 1890, Storck et Masson

(86) Procès de Ravaillac, Archives historiques de l’Histoire de France, t. XV.

(87) ) Pierre de l’Estoile, Journal de Henri III.

(88) Desmarets, Témoignages historiques ou quinze ans de haute police sous ce nom ; Paris, 1833.

(89) Brierre de Boismont, Des Hallucinations ; Paris, 1845, p. 336.

(90) Moreau de Tours, Du Haschisch et de l’Aliénalion ; Paris, 1875, p. 213.

(91) Maury, le Sommeil el les rêves ; Paris, 1845, p. 231.

(92) Annales d’hygiène et de Médecine légale, janv. 1838, p. 218.

(93) Voir Revue Scientifique, 2e sem. 1900, p. 40, 464 et 491

(94) Voir la Revue du 30 mnrs 1901.

(95) Ch. Féré, Des rêves d’accès chez les épileptiques. Médecine moderne, 1897, p. 777.

(96) Ducosté, Les Songes d’attaque  des épileptiques. Journal de Médecine de Bordeaux, 26 nov. et 3 déc. 1899, n° 48 et 49, p. 533-535, p. 545-547.

(97) Thomaycr ct Simerka, la Signification de quelques rêves. Revue neurologique, 5e année, n° 4, 28 fév. 1897, p. 98-101.

(98) (i) Voici les indications bibliographiques de quelques travaux que nous n’avons malheureusement pu consulter :
Mark Twain, I sogni, Neclures Magazine, New-York, janvier 1900 ;
F. Masci, Il sogno e l’ignosi. Studio psicoloqico. Rivisla novissima, Napoli, 1899 ;
A. Bohr, Bemerkungen über Erinnerungsfüschungen und pathologische Traumzustände, Allgemeine Zeitschrift für Psychiatrie, t. LVI, 1899 ;
Tarozzi, Sul lnfluenza dell’ insomnia sperimenlale sul ricambo materiale .Rivista di Patologia nervosa e mentale, 1899, vol. IV, fasc. I.

(99) Le premier article de cette série a paru dans The Monist (N. Vaschldc and H. Pieron, Prophetie dreams in Greek and Roman Antiquity), vol. XI, n° 2, January 1901. p. 161-194. Chicago.
Signalons encore une communication à la Société d’anthropologie : N. Vaschide et H. Pieron, Le Rêve prophétique dans les croyances et les traditions des peuples sauvages. Séance du 7 mars 1901.

 

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