Don Augustin Calmet. SONGE. Extratit du « Dictionnaire historique critique chronologique géographique et littérale de la Bible » (Paris), 1730, tome 3, N-T, p. 584-585.

Don Augustin Calmet. SONGE. Extratit du « Dictionnaire historique critique chronologique géographique et littérale de la Bible » (Paris), 1730, tome 3, N-T, p. 584-585.

 

Augustin Calmet (1672-1757). Bénédictin de la congrégation de Saint-Vanne et Saint-Hydulphe, exégète et érudit. D’une rare et prodigieuse érudition, on lui doit une quantité de publications, en particulier le Dictionnaire historique critique chronologique géographique et littérale de la Bible . Quelques autres publications  dont la plus célèbre sous trois éditions importantes :
— Dissertations sur les apparitions des anges, des démons et des esprits, et sur les revenants et vampires de Hongrie, de Bohême, de Moravie et de Silésie. Paris, de Bure l’aîné, 1746, in-12, XXXVI-500 p.
— Traité sur les apparitions des esprits et sur les vampires ou les revenants de Hongrie, de Moravie, etc., par le R. P. Dom Augustin Calmet (…), nouvelle édition revue, corrigée et augmentée par l’auteur, Paris, Debure l’aîné, 1751. 2 vol. in-12 ([2], xxvii, 486 p. ; xvi, 483, [5] p.).
— Traité sur les apparitions des esprits et sur les vampires ou les revenants de Hongrie, de Moravie, etc., par le R. P. Dom Augustin Calmet (…), nouvelle édition revue, corrigée & augmentée, Senones, Joseph Pariset, 1759. 2 vol. in-12.
Mais aussi :
— Abrégé de l’histoire de la Lorraine, Nancy, 1734.
— Histoire universelle sacrée et profane, Strasbourg, 1735-1747.

Les [p.] renvoient aux numéros de la pagination originale de l’article. – Nous avons gardé l’orthographe, la syntaxe et la grammaire de l’original.
 – Les  images ont été rajoutées par nos soins. – Nouvelle transcription de l’article original établie sur un exemplaire de collection personnelle sous © histoiredelafolie.fr

[p. 584, colonne 2]

SONGE. On donne ordinairement nom aux songes envoyez de Dieu, qui sont prophétiques ou significatifs. Les Orientaux, & les Juifs en particulier, étoient fort attachez aux songes ; ils les observoient , & en demandoient l’explication à ceux qui se vantoient de les expliquer. On voit l’antiquité de cet usage parmi les Egyptiens, dans l’histoire de l’Echanson & du Panetier de Pharaon, & dans Pharaon [p. 585, colonne 1] lui-même.

On la remarque chez les Chaldéens, dans la personne de Nabuchodonosor. Dieu avoit très-expressement défendu à son peuple d’observer les songes, & de consulter ceux qui se mêloient de les expliquer. Il condamnoit à mort celui qui se vantoit d’avoir des songes prophétiques, & de prédire l’avenir , quand même ce qu’il auroit prédit, seroit arrivé, si après cela il vouIoit engager le peuple dans l’idolâtrie. Mais il ne leur étoit pas défendu, lorsqu’ils croyoient avoir eu quelque songe significatif, de s’adresser aux Prophètes du Seigneur, ou au Grand-Prêtre revêtu de l’ éphod , pour en avoir l’explication .

Aussi le Seigneur dans l’endroit même où il défend aux Hébreux de consulter les Devins, les Magiciens & les Magiciens & le Interprètes  des songes, leur dit : Les peuples dont vous allez posséder la terre, consultent les Devins & les Augures : mais pour vous, ce n’en pas ainsi que vous avez été instruits. Le Seigneur suscitera du milieu de vous , & d’entre vos frères, un Prophète comme moi ; vous le consulterez , & vous l’écouterez. C’étoit donc à Dieu & à ses Prophètes que les Israëlites devoient s’adresser, pour apprendre l’explication des songes, & la prédiction des choses futures. Saül un peu avant la bataille de Gelboé, alla consulter une Pythonisse, parce que le Seigneur s’étoit retiré de lui, & n’avoit pas voulu l’écouter, & lui faire connoître le succès de cette guerre, ni par le moyen des Prophètes, ni par les songe, ni par l’urim & thummim.

Pour se proportionner aux préjugez & à l’idée de ces peuples, qui croyoient que souvent les songes étoient significarifs, & envoyez, de Dieu, le Seigneur découvroit effectivement quelquefois ses volontez en songe, & suscitoient des personnes qui en donnoient l’explication. Il avertit Abimélech en songe, que Sara étoit épouse d Abraham. Il fit voir en songe à Jacob l’échelle mystérieuse ; Il lui révéla en songe sa manière de multiplier les troupeaux. Joseph fut de très-bonne-heure favorisé de songes prophétiques, dont Jacob son père vit aisément la signification. Les songes du Pannetier & de I’Echanson du Roi d’Egypte furent expliquez par Joseph, aussi-bien que ceux de Pharaon. Dieu dit qu’il parle aux autres Prophétes en songe, mais à Moyse face à face. Les Madianites croyoient aussi aux songes, comme il paroir par celui qu’un [p. 585, colonne 2] Madianite racontoit à son compagnon, & dont Gédéon tira un heureux présage pour le succès de son entreprise.

Jérémie invective contre les faux Prophètes , qui se vantoient d’avoir des songes, & qui abusoient de la crédulité du peuple qui les écoutoit : Audivi quædixerunt Praphetæprophetantes in nomine meo mendacium , atque dicentes : Somniavi ,somiavi. Si qulq’un a un songe ou une vision de ma part, qu’il parle & qu’il annonce la vérité en mon nom. Qui-a-t-il de commun entre la paille & le grain, dit le Seigneur ? Mes paroles ne sont-elles pas comme un feu ; & comme un marteau qui brise les rochers ? Joël promet de la part du Seigneur, que dans la nouvelle Alliance & sous le règne du Messie, l’effusion du Saint-Esprit sera plus abondante qu’autrefois, & que les vieillards auront des songes prophétiques, & les jeunes gens des visions.

SONGE, se prend aussi pour ces vaines images qui se forment dans l’imagination pendant le sommeil, & qui n’ont aucun rapport à la prophétie, ni aux dons surnaturels du Saint-Etprit. Job : Velut somnium avolans non invenietur ; transibit quasi visio nocturn. Et Isaïe : Ces peuples étrangers, qui ont combattu contre Ariel, contre Jérusalem, seront dissipez comme des songes. Et de même qu’un homme qui a faim , & qu’il songe qu’il mange, ne se trouve point rassasié à son réveil ; & celui qui a soif, et qui Jonge qu’il boit, n’est pas pour cela désaltéré au réveil ; il en fera de même de toutes les nations qui ont fait la guerre à la montagne de Sion. Voyez aussi Psalm. LXXII. 20. Eccle. V. 2. 6.

Odilon Redon

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